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Cependant il me vint le problème de la saveur des choses. Et ceux de ce campement-ci fabriquaient des poteries qui étaient belles. Et ceux de cet autre, qui étaient laides. Et je comprenais avec évidence qu'il n'était point de loi formulable pour embellir les poteries. Ni par dépense pour l'apprentissage, ni par concours et honneurs. Et même je remarquais que ceux-là qui travaillaient au nom d'une ambition autre que la qualité de l'objet, et même s'ils consacraient leurs nuits à leur travail, aboutissaient à des objets prétentieux et vulgaires et compliqués. Car en fait, leurs nuits de veille, il les accordaient à leur vénalité ou à leur luxure ou à leur vanité, c'est-à-dire à soi-même, et ils ne s'échangeaient plus en Dieu en s'échangeant contre un objet devenu source de sacrifice et image de Dieu, où les rides et les soupirs et les paupières alourdies et les mains tremblantes d'avoir tant pétri et les satisfactions du soir après le travail et l'usure de la ferveur vont se confondre. Car je ne connais qu'un acte fertile qui est la prière, mais je connais aussi que tout acte est prière s'il est don de soi pour devenir. Tu es comme l'oiseau qui bâtit son nid et le nid est tiède, comme l'abeille qui fait son miel et le miel est doux, comme l'homme qui pétrit son urne par l'amour de l'urne, donc par amour, donc par prière. Crois-tu au poème qui fut écrit pour être vendu? Si le poème est objet de commerce, il n'est plus poème. Si l'urne est objet de concours elle n'est plus urne et image de Dieu. Mais image de ta vanité ou de tes appétits vulgaires.

LXVII


Ils vinrent, ceux-là plus sots encore avec leurs raisons et leurs mobiles et leurs belles argumentations. Mais moi qui sais que le langage désigne mais ne saisit point et que les discours montrent la démarche de la pensée mais ne la contredisent ni ne l'étayent, je riais d'eux.

«Ce général, m'expliquait l'un, n'a pas écouté mes conseils. Je lui ai pourtant montré l'avenir…»

Certes, il se trouve que chez lui ce jour-là le vent des paroles charria des images auxquelles l'avenir daigna ressembler — comme sans doute un autre jour, chez lui encore, le vent des paroles charria des images contraires, car chacun a tout dit. Mais il reste qu'un général qui a disposé ses armées, pesé ses chances, senti le vent, écouté dormir l'ennemi, mesuré le poids du réveil des hommes, si celui-là change ses plans, mute ses capitaines, renverse la marche des armées et improvise ses batailles à cause que d'un passant oisif est sorti pendant cinq minutes un ridicule vent de paroles qui s'ordonnait en syllogismes, alors ce général je le destitue, l'enferme dans un cachot et ne prends point la peine inutilement de le nourrir.

Car j'aime celui-là qui me vient avec des gestes de pétrisseur de pain et qui me dit:

«Je les sens là-bas prêts à céder si tu l'exiges. Mais prêts à s'enhardir si tu uses de la fanfare de ces mots-là. Car ils sont chatouilleux d'oreille. Je les ai entendus dormir et leur sommeil ne m'a point plu. Je les ai vus se réveiller et se nourrir…»

J'aime celui-là qui connaît la danse et qui danse. Car là seulement est la vérité. Car pour séduire il faut épouser. Et il faut épouser pour réussir un meurtre. Tu appuies ton épée contre l'épée et l'acier contre l'acier. Mais as-tu jamais vu celui qui combat, raisonner? Où est le temps pour raisonner? Et le sculpteur? Regarde-les ses doigts dans la glaise qui dansent, car il a donné ce coup de pouce pour corriger la marque de l'index. Pour contredire en apparence, mais en apparence seulement, car le mot seul signifie quelque chose mais il n'est point de contradictions en dehors des mots. La vie n'est ni simple ni complexe, ni claire ni obscure, ni contradictoire ni cohérente. Elle est. Le langage seul l'ordonne ou la complique, l'éclairé ou l'obscurcit, la diversifie ou l'assemble. Et si tu as donné un coup à droite et un coup à gauche il n'en faut point déduire deux vérités contraires mais la vérité une de la rencontre. Et la danse seule épouse la vie.

Ceux-là qui se proposent avec des raisons cohérentes et non avec leur richesse de cœur, et qui discutent pour agir selon la raison, tout d'abord ils n'agiront point, car à leurs syllogismes, plus habile leur opposera des arguments meilleurs, auxquels ayant réfléchi à leur tour ils opposeront de meilleurs arguments encore. Et ainsi d'avocat habile en avocat plus habile, pour l'éternité. Car il n'est point de vérités qui se démontrent sinon celles du passé, d'abord évidentes puisqu'elles sont. Et si tu veux par la raison expliquer pourquoi telle œuvre est grande, tu réussiras. Car tu connais d'avance ce que tu désires démontrer. Mais la création n'est point de ce domaine. Ton comptable, donne-lui des pierres, il ne bâtira point de temple.

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