Читаем Avé, Christ полностью

L'ancien sourit et fit observer :

Tu crois alors que nous pouvons le vaincre par la force des idées bien tournées ? Considérerais-tu par hasard que le Maître est descendu des cieux rien que pour parler ? Jésus a vécu chacune des leçons combattant l'ombre avec la lumière qui rayonnait en lui, et cela jusqu'au dernier sacrifice. Nous sommes dans un monde entouré de ténèbres et nous ne possédons pas d'autres torches pour nous éclairer que notre âme que nous devons enflammer du véritable amour. L'Évangile n'est pas seulement une propagande d'idées libératrices. Au- dessus de tout, c'est la construction d'un monde nouveau par la construction morale du nouvel homme. Jusqu'à présent, la civilisation a considéré la femme, notre mère et notre sœur comme étant une vulgaire marchandise. Pendant des millénaires, nous avons fait d'elle notre esclave, en la vendant, en l'explorant, en la lapidant ou en la tuant, sans que les lois nous considèrent passibles de jugement. Mais, n'est-elle pas elle aussi un être humain ? Vivrait-elle indemne de faiblesses égales aux nôtres ? Pourquoi lui conférer un traitement inférieur à celui que nous dispensons aux chevaux, si c'est d'elle que nous recevons la bénédiction de la vie ? Dans toutes les phases de l'apostolat divin, Jésus l'a dignifiée, sanctifiant sa mission sublime. Et pour rappeler l'enseignement, il est juste de répéter — qui de nous, en toute conscience, peut lancer la première pierre.

Fixant expressivement ses deux auditeurs, il a ajouté :

Pour racheter les créatures, le christianisme exige une avant-garde d'esprits déterminés à exécuter son plan d'action.

Cependant — a réfléchi le jeune Romain timidement —, peut-on nier que Cintia soit dans l'erreur ?

Mon fils, celui qui attise le feu dans sa vie de tous les jours, marchera certainement sur les flammes de l'incendie. Compatis des égarés ! Ne sont-ils pas suffisamment malheureux d'eux-mêmes ?

Et mon enfant ? — a demandé Varrus la voix saisie de sanglots.

Je comprends ton affliction.

Et, tout en parcourant d'un regard lucide la petite pièce, Corvinus a semblé dévoiler un peu de son cœur, en ajoutant :

En d'autres temps, j'ai bu le même calice. M'éloigner de mes enfants a été pour moi la source de terribles angoisses. J'ai marché lacéré comme une feuille emportée au gré du vent, mais j'ai fini par percevoir que les enfants sont de Dieu, avant même d'être doucement déposés entre nos mains. Je comprends ton malheur. Mourir mille fois sous tout type de torture est une moindre souffrance que celle de la séparation d'une fleur vivante que nous désirerions retenir à l'arbre de notre destinée...

Et pourtant — a commenté le patricien affligé —, ne serait-il pas juste de défendre un innocent en réclamant le droit de le protéger et de l'instruire ?

Mais qui donc voudra bien t'écouter quand un ordre impérial insignifiant pourrait étouffer tes cris ? De plus — allégua l'ancien affectueusement —, si l'on souhaite servir le Christ, comment peut-on imposer à autrui la colère que la lutte nous force à supporter ? Ta femme peut ne pas avoir été généreuse envers ton cœur mais elle sera probablement une mère dévouée pour ton enfant. Ne vaudrait-il donc pas mieux attendre les desseins du Très- Haut, à la grâce du temps ?

Le père malheureux portait toujours sur son visage une pénible expression, Corvinus lui fit alors observer après une longue pause :

Ne te soumets pas à la froideur de la désillusion en annihilant tes propres forces. La douleur peut être comparée au courant emporté d'un fleuve susceptible de nous conduire au bonheur sur la terre ferme, ou de nous noyer quand nous ne savons pas nager. Écoute-nous. L'Évangile n'est pas seulement une voie d'accès à la joie céleste après la mort, mais c'est aussi une lumière pour notre existence dans ce monde que nous devons transformer en Règne de Dieu. Ne te souviens-tu pas de la visite de Nicodèmes au Divin Maître quand le Seigneur a assuré convainquant : — « il convient de renaître à nouveau » ?

Devant le signe affirmatif de Varrus Quint, l'ancien a continué :

J'ai aussi beaucoup souffert quand, encore jeune, je me suis décidé au travail de la foi. Répudié de tous, j'ai été obligé de m'éloigner des Gaules où je suis né, en m'attardant pendant dix longues années en Alexandrie où j'ai approfondi mes connaissances. L'église, là- bas, reste ouverte à de plus amples considérations quant à la destinée et à l'être. Les idées de Pythagore sont reconnues par un grand centre d'études, profitant à tous, et après avoir attentivement écouté des prêtres illustres et des adeptes plus éclairés, je me suis convaincu que nous renaissons de nombreuses fois sur terre. Le corps est l'habit temporel de notre âme qui ne meurt jamais. La tombe est résurrection. Nous reviendrons à la chair, autant de fois que ce sera nécessaire jusqu'à ce que nous ayons purifié toutes les imperfections de notre âme, tout comme le métal noble supporte le creuset purificateur jusqu'à ce que soient rejetés les résidus qui le souillent.

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