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Cependant je ne croyais point en la démarche. Tu n'achètes point la joie, ni la santé ni l'amour véritable. Tu n'achètes point les étoiles. Tu n'achètes point un temple. Je crois au temple qui te pille. Je crois aux temples grandissants qui arrachent leur sueur aux hommes. Ils délèguent au loin leurs apôtres et ceux-ci te vont rançonner, au nom de leur Dieu. Je crois au temple du roi cruel qui fonde son orgueil dans la pierre. Il draine les mâles du territoire vers son chantier. Et les adjudants, munis de fouets, tirent d'eux le charroi des pierres. Je crois au temple qui t'exploite et te dévore. Et, en retour, te convertit. Car celui-là seul te paie en retour. Car le charrieur de pierres du roi cruel reçoit à son tour le droit à l'orgueil. On le voit se croiser les bras devant l'étrave dont le navire de granit commence de menacer les sables dans la lenteur des siècles à venir. Sa majesté est pour lui, comme pour les autres, car un Dieu, une fois fondé, se donne à tous sans se réduire. Je crois au temple né de l'enthousiasme de la victoire. Tu grées un navire vers l'éternité. Et chacun chante en bâtissant le temple. Et le temps chantera en retour.

Je crois en l'amour qui se change en temple. Je crois en l'orgueil qui se change en temple. Et je croirais, si tu savais me les bâtir, aux temples de colère. Car alors je vois l'arbre qui plonge ses racines dans l'amour, ou l'orgueil, ou l'ivresse de la victoire, ou la colère. Il t'arrache ton suc pour se nourrir. Mais voici que tu offres à l'ambition de ses racines une cave misérable, fût-elle comble d'or. Elle ne saura nourrir qu'un entrepôt pour marchandises. Un siècle de vent, de pluie et de sable te l'effondrera.

Donc ayant dédaigné que le trésor fût enrichissement, ayant dédaigné qu'il fût récompense, ayant dédaigné qu'il se transformât en navire de pierre, n'étant point satisfait dans la recherche d'un visage lumineux et qui embellit le cœur des hommes, je m'en fus réfléchir en silence.

«Il n'est là, songeais-je, qu'engrais et fumier. J'ai tort de prétendre tirer de lui une autre signification.»


CXCIX


Je priai donc Dieu de m'instruire et il me fit, dans sa bonté, me souvenir des caravanes vers la ville sainte, bien que je ne comprisse point tout d'abord en quoi une vision de chameliers et de soleil me pouvait éclairer mon litige.

Je te vis, ô mon peuple, préparant sur mon ordre ton pèlerinage. J'ai toujours goûté comme un miel unique l'activité du dernier soir. Car il en est de l'expédition que tu montes comme d'un navire que tu gréerais l'ayant achevé de bâtir, et qui, ayant eu sens de sculpture ou de temple, lesquels usent les marteaux et te provoquent dans tes inventions et tes calculs et la puissance de ton bras, prend maintenant sens de voyage, car tu l'habilles pour le vent. Ainsi de ta fille que tu as nourrie et enseignée et dont tu as châtié l'amour des parures — mais vient l'aube du jour où l'époux l'attend et, ce matin-là, de ne jamais la juger assez belle, tu te ruines pour elle en étoffe de lin et bracelets d'or, car il s'agit aussi pour toi du lancer d'un navire à la mer.

Donc ayant achevé d'amonceler les provisions, de clouer les caisses, de nouer les sacs, tu passais royal parmi les bêtes, flattant l'une, gourmandant l'autre, t'aidant du genou pour serrer un peu telle courroie de cuir, et t'enorgueillissant, une fois hissé le chargement, de ne le voir glisser ni vers la droite ni vers la gauche, connaissant que les bêtes, te le balançant durement dans le roulis de leur démarche et le trébuchement parmi les pierres et l'agenouillement pour les haltes, te le tiendront cependant suspendu dans un équilibre élastique, à la façon de l'oranger qui balance au vent sans menacer sa cargaison d'oranges.

Je savoure alors ta chaleur, ô mon peuple, qui prépares la chrysalide de tes quarante jours de désert, et, n'écoutant point le vent des paroles, ne me suis jamais trompé sur toi. Car, me promenant aux veilles de départ, dans le silence de mon amour, parmi les craquements des courroies, les grognements des bêtes, et les discussions aigres au sujet de la route à suivre, ou du choix des guides, ou du rôle désigné à chacun, je ne m'étonnais point de vous entendre, non vanter le voyage, mais bien au contraire peindre en noir le récit des souffrances de l'expédition de l'année passée, et les puits taris, et les vents brûlants, et les piqûres de serpents pris dans le sable comme d'invisibles nerfs, et l'embuscade des pillards, et la maladie et la mort, sachant qu'il n'était rien là que pudeur de l'amour.

Car il est bon que tu feignes de ne point t'exalter sur ton dieu en célébrant d'abord les coupoles dorées de la ville sainte, car ton dieu n'est point cadeau tout fait, ni provision réservée pour toi quelque part, mais fête et couronnement du cérémonial de tes misères.


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