Читаем La planète des singes полностью

Je prononce son nom, puis le mien, nous désignant alternativement du doigt l’un et l’autre. Elle esquisse le même geste. Mais je la vois changer d’un seul coup de physionomie et elle montre les dents, tandis que j’entends un rire léger derrière moi.

C’est Zira, qui se moque sans méchanceté de mes efforts et sa présence excite toujours la colère de la fille. Elle est accompagnée de Cornélius. Celui-ci s’intéresse à mes tentatives et vient souvent se rendre compte par lui-même des résultats. Aujourd’hui, c’est dans un autre dessein qu’il me cherche. Il a l’air assez surexcité.

« Vous plairait-il d’entreprendre avec moi un petit voyage, Ulysse ?

— Un voyage ?

— Assez loin ; presque aux antipodes. Des archéologues ont découvert là-bas des ruines extrêmement curieuses, si j’en crois les rapports qui nous parviennent. C’est un orang-outan qui dirige les fouilles et on ne peut guère compter sur lui pour interpréter correctement ces vestiges. Il y a là une énigme qui me passionne et qui peut apporter des éléments décisifs pour certaines recherches que j’ai entreprises. L’Académie m’envoie là-bas en mission et je crois que votre présence serait très utile. »

Je ne vois pas en quoi je pourrais l’aider, mais j’accepte avec joie cette occasion de voir d’autres aspects de Soror. Il me conduit dans son bureau pour me donner d’autres détails.

Je suis enchanté de cette diversion, qui est une excuse pour ne pas terminer ma tournée ; car il me reste un prisonnier à aller voir : le professeur Antelle. Il est toujours dans le même état, ce qui rend impossible sa mise en liberté. Grâce à moi, on l’a cependant placé à part, isolé dans une cellule assez confortable. C’est un devoir pénible pour moi de lui rendre visite. Il ne répond à aucune de mes sollicitations et se conduit toujours comme un parfait animal.

II

Nous partîmes une semaine plus tard. Zira nous accompagnait, mais elle devait rentrer après quelques jours pour s’occuper de l’Institut en l’absence de Cornélius. Celui-ci comptait séjourner plus longtemps sur le lieu des fouilles, si celles-ci étaient aussi intéressantes qu’il le prévoyait.

Un avion spécial était mis à notre disposition, un appareil à réaction assez semblable à nos premiers types de ce genre, mais très confortable et comportant un petit salon insonorisé, où l’on pouvait converser sans gêne. C’est là que nous nous retrouvâmes, Zira et moi, peu après le départ. J’étais heureux de ce voyage. J’étais à présent bien acclimaté dans le monde simien. Je n’avais été ni surpris ni effrayé de voir ce gros avion piloté par un singe. Je ne pensais qu’à jouir du paysage et du spectacle impressionnant de Bételgeuse à son lever. Nous avions atteint une altitude d’environ dix mille mètres. L’air était d’une pureté remarquable et l’astre géant se détachait sur l’horizon comme notre soleil observé à travers une lunette. Zira ne se lassait pas de l’admirer.

« Y a-t-il d’aussi belles matinées sur la Terre ? me demanda-t-elle. Est-ce que ton soleil est aussi beau que le nôtre ? »

Je lui répondis qu’il était moins gros et moins rouge, mais qu’il suffisait à nos ambitions. En revanche, notre astre nocturne était plus grand et répandait une lumière pâle plus intense que celui de Soror. Nous nous sentions joyeux comme des écoliers en vacances et je plaisantais avec elle comme avec une amie très chère. Quand Cornélius vint nous rejoindre, au bout d’un moment, je lui en voulus presque de troubler notre tête-à-tête. Il était soucieux. Depuis quelque temps d’ailleurs, il semblait nerveux. Il travaillait énormément, poursuivant des recherches personnelles qui l’absorbaient au point de lui occasionner parfois des moments d’absence totale. Il avait toujours gardé le secret au sujet de ces travaux et je crois que Zira les ignorait comme moi. Je savais seulement qu’ils étaient en rapport avec l’origine du singe et que le savant chimpanzé tendait de plus en plus à s’écarter des théories classiques. Ce matin-là, il m’en dévoila pour la première fois quelques aspects et je ne tardai pas à comprendre pourquoi mon existence d’homme civilisé était si importante pour lui. Il commença par reprendre un sujet mille fois débattu entre nous.

« Vous m’avez bien dit, Ulysse, que, sur votre Terre, les singes sont de véritables animaux ? Que l’homme s’est élevé à un degré de civilisation qui égale le nôtre et qui, sur beaucoup de points, même… ? N’ayez pas peur de me vexer, l’esprit scientifique ignore l’amour-propre.

— … Qui, sur beaucoup de points, le dépasse ; c’est indéniable. Une des meilleures preuves, c’est que je suis ici. Il semble que vous en soyez au point…

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