— Vous êtes vraiment des gamines, a-t-elle râlé en repartant aussi sec pour dissimuler le sourire que la vision de sa sœur et de son amie, se roulant littéralement de rire dans leur salon sinistre, avait fait naître sur ses lèvres.
Par la suite et jusqu’à l’incident du hangar à bateaux, les rares disputes entre Angélique et Sarah se sont réglées avec une imitation de Iago dans Aladdin. « Jafar chui coincé » voulait dire « pardon » ou « c’est pas grave ». Sarah a continué de voir Angélique dès qu’elle n’allait pas à la piscine, malgré les commentaires désapprobateurs de sa belle-mère. Quant à Angélique, elle s’est retenue de dire du mal de Benjamin, même si elle devait partager un peu son amie avec lui.
Aujourd’hui,
Fanny
Après le petit déjeuner, que Lilou avait passé à consulter son portable, Fanny appela Esteban qui préparait sa valise pour son voyage aux États-Unis. Elle discuta ensuite quelques minutes avec Oscar, qui lui raconta avec moult détails une histoire compliquée de sirène en pâte à modeler détruite par une camarade peu sensible. Il avait pleuré, mais comme Mamie lui avait fait un câlin, tout allait bien. Après avoir raccroché à regret, Fanny expliqua à la gérante de l’hôtel qu’elle devait travailler, et celle-ci mit à sa disposition un petit salon au rez-de-chaussée. Les murs étaient tapissés de livres et la pièce avait vue sur la mer. Elle installa son ordinateur face à la fenêtre, ouvrit un document Word et entreprit d’établir une chronologie rapide des événements liés à la disparition de Sarah Leroy. Aujourd’hui, elle bâclait ça, demain, elle allait à l’enterrement, et après avoir réglé l’administratif avec Angélique, retour à Paris illico.
À onze heures et demie, Lilou débarqua en jogging.
— Tu bosses déjà ? râla-t-elle en bâillant. Tu aurais pu m’attendre.
Sans demander l’autorisation, elle se pencha sur l’écran de Fanny et lut par-dessus son épaule. Puis, elle brancha son propre ordinateur portable et s’affala sur le canapé.
— OK, tu veux que je fasse quoi ? soupira-t-elle.
— C’est bon, tu n’es pas obligée de m’aider, je signerai ton papier de stage. Tu n’as qu’à aller te balader en ville.
Lilou fronça les sourcils.
— Comment veux-tu que j’arrive à avoir quinze à mon rapport de stage si je fais rien ? Après, Papa va me sucrer les vacances chez Kim, soit le moment que j’attendais le plus dans cette année de merde.
Fanny se mordit les lèvres. Pourquoi fallait-il qu’Esteban ait trouvé l’unique argument susceptible de motiver Lilou à prendre cette histoire de stage au sérieux ?
— Tu n’as qu’à faire comme tous les stagiaires, le café, marmonna-t-elle.
— Je suis pas ta bonniche, t’as deux mains, tu peux te faire un café toute seule.
— Ça commence bien… Tu verras ce qui se passera en entreprise si tu réponds comme ça à ta cheffe le premier jour.
— T’es pas ma cheffe.
— Techniquement, je suis ta maîtresse de stage, donc tu fais comme tu veux, mais sache que je suis supposée écrire un rapport sur tes performances à ton professeur principal, et j’ai l’intention d’être parfaitement honnête et objective.
Lilou jeta un regard noir à Fanny et partit en claquant la porte. Fanny sourit et se remit au travail. Lilou étant du genre rancunière, Fanny allait pouvoir travailler tranquillement au moins jusqu’au soir.
Cinq minutes plus tard, cependant, la porte s’ouvrit et Lilou réapparut. Elle tenait dans une main un mug de café fumant qu’elle posa sans la moindre délicatesse à côté de l’ordinateur de sa belle-mère.
— Voilà. Maintenant je fais quoi ? Des photocopies ? Le ménage dans les chiottes ?
Fanny fixa quelques secondes la tasse avec stupéfaction, puis elle déclara :
— Retrouve sur Internet les articles qui ont été écrits sur Sarah Leroy, lis-les et fais un résumé des événements tels qu’ils ont été rapportés dans la presse.
Lilou s’enduisit les lèvres de stick à lèvres à la cerise et ouvrit son moteur de recherche.
— J’ai tapé « affaire Sarah Leroy » et il y a plus de neuf millions de résultats, je commence par quoi ?
— Par le premier, répondit Fanny en dissimulant un sourire, et ensuite, tu remontes tout.
Voilà qui devrait suffire à décourager sa belle-fille de se mêler de ce dossier. Lilou bougonna et elle ne releva pas la tête de son écran des deux heures qui suivirent. Fanny se plongea elle-même dans son travail, puis finit par proposer :
— On va manger quelque chose ?
— Des moules-frites ?
— Si tu veux.
Elles enfilèrent leur manteau et, quelques minutes plus tard, Fanny se garait sur le port. Elle ne pouvait s’empêcher de ressentir une multitude d’émotions contradictoires en parcourant les lieux de son enfance. Chaque endroit lui rappelait des souvenirs. Avait-elle vraiment été aussi malheureuse ici qu’elle l’affirmait à Esteban quand elle justifiait son refus de revenir dans son village natal ?
Quand ses moules-frites arrivèrent, Lilou posa son téléphone à côté de son assiette et déclara :
— Tu savais que Sarah Leroy avait perdu sa mère quand elle était petite, au même âge que moi ?
Анна Михайловна Бобылева , Кэтрин Ласки , Лорен Оливер , Мэлэши Уайтэйкер , Поль-Лу Сулитцер , Поль-Лу Сулицер
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