Читаем La forêt des ombres полностью

Un mirage... Rien d’autre qu’un mirage. Ce vieillard, aux yeux de lignite. La rigidité de son corps. Les muscles atrophiés de ses jambes. Sa main droite luisant sous la lumière du plafonnier. Arthur Doffre...

Un peu sonné, le thanato boutonna son caban jusqu’au cou et ramassa ses valises avant de reprendre sa lente progression. Il sourit, la tête inclinée, piégeant son expression dans le reflet d’un pare-brise. Quatre jours avant le départ ! Une histoire de dingue !

L’enveloppe, dans sa poche !

Il reposa soudain ses valises et déchira précipitamment le papier kraft.

Des photos, des billets. Un, deux, trois... dix, quinze ! Quinze billets de cent euros ! Plus d’un mois de salaire. Il les rempocha aussitôt, mal à l’aise, scrutant autour de lui. Décidément, cette histoire n’avait aucun sens.

« ... Notre séjour tournera autour du mystère des nombres. Parce que toutes les vérités se cachent au cœur des chiffres... » Qu’est-ce que ce charabia voulait dire ?

David jeta un œil aux photos. Sur le papier glacé, un paysage grandiose. Des sommets déchiquetés, une forêt aux troncs noirs. Et un immense chalet, construit autour d’un arbre géant.

David secoua la tête. « Eh, petit ! Sors de tes rêves ! Cette vie, ça peut pas être pour toi ! Métier, maison, famille ! Tu as déjà oublié ? »

Et pourtant, tout ceci était bien réel. En témoignait l’argent, dans sa poche.

Peut-être la chance était-elle enfin venue le percuter, ce matin.

Et cette chance s’appelait Arthur Doffre.

5.

— Qu’est-ce que tu fous, Miller ! Dépêche-toi ! Ça se bouscule au funé ! Encore deux soins à boucler, et il est déjà trois heures !

Madelin, directeur des pompes funèbres Roc Éclair. Un beau vautour, au nez courbé comme un bec, qui avait fait du deuil un commerce fructueux sur le nord parisien.

— Quoi ? Deux autres ? Je vous ai prévenu, je pars dans une heure ! Un problème personnel à régler. J’ai des heures d’avance... et c’était pas prévu !

— Ils choisissent rarement l’heure du départ. Je les veux dans mon bureau, pour ce soir ! Aussi fringants que le jour de leur mariage ! Comprendo ?

— Mais Gisèle pourrait me remplacer ! Elle...

Madelin claqua la porte du laboratoire de thanatopraxie sans se retourner.

« Quel vieux con ! grinça David. Demande-leur de t’y rejoindre, dans ton bureau ! Et organisez-vous une fiesta à trois ! Ça te décoincera un peu ! »

Il arracha son masque de coton et le jeta sur le sol. Sept ans qu’il se démenait pour Roc Éclair, besoin de partir plus tôt, et voilà le remerciement ! À croire qu’il le faisait exprès ! Bientôt, tout finirait par exploser.

Assuré que Kill them all s’était éloigné, il se laissa glisser contre le mur de catelles blanches et se prit le front dans les mains. Depuis ce matin, sa tête était entre ces murs mais son esprit ailleurs, au milieu des arbres, aux confins de l’isolement, dans ce chalet cerné de montagnes et de précipices. Un monde de féerie.

Il entendit un bruit derrière lui. Panoramique oculaire. Rien de grave. Juste une pince Dieffenbach qui chutait, comme ça, déséquilibrée par le pouvoir des morts. Ça se produisait souvent, sans réelle explication. On s’y habituait, à force.

Une fois debout, David lissa ses cheveux vers l’arrière d’un mouvement nerveux. Il se repassait la scène de la BMW en permanence. Jamais il n’avait été confronté à une proposition si violente, si tranchée, et pour tout dire si attrayante.

