Читаем Citadelle полностью

C'est pourquoi j'ai toujours méprisé comme vain le vent des paroles. Et je me suis défié des artifices du langage. Et quand mes généraux, dans leur solide stupidité, me venaient dire: «Le peuple se révolte, nous te proposons d'être habile…» je renvoyais mes généraux. Car l'habileté n'est qu'un vain mot. Et il n'est point de détour possible dans la création. On fonde ce que l'on fait et rien de plus. Et si tu prétends, poursuivant un but, tendre vers un autre, et qui diffère du premier, celui-là seul qui est dupe des mots te croira habile. Car ce que tu fondes, en fin de compte, c'est ce vers quoi tu vas d'abord et rien de plus. Tu fondes ce dont tu t'occupes et rien de plus. Même si tu t'en occupes pour lutter contre. Je fonde mon ennemi si je lui fais la guerre. Je le forge et je le durcis. Et si je prétends vainement au nom des libertés futures renforcer ma contrainte, c'est la contrainte que je fonde. Car on ne biaise point avec la vie. On ne trompe point l'arbre: on le fait pousser comme on le dirige. Le reste n'est que vent de paroles. Et si je prétends sacrifier ma génération pour le bonheur des générations futures ce sont les hommes que je sacrifie. Non ceux-ci ou d'autres mais tous. Je les enferme tous tout simplement dans le malheur. Le reste n'est que vent de paroles. Et si je fais la guerre pour obtenir la paix, je fonde la guerre. La paix n'est point un état que l'on atteigne à travers la guerre. Si je crois à la paix conquise par les armes et si je désarme, je meurs. Car la paix, je ne puis l'établir que si je fonde la paix. C'est-à-dire si je reçois ou j'absorbe et si chaque homme trouve dans mon empire l'expression de ses souhaits particuliers. Car l'image peut être la même que chacun aime à sa façon. Seul un langage insuffisant oppose les hommes les uns aux autres, car ce qu'ils souhaitent ne varie point. Je n'ai jamais rencontré celui-là qui souhaitât ou le désordre, ou la bassesse, ou la ruine. L'image qui les tourmente et qu'ils aimeraient fonder se ressemble d'un bout à l'autre de l'univers, mais les voies par lesquelles ils cherchent à l'atteindre diffèrent. Celui-là croit que la liberté permettra à l'homme de s'épanouir, l'autre que la contrainte le bâtira grand, et tous deux souhaitent sa grandeur. Celui-là croit que la charité les unira, l'autre méprise la bonté qui n'est que respect de l'ulcère et il oblige l'homme de bâtir une tour en quoi ils se fondent l'un dans l'autre. Et tous deux travaillent pour l'amour. Celui-là croit que la prospérité domine tous les problèmes car l'homme délivré de ses charges trouve le temps de cultiver son cœur, son âme et son intelligence. Mais l'autre estime que la qualité de leurs cœurs, de leurs intelligences et de leurs âmes n'est point liée aux aliments qu'on leur fournit ni aux facilités qu'on leur accorde mais aux dons qu'on sollicite d'eux. Il croit que seuls sont beaux les temples nés des exigences de Dieu, et remis en rançon. Mais tous deux souhaitaient d'embellir l'âme, l'intelligence et le cœur. Et tous deux ont raison, car qui peut grandir dans l'esclavage, la cruauté et l'abrutissement d'un lourd travail? Mais qui peut grandir dans la licence, le respect de la pourriture et l'œuvre vaine qui n'est plus que passe-temps d'oisifs?

Les voilà qui prennent les armes à cause de mots inefficaces, au nom du même amour. Et c'est la guerre, qui est recherche et lutte et mouvement incohérent dans l'impérieuse direction, comme de l'arbre de mon poète qui, né aveugle, cogna les murs de sa prison jusqu'à crever une lucarne pour jaillir droit vers le soleil, enfin rectiligne et glorieux.

La paix je ne l'impose point. Je fonde mon ennemi et sa rancune si je me borne à le soumettre. Il n'est grand que de convertir et convertir c'est recevoir. C'est offrir à chacun, pour qu'il s'y sente à l'aise, un vêtement à sa mesure. Et le même vêtement pour tous. Car toute contradiction n'est qu'absence de génie.

C'est pourquoi je répète ma prière:

«Seigneur, éclairez-moi. Faites-moi grandir en sagesse afin que je réconcilie non par abandon, exigé des uns et des autres, de quelque souhait de leur ferveur. Mais par visage nouveau qui leur apparaîtrait le même. Ainsi du navire, Seigneur! Ceux-là qui, sans comprendre, tirent les cordages de bâbord luttent contre ceux qui tirent à tribord. Ils se haïraient dans l'ignorance. Mais s'ils savent, ils collaborent et tous deux servent le vent.»

La paix est arbre long à grandir. Il nous faut de même que le cèdre, aspirer encore beaucoup de rocaille pour lui fonder son unité…

Перейти на страницу:

Похожие книги

Айза
Айза

Опаленный солнцем негостеприимный остров Лансароте был домом для многих поколений отчаянных моряков из семьи Пердомо, пока на свет не появилась Айза, наделенная даром укрощать животных, призывать рыб, усмирять боль и утешать умерших. Ее таинственная сила стала для жителей острова благословением, а поразительная красота — проклятием.Спасая честь Айзы, ее брат убивает сына самого влиятельного человека на острове. Ослепленный горем отец жаждет крови, и семья Пердомо спасается бегством. Им предстоит пересечь океан и обрести новую родину в Венесуэле, в бескрайних степях-льянос.Однако Айзу по-прежнему преследует злой рок, из-за нее вновь гибнут люди, и семья вновь вынуждена бежать.«Айза» — очередная книга цикла «Океан», непредсказуемого и завораживающего, как сама морская стихия. История семьи Пердомо, рассказанная одним из самых популярных в мире испаноязычных авторов, уже покорила сердца миллионов. Теперь омытый штормами мир Альберто Васкеса-Фигероа открывается и для российского читателя.

Альберто Васкес-Фигероа

Проза / Современная русская и зарубежная проза / Современная проза