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Son vieux valet Lormet le Dolois, trop âgé à présent pour les longs voyages, ne l’accompagnait pas. Un gaillard plus jeune, mais formé à pareille école, Gillet de Nelle, emplissait le même rôle et se chargeait des mêmes besognes. Ce fut Gillet qui rabattit sur Monseigneur Robert un certain Maciot l’Allemant, sergent d’armes sans emploi, mais prêt à tout faire, et qui était originaire d’Arras. Ce Maciot avait bien connu l’évêque Thierry d’Hirson. Or l’évêque Thierry, en ses dernières années, avait une amie de cœur et de couche, une certaine Jeanne de Divion, de vingt bonnes années plus jeune que lui, et qui se plaignait assez haut maintenant des ennuis que lui causait la comtesse Mahaut, depuis la mort de l’évêque. Si Monseigneur voulait entendre cette dame de Divion…

Robert d’Artois constata, une fois de plus, qu’on s’instruit beaucoup auprès des gens de petite réputation. Certes, les mains du sergent Maciot n’étaient pas celles auxquelles on eût pu confier le plus sûrement sa bourse ; mais l’homme savait de fort intéressantes choses. Vêtu de neuf, et remonté d’un cheval bien gras, il fut expédié vers le nord.

Rentré à Paris au mois de mars, Robert se frottait les mains et affirmait que du nouveau allait se produire en Artois. Il parlait d’actes royaux dérobés jadis par l’évêque Thierry, pour le compte de Mahaut. Une femme au visage encapuchonné passa plusieurs fois la porte de son cabinet, et il eut avec elle de longues conférences secrètes. On le voyait de semaine en semaine plus confiant, plus joyeux, et annonçant avec plus de certitude la prochaine confusion de ses ennemis.

Au mois d’avril, la cour d’Angleterre, cédant aux recommandations du pape, envoyait de nouveau à Paris l’évêque Orleton, avec une suite de soixante-douze personnes, seigneurs, prélats, docteurs, clercs et valets, pour négocier la formule d’hommage. C’était un vrai traité qu’on se disposait à conclure.

Les affaires d’Angleterre n’étaient pas au plus haut. Lord Mortimer n’avait guère accru son prestige en se faisant conférer la pairie et en obligeant le Parlement à siéger sous la menace de ses troupes. Il avait dû réprimer une révolte armée des barons unis autour d’Henri de Lancastre au Tors-Col, et il éprouvait de grandes difficultés à gouverner.

Au début de mai mourut le brave Gaucher de Châtillon, à l’entrée de sa quatre-vingtième année. Il était né sous Saint Louis, et avait exercé vingt-sept ans la charge de connétable. Sa rude voix avait souvent changé le sort des batailles et prévalu dans les conseils royaux.

Le 26 mai, le jeune roi Édouard III, ayant dû emprunter, comme l’avait fait son père, cinq mille livres aux banquiers lombards afin de couvrir les frais de son voyage, s’embarquait à Douvres pour venir prêter hommage à son cousin de France.

Ni sa mère Isabelle, ni Lord Mortimer ne l’accompagnaient, craignant trop, s’ils s’étaient absentés, que le pouvoir ne passât en d’autres mains. Un souverain de seize ans, confié à la surveillance de deux évêques, allait donc affronter la plus impressionnante cour du monde.

Car l’Angleterre était faible, divisée, et la France était tout. Il n’était pas de nation plus puissante que celle-ci dans l’univers chrétien. Ce royaume prospère, nombreux en hommes, riche d’industries, comblé par l’agriculture, mené par une administration encore compétente et par une noblesse encore active, semblait le plus enviable ; et le roi trouvé qui le gouvernait depuis un an, ne récoltant que des succès, était bien le plus envié de tous les rois de la terre.

V

LE GÉANT AUX MIROIRS

Il voulait se montrer mais également se voir. Il voulait que sa belle épouse, la comtesse, que ses trois fils, Jean, Jacques, et Robert, dont l’aîné, à huit ans, promettait déjà de devenir grand et fort, il voulait que ses écuyers, les valets de sa chambre et tout son hôtel qu’il avait amené avec lui de Paris, le contemplassent bien dans l’éclat de sa splendeur ; mais il désirait aussi s’apparaître et s’admirer.

À ce faire, il avait demandé tous les miroirs trouvables dans les bagages de son escorte, miroirs d’argent poli, ronds comme des assiettes, miroirs à manche, miroirs de vitre sur feuille d’étain, coupés à l’octogone dans un cadre de vermeil, et il les avait fait suspendre, les uns auprès des autres, à la tapisserie de la chambre qu’il occupait.[7] L’évêque d’Amiens serait bien content lorsqu’il verrait son beau tapis à images lacéré par les clous qu’on avait plantés dedans ! Mais qu’importait ! Un prince de France pouvait se permettre cela. Monseigneur Robert d’Artois, seigneur de Conches et comte de Beaumont-le-Roger, souhaitait se contempler dans son costume de pair qu’il portait pour la première fois.

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