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Et tu le vois bien de l'arbre qui est sommeil apparent et mesure et lenteur, et parfum établi autour comme un règne, bien qu'il puisse servir d'aliment pour la poudre, ou l'incendie, dilapidant à jamais son pouvoir. Ainsi de toi et de tes colères rentrées, et de tes jalousies, et de tes ruses et de cette chaleur des sens qui te rend si difficile la nuit venue, je veux faire un arbre pacifique. Non par amputation mais, de même que la semence te sauve dans l'arbre un soleil qui s'en irait fondre la glace et pourrir avec elle, la semence spirituelle qui te bâtira dans ta propre gaine, ne refusant rien de toi, ne t'amputant point, ne te châtrant point, mais fondant tes mille caractères dans ton unité. C'est pourquoi je dirai non pas «Viens chez moi te faire tailler, ni réduire, ni même modeler», mais «Viens chez moi te faire naître à toi-même». Tu me soumets tes matériaux en vrac et je te rends à toi devenu un. Ce n'est point moi qui marche en toi. C'est toi qui marches. Je ne suis rien, sinon ta commune mesure. Donc celle-là chaude et méditant le mal. A cause que t'incline au mal la cruauté des nuits chaudes quand tu te tournes et te retournes sans devenir, toute brisée et abandonnée et défaite. Mauvaise sentinelle d'une ville démantelée. Et je la vois bien ne sachant quoi faire de ses matériaux épars. Et elle appelle le chanteur, et il chante. «Non, dit-elle, qu'il s'en aille.» Elle en appelle un autre, puis un autre. Et elle les use. Puis elle se lève de fatigue et réveille l'amie: «Irréparable est mon ennui! Les chants ne me peuvent distraire…»

Puis donc l'amour, et celui-là, et celui-là, et celui-là… elle les pille l'un après l'autre. Car elle y cherche son unité, et comment l'y trouverait-elle? Il ne s'agit point d'un objet égaré parmi des objets.

Mais je viendrai dans le silence. Je serai couture invisible. Je ne changerai rien des matériaux, ni même leur place, mais je leur rendrai leur signification, amant invisible qui fait devenir.


CLXXIX


Instrument de musique sans musicien, et t'émerveillant des sons que tu rends. J'ai ainsi vu l'enfant s'égayer de pincer les cordes et rire du pouvoir de ses mains. Mais les sons ne m'importent guère, je veux te voir te transporter en moi. Mais tu n'as rien à transporter car tu n'es point, ayant négligé de devenir. Et tu vas pinçant au hasard tes cordes dans l'attente d'un son plus étrange que l'autre. Car te tourmente l'espoir de rencontrer l'œuvre en chemin (comme s'il s'agissait d'un fruit à trouver hors de toi) et de ramener, en captivité, ton poème.

Mais je te veux semence bien fondée qui draine autour pour son poème. Je te veux d'une âme bâtie et déjà prête pour l'amour — et non cherchant, dans le vent du soir, quelque visage qui te capture, car il n'est rien en toi à capturer.

Ainsi célèbres-tu l'amour.

Ainsi célèbres-tu la justice. Non les choses justes. Et aisément tu te feras injuste dans les occasions particulières, pour la servir.

Tu célébreras la pitié, mais aisément tu te feras cruel dans les occasions particulières, pour la servir.

Tu célébreras la liberté et tu empileras dans tes prisons ceux qui ne chantent point comme toi.

Or, je connais des hommes justes, non la justice. Des hommes libres, non la liberté. Des hommes animés par l'amour, et non l'amour. De même que je ne connais ni la beauté ni le bonheur, mais des hommes heureux et des choses belles.

Mais d'abord il a donc fallu et agir, et construire, et apprendre, et créer. Ensuite viennent les récompenses.

Mais eux, habitant des lits de parade, estiment plus simple d'atteindre l'essence sans bâtir d'abord la diversité. Ainsi du fumeur de hachisch qui se procure pour quelques sous des ivresses de créateur.

Ils ressemblent aux prostituées ouvertes au vent. Et qui leur servira jamais l'amour?


CLXXX


Méprisant l'opulence ventrue je ne la tolère que comme condition de plus haut qu'elle, comme il en est de la grossièreté malodorante des égoutiers, laquelle est condition du lustrage de la ville. Ayant appris qu'il n'est point de contraires et que la perfection, c'est la mort. Je tolère ainsi les mauvais sculpteurs comme condition des bons sculpteurs, le mauvais goût comme condition du bon goût, la contrainte intérieure comme condition de la liberté, et l'opulence ventrue comme condition d'une élévation qui n'est point d'elle ni pour elle mais de ceux-là seuls et pour ceux-là qu'elle alimente. Car si, payant aux sculpteurs leur sculpture, elle assume le rôle d'entrepôt nécessaire où le bon poète puisera le grain dont il vivra, lequel grain a été pillé sur le travail du laboureur puisqu'il ne reçoit en échange qu'un poème dont il se moque, ou une sculpture qui souvent ne lui sera même point montrée, et qu'ainsi faute de pillard ne survivraient point les sculpteurs, peu m'importe que l'entrepôt porte un nom d'homme. Il n'est que véhicule, voie et passage.

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