Quand du haut de collines boisées et au détour d’un chemin ombreux, dont nous débouchâmes après une journée de marche, Mattia aperçut tout à coup devant lui la Seine, décrivant une large courbe au centre de laquelle nous nous trouvions, et promenant doucement ses eaux calmes et puissantes, couvertes de navires aux blanches voiles et de bateaux à vapeur, dont la fumée montait jusqu’à nous, il déclara que cette vue le réconciliait avec l’eau, et qu’il comprenait qu’on pouvait prendre plaisir à glisser sur cette tranquille rivière, au milieu de ces fraîches prairies, de ces champs bien cultivés et de ces bois sombres qui l’encadraient de verdure.
– Sois certain que c’est sur la Seine que madame Milligan a promené son fils malade, me dit-il.
– C’est ce que nous allons bientôt savoir, en faisant causer les gens du village qui est au-dessous.
Mais j’ignorais alors qu’il n’est pas facile d’interroger les Normands, qui répondent rarement d’une façon précise et qui, au contraire, interrogent eux-mêmes ceux qui les questionnent.
–
Quand nous eûmes bien répondu à toutes les questions qu’on nous posa, il fut à peu près certain que le
De La Bouille nous allâmes à Rouen, où nos recherches recommencèrent, mais sans meilleur résultat ; à Elbeuf, on ne put pas non plus nous parler du
Sans nous décourager, nous avancions, questionnant toujours, mais sans grande espérance, car le
Comme nous ne marchions pas seulement pour avancer, mais qu’il nous fallait encore gagner chaque jour notre pain, il nous fallut cinq semaines pour aller d’Isigny à Charenton.
Là une question se présentait : devions-nous suivre la Seine ou bien devions-nous suivre la Marne ? C’était ce que je m’étais demandé bien souvent en étudiant ma carte, mais sans trouver de meilleures raisons pour une route plutôt que pour une autre.
Heureusement en arrivant à Charenton, nous n’eûmes pas à balancer, car à nos demandes on répondit pour la première fois qu’on avait vu un bateau qui ressemblait au
Mattia fut si joyeux qu’il se mit à danser sur le quai : puis tout à coup, cessant de danser, il prit son violon et joua frénétiquement une marche triomphale.
Pendant ce temps, je continuais d’interroger le marinier qui avait bien voulu nous répondre : le doute n’était pas possible, c’était bien le
Deux mois ! Cela lui donnait une terrible avance sur nous. Mais qu’importait ! En marchant nous finirions toujours par le rejoindre, bien que nous n’eussions que nos jambes, tandis que lui il avait celles de deux bons chevaux.
La question de temps n’était rien : le fait capital, extraordinaire, merveilleux, c’était que le
– Qui a eu raison ? criait Mattia.
Si j’avais osé j’aurais avoué que mon espérance était vive aussi, très-vive, mais je n’osais pas préciser, même pour moi seul, toutes les idées, toutes les folies qui faisaient s’envoler mon imagination.
Nous n’avons plus besoin de nous arrêter maintenant pour interroger les gens, le
Mais à Moret le Loing se jette dans la Seine, et il faut recommencer nos questions.
Le
À Montereau il faut les reprendre encore.
Cette fois le
Nous nous rapprochons de Lise en même temps que nous suivons le
Nous arrivons au confluent de l’Yonne et de l’Armençon, le