Les magnificences des cйsars sont les illusions йphйmиres d'un jour car tous les savants, comme tous les guerriers, sont appelйs le moment opportun venu aux tribunaux de la justice de mon Pиre qui est au ciel. Un jour, leurs aigles puissants cesseront d'exister sous une poignйe de cendres pitoyables. Leurs sciences se transformeront au souffle des efforts d'autres travailleurs plus dignes de progrиs, leurs lois iniques seront englouties dans l'abоme tйnйbreux de ces siиcles d'impiйtй, car seule une loi existe et survivra aux dйcombres de l'inquiйtude de l'homme - la loi de l'amour, instituй par mon Pиre, dиs le dйbut de la crйation...
Maintenant, retourne chez toi, conscient des responsabilitйs de ta destinйe...
Si la foi restaure dans ton foyer la joie avec le rйtablissement de ta fille, n'oublie pas que cela reprйsente une aggravation de tes devoirs pour ton cњur devant notre Pиre Tout- puissant !...
Le sйnateur voulut parler mais sa voix йtait saisie d'йmotion et de sentiments profonds.
Il voulut se retirer, mais а cet instant, il remarqua que le prophиte de Nazareth se transfigurait, les yeux fixйs au ciel...
Ce lieu devait кtre le sanctuaire de ses mйditations et de ses priиres, au cњur parfumй de la nature, car Publius devina qu'il priait intensйment et remarqua que de copieuses larmes baignaient son visage envahi alors par une douce clartй qui rйvйlait sa beautй sereine et son indйfinissable mйlancolie...
А cet instant, toutefois, une dйlicieuse torpeur paralysa les facultйs d'observation du patricien qui s'apaisa, interdit.
Il devait кtre neuf heures du soir quand le sйnateur sentit qu'il sortait de sa torpeur.
Une lйgиre brise caressait ses cheveux et la lune dйversait ses rayons argentйs sur l'immense et dйlicat miroir des eaux.
Gardant en mйmoire les moindres dйtails de cette minute inoubliable, Publius se sentit humiliй et rabaissй devant la faiblesse dont il avait fait preuve face а cet homme extraordinaire.
Une avalanche d'idйes conflictuelles assaillait son cerveau concernant ces blвmes et ces paroles а jamais gravйes au fond de sa conscience.
Rome n'avait-elle pas aussi ses sorciers ? Il chercha а se remйmorer tous les drames mystйrieux de la citй lointaine avec ses personnages impressionnants et Incomprйhensibles.
Cet homme ne serait-il pas une copie fidиle des mages et des devins qui fascinaient йgalement la sociйtй romaine ?
Devrait-il, pour autant, abandonner les trиs chиres traditions de sa patrie et de sa famille pour devenir un homme humble, frиre de toutes les crйatures ? Du haut de sa vaniteuse supйrioritй, il souriait en lui-mкme tout en examinant l'inanitй de ces exhortations qu'il considйrait mйprisables. Nйanmoins, son cњur envoyait d'autres appels йmouvants а son esprit. Le prophиte n'avait-il pas parlй d'une occasion unique et merveilleuse ? N'avait-il pas promis, avec assurance, la guйrison de sa fillette pour le compte de la foi ardente de Livia ?
Plongй dans ces profondes rйflexion, il ouvrit dйlicatement la porte de la rйsidence et se dirigea anxieux vers la chambre de la malade et, Oh ! doux miracle ! sa fille reposait dans les bras de Livia dans une sйrйnitй absolue.
Une force surhumaine et inconnue avait attйnuй ses atroces souffrances car ses yeux laissaient entrevoir une douce satisfaction infantile qui illuminait son visage rieur. Pleine d'une joie maternelle, Livia lui raconta, alors, qu'а un moment donnй, la petite avait dit ressentir sur son front le contact de mains affectueuses. Puis elle s'йtait assise dans son lit comme si une йnergie mystйrieuse et inattendue avait rendu brusquement а son organisme sa vitalitй. Elle s'йtait alimentйe et contre toutes attentes la fiиvre avait disparu ; elle rйvйlait dйjа un air de convalescente et discutait avec sa tendre mиre avec toute la grвce spontanйe de sa jeunesse.
Une fois son rйcit terminй, la jeune femme dit avec enthousiasme :
- Depuis ton dйpart, Anne et moi avons priй avec ferveur auprиs de notre petite malade, nous avons implorй le prophиte de rйpondre а ton appel, d'entendre nos priиres et, maintenant, voici que notre enfant se rйtablit !... Serait-il, chйri, un plus grand bonheur ?... Oh ! Jйsus doit кtre un йmissaire direct de Jupiter, envoyй en ce monde dans une glorieuse mission d'amour et de joie pour toutes les вmes !...
А cet instant, dans un йlan spontanй et incoercible provoquй par un sentiment de reconnaissance, Anne, qui l'йcoutait йmue, intervint :
Non, Madame !... Jйsus ne vient pas de la part de Jupiter. C'est le Fils de Dieu, son Pиre et notre Pиre qui est aux deux, dont le cњur est toujours plein de bontй et de misйricorde pour tous les кtres comme le Maоtre nous l'enseigne. Louons, donc, le Tout-puissant pour la grвce reзue et remercions Jйsus avec une priиre remplie d'humilitй...