Читаем Sept jours pour une éternité… полностью

Le patron du Fisher's Deli avait tiré Lucas de sa rêverie.

– Pardon?

– Il y a du verre sous vos doigts, vous allez vous couper.

– Ne vous faites pas de souci pour moi. Qui était-ce?

– Une jolie femme, ce qui est assez rare par ici!

– Oui, c'est pour ça que j'aime bien le quartier! coupa Lucas aussi sec. Vous n'avez pas répondu à ma question.

– C'est ma barmaid qui vous intéresse? Désolé, mais je ne donne pas d'information sur mon personnel, vous n'avez qu'à revenir et lui demander vous-même, elle reprend demain à dix heures.

Lucas plaqua sa main sur le comptoir en zinc. Les morceaux de verre explosèrent en mille éclats. Le propriétaire de l'établissement recula d'un pas.

– Je me fous complètement de votre serveuse! Connaissez-vous la jeune femme qui est partie avec elle? reprit Lucas.

– C'est une de ses amies, elle travaille à la sécurité du port, c'est tout ce que je peux vous dire.

D'un geste vif, Lucas s'empara du torchon fiché dans la ceinture du patron. Il épousseta sa paume qui étrangement n'avait pas la moindre égratignure. Puis il lança le morceau de chiffon dans la poubelle placée derrière le comptoir.

Le patron du Fisher's Deli fronça les sourcils.

– T'inquiète pas, mon vieux, dit Lucas en regardant sa main intacte. C'est comme pour marcher sur les braises, il y a un truc, il y a toujours un truc!

Puis il se dirigea vers la sortie. Sur le perron de l'établissement, il ôta un minuscule éclat qui s'était fiché entre son index et son majeur.

Il avança vers le cabriolet, se pencha par-dessus la portière et en desserra le frein à main. La voiture qu'il avait volée glissa lentement vers la bordure du quai et bascula. Dès que la calandre pénétra dans les flots, le visage de Lucas s'éclaira d'un sourire, aussi intense que celui d'un enfant.

Pour lui, le moment où l'eau envahissait l'habitacle en entrant par la vitre (qu'il prenait toujours soin de laisser entrouverte) était un moment de pure joie. Mais ce qu'il préférait le plus, c'étaient les grosses bulles qui s'évadaient du pot d'échappement – juste avant que la combustion ne s'étouffe. Quand elles éclataient à la surface, leurs «blobblob» étaient irrésistibles.

Lorsque la foule se massa pour voir les feux arrière de la Camaro disparaître dans les eaux troubles du port, Lucas marchait déjà loin dans l'allée, mains dans les poches.

– Je crois que je viens de trouver une perle rare, murmura-t-il en s'éloignant. Si je ne gagne pas, ce serait bien le diable.


*


Zofia et Mathilde dînaient face à la baie, devant l'immense vitre qui surplombait Beach Street. «Notre meilleure table», avait précisé le maître d'hôtel eurasien d'un sourire qui ne cachait rien de sa denture proéminente. La vue était magnifique. A gauche, le Golden Gate, fier de ses ocres, rivalisait de beauté avec le Bay Bridge, le pont argenté d'un an son aîné. Devant elles, les mâts des voiliers se balançaient lentement dans l'enceinte de la marina à l'abri des grandes houles. Des allées de gravier parcellisaient les carrés de pelouse qui s'étendaient jusqu'à l'eau. Les promeneurs du soir les empruntaient, jouissant de la température clémente de ce début d'automne.

Le serveur déposa deux cocktails maison et une corbeille de chips de crevettes sur leur table. «Cadeau de la maison», dit-il en présentant les menus. Mathilde demanda à Zofia si elle était une habituée. Les prix lui semblaient très élevés pour une modeste employée de l'administration. Zofia répondit que le patron les invitait.

– Tu fais sauter les PV?

– Juste un service rendu il y a quelques mois, rien du tout, je t'assure, rétorqua-t-elle, presque confuse.

– J'ai un petit contentieux avec tes rien du tout! Quel genre de service?

Zofia avait rencontré le propriétaire de l'établissement un soir, sur les docks. Il y marchait le long du quai, attendant que l'on dédouane une livraison de vaisselle en provenance de Chine.

La tristesse de son regard avait attiré l'attention de Zofia; elle avait redouté le pire quand il s'était penché près du bord, fixant l'eau saumâtre pendant un long moment. Elle s'était approchée de lui et avait engagé la conversation; il avait fini par lui confier que sa femme voulait le quitter apres quarante-trois années de mariage.

– Quel âge a sa femme? demanda Mathilde, intriguée.

– Soixante-douze ans!

– Et on pense à divorcer à soixante-douze ans? questionna Mathilde en réprimant difficilement le rire qui la gagnait.

– Si ton mari ronfle depuis quarante-trois ans, tu peux y penser très fort, voire même toutes les nuits.

– Tu as ressoudé le couple?

– Je l'ai convaincu de se faire opérer en lui promettant que cela ne lui ferait pas mal. Les hommes sont tellement douillets.

– Tu crois qu'il aurait vraiment sauté?

– Il avait jeté son alliance à l'eau!

Mathilde leva les yeux au ciel, elle fut fascinée par le plafond du restaurant entièrement décoré de vitraux de chez Tiffany's. Il donnait à la salle un air de cathédrale. Zofia partageait son avis et lui resservit une bouchée de poulet.

Intriguée, Mathilde se passa la main dans les cheveux.

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