A cette époque, les Romains, sans trop s’embarrasser de leur prétendue société amicale avec les Macchabées, portaient leurs armes victorieuses dans l’Asie Mineure, dans la Syrie et jusqu’au mont Caucase. Les Séleucides n’existaient plus; Tigrane, roi d’Arménie, beau-père de Mithridate, avait conquis une partie de leurs états. Le grand Pompée avait vaincu Tigrane; il venait de réduire Mithridate à se donner la mort; il faisait de la Syrie une province romaine. Les livres des Macchabées ne parlent ni de ce grand homme, ni de Lucullus, ni de Sylla. On n’en sera pas étonné. — Hyrcan, chassé par son frère Aristobule, s’était réfugié chez un chef d’Arabes, nommé Arétas. Jérusalem avait toujours été si peu de chose que ce capitaine de voleurs vint assiéger Aristobule dans cette ville. Pompée passait alors dans la basse Syrie. Aristobule obtint la protection de Scaurus, l’un de ses lieutenants. Scaurus ordonne au Bédouin de lever le siège et de ne plus commettre d’hostilités sur les terres des Romains; car, la Syrie étant incorporée à l’empire, la Palestine l’était aussi. Tel est le seul pacte de société que la république romaine avait pu faire avec la Judée.
Josèphe écrit qu’Aristobule, pour obtenir la protection de Pompée, lui envoya un magnifique présent; Strabon parle de ce présent, qui serait une vigne d’or, mais il l’attribue à Alexandre-Jannée, et non à Aristobule. Quoi qu’il en soit, les deux frères Aristobule et Hyrcan, qui se disputaient la qualité de grand-prêtre, vinrent plaider leur cause devant Pompée pendant sa marche. Il allait prononcer, lorsque Aristobule s’enfuit; ce qui laisserait croire que le cadeau de la vigne d’or n’avait pas réussi à influencer l’arbitre et que le fils cadet de Jeannot eût dès lors plus confiance dans les remparts de la capitale de David.
En effet, Pompée alla mettre, à son tour, le siège devant Jérusalem. On sait que cette ville est dans une excellente situation, au point de vue de la défense; elle pourrait être une des meilleures places de l’Orient entre les mains d’un ingénieur habile; du moins, le temple, qui était la véritable citadelle, pourrait devenir inexpugnable, étant bâti sur la cime d’une montagne escarpée, entourée de précipices. Pompée fut obligé de perdre presque trois mois à préparer et à faire mouvoir ses machines de guerre; mais dès qu’elles purent manœuvrer, il fit brèche à la forteresse et entra. Un fils du dictateur Sylla y monta le premier, et, ce qui rend cette journée plus mémorable encore, c’est que la prise de Jérusalem par les Romains eut lieu sous le consulat de Cicéron (63 av. J.-C). Josèphe dit qu’on tua douze mille Juifs dans le temple; nous le croirions, s’il n’avait pas toujours exagéré. Nous ne pouvons le croire quand il ajoute qu’on y trouva deux mille talents d’argent et que le vainqueur en tira dix mille de la ville: car, enfin, ce temple ayant été pris tant de fois si aisément, tant de fois pillé et saccagé, il était impossible qu’on y gardât deux mille talents d’argent, qui feraient près de douze millions de francs de notre monnaie; et il serait encore plus extravagant de croire qu’on pût taxer un si petit pays, si épuisé et si pauvre, à dix mille talents, près de soixante millions!… C’est à quoi ne pensent pas ceux qui lisent sans examen et qui reproduisent à la légère ces fables imaginées par l’orgueil hébreu. Un homme sensé lève les épaules, quand il voit qu’Alexandre ne put ramasser en Judée que trente talents pour aller combattre Darius, et qu’il voit douze mille talents dans les caisses des Juifs, outre les trois mille censément trouvés dans le tombeau de David.