Читаем La planète des singes полностью

C’est une cité entière que les archéologues ont mise au jour, une ville ensevelie sous les sables d’un désert, dont il ne reste, hélas ! que des ruines. Mais ces ruines, j’en ai la conviction, détiennent un secret prodigieux que je fais le serment de percer. Cela doit être possible pour qui sait observer et réfléchir, ce dont l’orang-outan qui dirige les fouilles ne semble guère capable. Il a accueilli Cornélius avec le respect dû à sa haute situation, mais avec un dédain à peine voilé pour sa jeunesse et pour les idées originales qu’il émet parfois.

Effectuer des recherches à travers des pierres qui s’effritent à chaque geste et du sable qui croule sous nos pas est un travail de bénédictin. Cela fait un mois que nous nous y employons. Zira nous a quittés depuis longtemps, mais Cornélius s’obstine à prolonger son séjour. Il est aussi passionné que moi, persuadé que c’est ici, parmi ces vestiges du passé, que se trouve la solution des grands problèmes qui le tourmentent.

L’étendue de ses connaissances est vraiment étonnante. Il a d’abord tenu à vérifier par lui-même l’ancienneté de la cité. Les singes ont pour cela des procédés comparables aux nôtres, mettant en jeu des notions approfondies de chimie, de physique et de géologie. Sur ce point, le chimpanzé est tombé d’accord avec les savants officiels : la ville est très, très vieille. Elle a beaucoup plus de dix mille ans, c’est-à-dire qu’elle constitue un document unique, tendant à prouver que la civilisation simienne actuelle n’a pas jailli du néant, par miracle.

Il y a eu quelque chose avant l’ère actuelle. Quoi ? Après ce mois d’investigations fiévreuses, nous sommes déçus, car il semble que cette cité préhistorique, elle-même, n’était pas très différente de celles d’aujourd’hui. Nous avons trouvé des ruines de maisons, des traces d’usines, des vestiges prouvant que ces ancêtres possédaient des automobiles et des avions, tout comme les singes d’aujourd’hui. Cela fait remonter les origines de l’esprit très loin dans le passé. Ce n’est pas tout ce que Cornélius attendait, je le sens ; ce n’est pas ce que j’espérais.

Ce matin, Cornélius m’a précédé sur le chantier, où les ouvriers ont mis au jour une maison aux murs épais, faits d’une sorte de béton, qui semble mieux conservée que les autres. L’intérieur est rempli de sable et de débris, qu’ils ont entrepris de passer au crible. Hier encore, ils n’avaient rien trouvé de plus que dans les autres sections : fragments de tuyauterie, d’appareils ménagers, d’ustensiles de cuisine. Je paresse encore un peu sur le seuil de la tente que je partage avec le savant. J’aperçois de ma place l’orang-outan qui donne des ordres au chef d’équipe, un jeune chimpanzé au regard malin. Je ne vois pas Cornélius. Il est dans la fosse avec les ouvriers. Il met souvent la main à la pâte, craignant qu’ils ne fassent quelque bêtise et qu’un élément intéressant ne leur échappe.

Le voici justement qui sort du trou et je ne suis pas long à m’apercevoir qu’il a fait une découverte exceptionnelle. Il tient entre ses deux mains un petit objet que je ne distingue pas. Il a écarté sans ménagement le vieil orang qui tentait de s’en emparer et le dépose sur le sol avec mille précautions. Il regarde dans ma direction et me fait de grands gestes. M’étant approché, je suis frappé par l’altération de ses traits.

« Ulysse, Ulysse ! »

Jamais je ne l’ai vu dans un tel état. Il peut à peine parler. Les ouvriers, qui sont sortis eux aussi de la fosse, font le cercle autour de sa trouvaille et m’empêchent de la voir. Ils se la montrent du doigt et paraissent, eux, simplement amusés. Certains rient franchement. Ce sont presque tous de robustes gorilles. Cornélius les tient à distance.

« Ulysse !

— Qu’y a-t-il donc ? »

Je découvre à mon tour l’objet posé sur le sable, en même temps qu’il murmure d’une voix étranglée :

« Une poupée, Ulysse, une poupée ! »

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