Les partis qui vont d'echirer ce pays commencent d'ej`a `a se dessiner. D'ej`a sur diff'erents points la R'epublique a pris pied en Allemagne, et l’on peut compter qu’elle ne se retirera pas sans avoir combattu, car elle a pour elle la logique et derri`ere elle la France. Aux yeux de ce parti la question de nationalit'e n’a ni sens, ni valeur. Dans l’int'er^et de sa cause il n’h'esitera pas un instant `a immoler l’ind'ependance de son pays, et il enr^olerait l’Allemagne tout enti`ere plut^ot aujourd’hui que demain sous le drapeau de la France, f^ut-ce m^eme sous le drapeau rouge. Ses auxiliaires sont partout; il trouve aide et appui dans les hommes comme dans les choses, aussi bien dans les instincts anarchiques des masses que dans les institutions anarchiques que viennent d’^etre sem'ees avec tant de profusion `a travers toute l’Allemagne. Mais ses meilleurs, ses plus puissants auxiliaires sont pr'ecis'ement les hommes qui d’un moment `a l’autre peuvent ^etre appel'es `a la combattre: tant les hommes se trouvent li'es `a elle par la solidarit'e des principes. Maintenant, toute la question est de savoir si la lutte 'eclatera avant que les pr'etendus conservateurs aient eu le temps de compromettre par leurs divisions et leurs folies tous les 'el'ements de force et de r'esistance dont l’Allemagne dispose encore; si, en un mot, attaqu'es par le parti r'epublicain, ils se d'ecident `a voir en lui ce qu’il est en effet l’avant-garde de l’invasion francaise, et retrouvent, dans le sentiment du danger dont l’ind'ependance nationale s'erait menac'ee, assez d’'energie pour combattre la r'epublique `a toute outrance; ou bien si pour s’'epargner la lutte ils aimeront mieux accepter quelque faux semblant de transaction qui ne serait au fond de leur part qu’une capitulation d'eguis'ee. Dans le cas o`u cette derni`ere supposition viendrait `a se r'ealiser, alors (il faut le reconna^itre) l’'eventualit'e d’une croisade contre la Russie, de cette croisade qui a toujours 'et'e le r^eve ch'eri de la R'evolution et qui maintenant est devenu son cri de guerre — cette 'eventualit'e se convertirait en une presque certitude; le jour de la lutte d'ecisive serait presque arriv'e, et c’est la Pologne qui servirait de champ de bataille. Voil`a du moins la chance que caressent avec amour les r'evolutionnaires de tous les pays; mais il y a toutefois un 'el'ement de la question dont ils ne tiennent pas assez compte, et cette omission pourrait singuli`erement d'eranger leurs calculs.
Le parti r'evolutionnaire, en Allemagne surtout, para^it s’^etre persuad'e que puisque lui-m^eme faisait si bon march'e de l’'el'ement national, il en serait de m^eme dans tous les pays soumis `a son action et que partout et toujours la question de principe primerait la question de nationalit'e. D'ej`a les 'ev'enements de la Lombardie ont d^u faire faire de singuli`eres r'eflexions aux 'etudiants r'eformateurs de Vienne, qui s’'etaient imagin'e qu’il suffisait de chasser le prince de Metternich et de proclamer la libert'e de la presse pour r'esoudre les formidables difficult'es qui p`esent sur la monarchie autrichienne. Les Italiens n’en persistent pas moins `a ne voir en eux que des