Читаем Le Collier de la Reine - Tome II полностью

Cette femme, que nous avons reconnue et qu’Oliva ne pouvait reconnaître, ne soupçonnait pas qu’on pût la voir. En face de ses fenêtres, jamais fenêtre ne s’était ouverte. L’hôtel de monsieur de Cagliostro n’avait jamais, en dépit des fleurs que Nicole avait trouvées, des oiseaux qu’elle avait vus voler, découvert ses secrets à sa personne, et à part les peintres qui l’avaient restauré, nul vivant ne s’était fait voir à la fenêtre.

Pour expliquer ce phénomène contredit par la prétendue habitation de Cagliostro dans le pavillon, un mot suffira. Le comte avait, pendant la soirée, fait préparer ce logement pour Oliva, comme il l’eût fait disposer pour lui. Il s’était pour ainsi dire menti à lui-même, tant ses ordres avaient été bien exécutés.

La dame à la belle coiffure restait donc ensevelie dans ses pensées; Oliva se figura que cette belle personne, rêvant ainsi, rêvait à ses amours traversées.

Sympathie dans la beauté, sympathie dans la solitude, dans l’âge, dans l’ennui, que de liens pour attacher l’une à l’autre deux âmes qui peut-être se cherchaient, grâce aux combinaisons mystérieuses, irrésistibles et intraduisibles du Destin.

Dès qu’elle eut vu cette solitaire pensive, Oliva n’en put détacher ses yeux.

Il y avait une sorte de pureté morale dans cette attraction de la femme vers la femme. Ces délicatesses sont plus communes qu’on ne croit généralement parmi ces malheureuses créatures dont le corps est devenu l’agent principal dans les fonctions de la vie.

Pauvres exilées du paradis spirituel, elles regrettent les jardins perdus et les anges souriants qui se cachent sous les mystiques ombrages.

Oliva crut voir une sœur de son âme dans la belle recluse. Elle construisit un roman pareil à son roman, se figurant, la naïve fille, qu’on ne pouvait être jolie, élégante, et demeurer perdue rue Saint-Claude sans avoir quelque grave inquiétude au fond de son cœur.

Quand elle eut bien forgé d’airain et de diamant sa fable romanesque, Oliva, comme toutes les natures exceptionnelles, se laissa enlever par sa féerie; elle prit des ailes pour courir dans l’espace au-devant de sa compagne, à qui, dans son impatience, elle eût voulu voir pousser des ailes pareilles aux siennes.

Mais la dame au monument ne bougeait pas, elle semblait sommeiller sur son siège. Deux heures s’étaient écoulées sans qu’elle eût oscillé d’un degré.

Oliva se désespérait. Elle n’eût pas fait pour Adonis ou pour Beausire le quart des avances qu’elle fit pour l’inconnue.

De guerre lasse, et passant de la tendresse à la haine, elle ouvrit et referma dix fois sa croisée; dix fois elle effaroucha les oiseaux dans les feuillages, et fit des gestes télégraphiques tellement compromettants, que le plus obtus des instruments de monsieur de Crosne, s’il eût passé sur le boulevard ou dans le bout de la rue Saint-Claude, n’eût pas manqué de les apercevoir et de s’en préoccuper.

Enfin, Nicole arriva à se persuader que la dame aux belles nattes avait bien vu tous ses gestes, compris tous ses signaux, mais qu’elle les méprisait; qu’elle était vaine ou qu’elle était idiote. Idiote! avec des yeux si fins, si spirituels, avec un pied si mobile, une main si inquiète! Impossible.

Vaine, oui; vaine comme pouvait l’être à cette époque une femme de la grande noblesse envers une bourgeoise.

Oliva, démêlant dans la physionomie de la jeune femme tous les caractères de l’aristocratie, conclut qu’elle était orgueilleuse et impossible à émouvoir.

Elle renonça.

Tournant le dos avec une bouderie charmante, elle se remit au soleil, cette fois le soleil couchant, pour reprendre la société de ses fleurs, complaisantes compagnes qui, nobles aussi, élégantes aussi, poudrées aussi, coquettes aussi comme les plus grandes dames, se laissent cependant toucher, respirer, et rendent en parfum, en fraîcheur et en frissonnants contacts, le baiser d’ami ou le baiser d’amour.

Nicole ne réfléchissait pas que cette prétendue orgueilleuse était Jeanne de Valois, comtesse de La Motte, qui, depuis la veille, cherchait une idée.

Que cette idée avait pour but d’empêcher Marie-Antoinette et le cardinal de Rohan de se voir.

Qu’un intérêt plus grand encore exigeait que le cardinal, tout en ne voyant plus la reine dans le particulier, crût fermement qu’il la voyait toujours et que, par conséquent, il se contentât de cette vision et cessât de réclamer la vue réelle.

Idées graves, bien légitimes excuses de cette préoccupation d’une jeune femme à ne pas remuer la tête pendant deux mortelles heures.

Si Nicole eût su tout cela, elle ne se fût pas, de colère, réfugiée au milieu de ses fleurs.

Et elle n’eût pas, en s’y plaçant, chassé hors du balcon un pot de fraxinelles qui alla tomber dans la rue déserte avec un fracas épouvantable.

Oliva, effrayée, regarda vite quel dégât elle avait pu causer.

La dame préoccupée se réveilla au bruit, vit le pot sur le pavé, remonta de l’effet à la cause, c’est-à-dire que ses yeux remontèrent du pavé de la rue à la terrasse de l’hôtel.

Et elle vit Oliva.

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