Jusqu’où cet être de chair et de plastique le connaissait-il ? Qu’avait-il décrypté dans De la part des morts, son thriller ? David se remémorait clairement le physique si particulier du sexagénaire. Chauve, élégant, en dépit de son handicap. Il ne portait pas d’alliance. Qui pouvait bien l’aider à s’habiller chaque matin ? Son chauffeur, aussi âgé que lui ? Comment peut-on vivre avec le seul usage du bras gauche ? Coraco brachial, brachial antérieur, biceps, triceps, carré pronateur, long fléchisseur du pouce... Tout ce qu’il lui restait. Derniers boulons d’une machine désarticulée.

Pupilles qui se rétractent. Le cœur du laboratoire. Scalpels, vidoirs, antiseptiques. Du concret. Trop de concret. Devant lui, le corps d’une jeune femme, étalé sur la table réfrigérante. À peine vingt-cinq ans. Du vomi collé sur son jean, son pull, envahissant la partie gauche de son visage. Bouche grande ouverte, comme si un pavé s’y était engouffré. Les pompiers l’avaient trouvée agrippée au pied de son lit. Sa main droite, crispée, témoignait encore de la violence de sa mort.

Elle s’était mal suicidée. Et personne ne l’avait nettoyée. Ça, c’était son job.

David inspira avec dégoût, les odeurs de produits conservateurs s’infiltrèrent jusque dans ses poumons. N’importe qui aurait gerbé. Comment pouvait-on s’habituer à une puanteur pareille ? Ses doigts effleurèrent le métal bleuâtre, et il grimaça. Parce qu’il se trouvait face à son pire ennemi.

La ressemblance.

Перейти на страницу:

Похожие книги

Ледовый барьер
Ледовый барьер

«…Отчасти на написание "Ледового Барьера" нас вдохновила научная экспедиция, которая имела место в действительности. В 1906-м году адмирал Роберт Е. Пири нашёл в северной части Гренландии самый крупный метеорит в мире, которому дал имя Анигито. Адмирал сумел определить его местонахождение, поскольку эскимосы той области пользовались железными наконечниками для копий холодной ковки, в которых Пири на основании анализа узнал материал метеорита. В конце концов он достал Анигито, с невероятными трудностями погрузив его на корабль. Оказавшаяся на борту масса железа сбила на корабле все компасы. Тем не менее, Пири сумел доставить его в американский Музей естественной истории в Нью-Йорке, где тот до сих пор выставлен в Зале метеоритов. Адмирал подробно изложил эту историю в своей книге "На север по Большому Льду". "Никогда я не получал такого ясного представления о силе гравитации до того, как мне пришлось иметь дело с этой горой железа", — отмечал Пири. Анигито настолько тяжёл, что покоится на шести массивных стальных колоннах, которые пронизывают пол выставочного зала метеоритов, проходят через фундамент и встроены в само скальное основание под зданием музея.

Дуглас Престон , Линкольн Чайлд , Линкольн Чайльд

Детективы / Триллер / Триллеры
Книга Балтиморов
Книга Балтиморов

После «Правды о деле Гарри Квеберта», выдержавшей тираж в несколько миллионов и принесшей автору Гран-при Французской академии и Гонкуровскую премию лицеистов, новый роман тридцатилетнего швейцарца Жоэля Диккера сразу занял верхние строчки в рейтингах продаж. В «Книге Балтиморов» Диккер вновь выводит на сцену героя своего нашумевшего бестселлера — молодого писателя Маркуса Гольдмана. В этой семейной саге с почти детективным сюжетом Маркус расследует тайны близких ему людей. С детства его восхищала богатая и успешная ветвь семейства Гольдманов из Балтимора. Сам он принадлежал к более скромным Гольдманам из Монклера, но подростком каждый год проводил каникулы в доме своего дяди, знаменитого балтиморского адвоката, вместе с двумя кузенами и девушкой, в которую все три мальчика были без памяти влюблены. Будущее виделось им в розовом свете, однако завязка страшной драмы была заложена в их историю с самого начала.

Жоэль Диккер

Детективы / Триллер / Современная русская и зарубежная проза / Прочие Детективы