Читаем Désenchantées полностью

— C’est ma petite sœur… Elle a menti comme une arracheuse de dents à notre mère toute notre enfance, elle a beau être très douée, je sais faire la différence. Les gens avec qui tu as grandi, tu les connais vraiment, tu ­comprendras ça quand tu seras grande.

— C’est juste une intuition, alors ?

— Pas seulement, après j’ai repensé à ce chiffre derrière la photo de Sarah, tu te souviens ?

— Oui… « 13-28 », c’est vrai qu’on n’a jamais su expliquer ce truc…

— C’est un timing : treize heures et vingt-huit minutes, c’est le temps qu’a mis Sarah pour traverser la Manche à la nage. C’est Angélique qui l’a noté au dos de la photo, je connais son écriture. Il n’y a qu’une personne qui a pu lui donner cette information, et c’est Sarah.

Lilou resta songeuse quelques instants.

— Admettons… Et Morgane et Jasmine, tu crois qu’elles savent aussi ?

— Probablement… Dans tous les cas, c’est leur secret, leur décision, ce n’est pas à nous de divulguer la vérité.

— Et Éric Chevalier ? Même si c’est le pire connard de l’univers, ça ne te pose pas de problème qu’il soit en prison pour un meurtre qu’il n’a pas commis ?

Fanny serra les mâchoires et un éclat farouche illumina ses yeux bruns.

— Il a pris vingt ans, c’est la peine qu’il aurait encourue s’il avait été jugé pour les atrocités qu’il a commises. En ce qui me concerne, je suis d’accord avec Jasmine.

— J’en déduis que tu ne vas pas faire cet article révélation sur Sarah Leroy ?

— Je ne pense pas.

— Et tu n’auras pas ta promotion ?

— Non, à vrai dire, vu le dernier e-mail de Catherine, je risque même d’être rétrogradée ou virée.

— Mince…

— C’est la vie, répondit Fanny avec philosophie en rallu­mant le contact, et dans la vie, il faut choisir ses combats.

Lilou se mit à rire et Fanny haussa un sourcil.

— Ça t’amuse que je ruine ma carrière ?

— Non, je suis fière de toi. Tu sais, au final, vu qu’on est dans le secret et qu’on protège Sarah, on est un peu des Désenchantées, nous aussi.

Fanny jeta un dernier regard à la mer bleu marine qui s’éloignait dans le rétroviseur.

— Oui, c’est vrai, on peut dire qu’on fait partie des Désenchantées, maintenant. Allez, rentrons à la maison.

*

Aujourd’hui,

Sarah

J’ai les yeux ouverts. Entre ma perte de conscience et ce réveil, une seconde, un claquement de doigts, mille souvenirs. Pourtant, je ne suis plus au même endroit. Toujours, au-dessus de ma tête, ces néons d’hôpital. Je pose les mains sur mon ventre. Effort immense. Rien. Un pansement. Du vide. Douleur indicible. Deux visages au-dessus du mien. Flous. Ils me parlent. Je ne ­comprends rien. Je m’en fous.

Ma voix, rauque, différente.

Is my baby OK?

Trois fois.

Trois fois je demande si tu vas bien, trois fois on me répond quelque chose que je ne comprends pas. Trop long. Trop compliqué. Puis enfin, une réponse se fraye un chemin jusqu’à mon cerveau atrophié :

Yes. Yes, Angélique is OK.

Tu vas bien.

S’ils connaissent ton prénom, même avec cette prononciation atroce, c’est que tu as survécu.

*

Aujourd’hui,

Angélique

Angélique n’aurait jamais pensé revenir au collège-­lycée Victor-Hugo de Saint-Martin un jour. Pourtant, elle se trouvait là, devant les grilles où elle avait passé tant de temps à discuter avec Sarah, puis avec Jasmine et Morgane, à échanger les potins, à partager les cigarettes et les écouteurs des baladeurs ou à espionner les garçons du coin de l’œil.

Elle n’était jamais revenue ici depuis le jour où elle avait décidé de garder Mia et d’arrêter le lycée. Une partie d’elle se demandait parfois ce qu’elle serait devenue si elle avait poursuivi ses études après le bac, comme une adolescente normale qui s’en sort bien à l’école et qui ne serait pas devenue mère à dix-sept ans. Mais elle chassait aussitôt ces pensées malvenues. Aucune étude, aucun succès scolaire ne l’aurait sauvée comme Mia l’avait sauvée. Elle avait trouvé le bonheur, peu importait le chemin qu’elle avait pris pour y arriver.

Toutefois, Angélique savait depuis des années qu’elle avait une dette envers l’adolescente à l’eye-liner dégoulinant qu’elle avait été. Tout ce qui s’était passé ces dernières semaines, la mort de sa mère, sa réconciliation avec Fanny, l’histoire de Sarah qui avait refait surface… Tout cela l’avait convaincue qu’elle ne pouvait pas attendre plus longtemps. C’était une chose de se mentir à soi-même, une autre de trahir l’enfant qu’on a été.

La sonnerie retentit, des ados commençaient à sortir. Moins de clopes et plus de téléphones portables qu’à son époque, mais sans doute les mêmes discussions, les mêmes doutes et la même solitude, parfois. Elle attendit un long moment, les lycéens se dispersèrent en se lançant des « à demain » et des signes de la main.

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