Читаем Révolte sur la Lune полностью

Adam a alors fait une moue pensive, et j’ai pensé : « Mike, cesse de jouer ton rôle, ou tu vas finir par me convaincre moi aussi ! » Il commençait à m’ennuyer, j’avais envie de bavarder avec lui en privé sans qu’il me soit nécessaire de m’adresser au « président Selene » !

— Camarade Wyoming, a-t-il repris sérieusement, c’est une question de pure théorie qui trouve sa place dans un jeu parfaitement réel. Nous disposons d’un certain nombre d’avantages, nous avons quelques « atouts » et donc une certaine liberté de mouvement ; nos adversaires, eux, ont beaucoup plus de ressources et un éventail de ripostes infiniment plus grand. Il nous faut donc agir de façon à utiliser au mieux notre force et obtenir une solution optimum en les poussant à gâcher leurs moyens et en les empêchant de les utiliser au maximum. Il nous est donc essentiel d’imposer notre propre calendrier et de faire une ouverture convenable, dans cette partie difficile, pour déclencher une série d’événements favorables à notre stratégie. Je me rends parfaitement compte que ce plan n’est pas très clair ; il me serait possible de faire traiter toutes les données par un ordinateur pour vous convaincre de sa pertinence, mais je pense que vous pouvez me faire confiance et accepter mes conclusions… ce qui ne vous empêche pas, d’ailleurs, d’étudier vous-même le problème.

Il rappelait ainsi à Wyoh (sous le nez de Stu) qu’il n’était pas Adam Selene mais Mike, notre matériel pensant, un ordinateur – le meilleur que l’on puisse trouver – capable de traiter le problème le plus compliqué.

Wyoh a refusé :

— Non, non ! Je n’ai jamais rien compris aux maths. D’accord, nous ferons ainsi, mais de quelle manière ?

Nous avons parlé jusqu’à 4 heures du matin avant de trouver un plan qui convienne à Prof et à Stu aussi bien qu’à Adam… c’est du moins le temps qu’il a fallu à Mike pour nous faire ingurgiter son plan tout en paraissant étudier nos idées. Ou bien s’agissait-il d’un plan de Prof, avec Adam Selene dans le rôle du vendeur ?

De toute manière, nous avions maintenant un plan et un calendrier, issus de notre remarquable stratégie définie le mardi 14 mai 2075, que nous avions suivis presque à la lettre, n’acceptant que les modifications que nous avaient imposées les événements tels qu’ils s’étaient effectivement produits. Pour nous, il s’agissait surtout de nous conduire aussi désagréablement que possible tout en donnant l’impression qu’il serait vraiment facile de nous mater.


* * *


Je suis donc allé dans la Salle commune vers midi, encore ensommeillé, pour m’apercevoir que j’aurais pu dormir deux heures de plus : les députés de Hong-Kong ne pouvaient vraiment pas venir aussi tôt, même en prenant le métro sur tout le trajet. Wyoh n’a pas ouvert la séance avant 14 h 30.

C’était en effet ma nouvelle épousée qui présidait par intérim, car rassemblée n’avait pas encore fixé son règlement. Les usages parlementaires lui semblaient parfaitement naturels, et elle n’était certes pas un mauvais choix : un troupeau de Lunatiques se comporte toujours beaucoup mieux quand c’est une femme qui brandit le marteau.

Je ne vais pas relater en détail tout ce qu’a fait ou dit ce nouveau Congrès au cours de cette session ni au cours de celles qui l’ont suivi : les comptes rendus sont disponibles. Je n’y suis apparu que lorsque cela s’avérait nécessaire et je ne me suis jamais préoccupé d’apprendre les règlements en usage dans ces assemblées de bavards : un mélange, à parts égales, de politesse ordinaire et des moyens magiques dont disposait le président (ou la présidente) pour faire prévaloir son point de vue.

Wyoh avait à peine déclaré la séance ouverte qu’un hurluberlu s’est levé :

— Gospoja présidente, ne pourrions-nous faire une entorse au règlement et entendre le camarade professeur de La Paz ?… (Ce qui a déclenché un tonnerre d’applaudissements.)

Wyoh a tapé avec son marteau sur le bureau.

— Cette motion n’est pas inscrite à l’ordre du jour et le député de Churchill-Inférieur est prié de se rasseoir. Notre assemblée s’ajournera sans interruption. Le président du Comité des règlements ordinaires, des résolutions et des services gouvernementaux a la parole.

Ledit président s’est révélé être Wolfgang Korsakov, député de Tycho-Inféricur (également membre de la cellule de Prof et filou n°1 de la LuNoHoCo) ; non seulement il avait la parole, mais il l’a gardée toute la journée, ne s’arrêtant que lorsque cela lui convenait (il permettait de parler à ceux qu’il choisissait et non à ceux qui le désiraient). Personne ne s’est trop ennuyé, cette foule semblait se satisfaire d’être commandée. Une foule bruyante mais disciplinée.

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