Bray suivant sa coutume est toujours fort affairé et se donne à peine le temps de répondre; ne restant jamais assez longtemps à la même place pour que l'on soit dans la possibilité d'avoir une conversation suivie avec lui: car il a tous les jours cent visites à rendre, et autant d'affaires importantes à examiner qui ne lui laissent pas le temps de s'occuper de ce dont vous lui parlez. Le fait est qu'il est amoureux fou de la petite Hagen [?], et qu'il n'ose pas se l'avouer parce qu'il craint la Dame en question qui le surveille de près; maintenant que le mari est parti il n'a plus [de] raison de convenance à donner, et il devra s'y trouver du matin au soir! Je lui souhaite beaucoup de plaisirs.
Ma lettre vous trouvera déjà établi et content ayant fait connaissance avec le papa d'Anthès. Je suis excessivement curieux de votre prochaine lettre pour savoir si vous êtes content du choix des eaux et de la société que vous y trouvez: quelle différence si au lieu d'être seul comme je suis dans ce moment, j'étais avec vous! Combien je serais heureux! Vous dire le vide que me laisse votre absence est une chose impossible. Je ne puis mieux le comparer qu'à celui que vous devez éprouver vous-même, car malgré que vous m'ayez reçu quelquefois en grognant (je parle du temps de la grande dépêche, c'est bien entendu), je savais bien cependant que vous étiez bien aise de causer un peu; c'était devenu un besoin pour vous comme pour moi de nous voir à chaque instant de la journée. En venant en Russie je m'attendais à n'y trouver que des étrangers: aussi avez-vous été pour moi une providence! Car un ami, comme vous le dites, ce n'est pas juste, car un ami n'aurait pas fait tout ce que vous fîtes pour moi sans me connaître; enfin vous m'avez gâté, je m'y étais accoutumé, on s'accoutume si vite au bonheur, et avec tout ceci une indulgence que je n'aurais jamais trouvée chez mon père. Eh bien, tout à coup entouré de gens envieux et jaloux de ma position, et figurez-vous si je sens la différence et si chaque heure de la journée me fait apercevoir que vous n'êtes plus là. Adieu cher ami. Soignez-vous beaucoup et amusez-vous encore davantage et je suis sûr que vous nous reviendrez bien portant et avec un état de santé tel que vous pourrez recommencer, comme à 20 ans, l'existence qu'il vous conviendra de mener sans que cela vous dérange le moins du monde. C'est au moins mon souhait, vous savez si je vous aime et si je le fais de bon cœur, en attendant je vous embrasse comme je vous aime, c'est-à-dire bien fort.
Dites mille choses à mon père et que j'attends une lettre de Soulz depuis très longtemps.
Петербург, 18 мая 1835
Дорогой друг, вы не можете представить, какую радость доставило мне ваше письмо и как вместе с тем успокоило, поскольку я в самом деле страшно боялся, как бы от морской болезни у вас не сделались колики, а это было бы ужасно на корабле, где чувствуешь себя дома не больше, чем в театральной зале; но, благодарение Богу, всё прошло благополучно и вы отделались легко, отдав, подобно всем мученикам, положенную дань. Мы были не столь удачливы в своём плавании, и наше возвращение явилось самой смешной и нелепой историей на свете. Вы помните, конечно, какая ужасная была погода, когда мы расстались. Так вот! Она стала ещё хуже; непогода разыгралась, стоило нам выйти в открытый залив, так что хороши же мы были; во-первых, Брей[2], который поначалу так пыжился на большом корабле, а теперь уж не знал, какому богу молиться, и тотчас стал возвращать не только обед, съеденный на борту, но и все предыдущие за прошлую неделю, сопровождая это воплями на всех языках и стенаниями во всех тональностях; граф Лубинский[3] был вполне умерен в отношении опорожнения, но у него что-то случилось с головой, ибо он не вполне отчётливо соображал; Барант[4] неподвижно лежал навзничь на палубе без шинели и держал парус от Кронштадта до Петербурга. Над ним-то я не смеюсь, мне его просто жаль, ведь человек с его здоровьем, позволяющий себе такие сумасбродства, просто безумец; нет нужды называть вам героя экспедиции, вы и сами догадываетесь! Да, Бобринский[5] был великолепен, невозмутимый и величественный в опасности, ведь опасность,