Читаем Mon traître полностью

Juste avant minuit, le mercredi 31 août 1994, nous sommes allés dans la rue. Tyrone avait mis une chemise blanche et une cravate de laine verte. Sheila avait passé la soirée à rouler ses bigoudis. C’était comme si nous sortions. La rue était pleine de familles silencieuses. Des gamins étaient juchés sur les murs. De vieilles femmes conversaient à voix tranquille. Un blindé, un deuxième, encore un. Pas une pierre, pas un cri. Même les hélicoptères nous semblaient de trop.

— Minuit ! a crié Tyrone en levant le poing.

— IRA ! IRA ! IRA, a scandé la foule.

Les voitures klaxonnaient. Des jeunes frappaient dans leurs mains en chantant. Une dame s’est signée au passage d’un prêtre qui observait cette humanité comme s’il venait enfin de retrouver sa trace.

J’ai regardé Tyrone. Il avait dans les yeux comme un sourire inquiet. Il m’a dit que ce serait encore long, mais que nous venions de faire le plus dur. En remontant, nous avons croisé des visages d’hommes. Certains étaient fermés. La trêve avait été décidée par le Conseil de l’Armée républicaine irlandaise. Et par lui seul. Contrairement aux règles militaires, aucune convention n’avait été réunie par la direction pour voter la cessation du combat. Les hommes du rang ont appris la nouvelle à l’extérieur de leurs unités. Les politiciens de Sinn Féin étaient persuadés que le temps était venu de renoncer aux armes. L’IRA avait décidé de faire vite. Tant pis pour les procédures. Ces visages fermés disaient le scepticisme. Pendant des jours, Tyrone a rencontré beaucoup de ces combattants. Certains étaient tentés par la dissidence. Il les a ramenés les uns après les autres, rappelant que la trêve était un ordre et qu’ils étaient soldats.


Le lendemain, Belfast républicain s’est drapé des couleurs nationales. Nous avions pris place dans une cavalcade de voitures qui descendait Falls Road en klaxonnant. Sheila conduisait. Tyrone avait le corps passé par la portière ouverte. Il appelait les uns, les autres, saluait les trottoirs sa casquette à la main. J’étais derrière, mon drapeau à la fenêtre. Je chantais La Marseillaise en riant. Devant nous, il y avait un camion de charbonnier. Tyrone est sorti de la voiture en me demandant de le suivre. Il a rejoint le camion. Il a sauté sur la plate-forme en bois, aidé par les gamins qui s’y trouvaient. Je suis monté à mon tour, agrippant les mains qui se tendaient. Tyrone était debout, poings sur les hanches. Il semblait contempler sa ville, son peuple, son combat de simples gens. J’étais à côté de lui. J’agitais mon grand drapeau à la manière d’un ouvreur de parade. Les voitures se suivaient lentement. Chaque trottoir, chaque porte ouverte, chaque fenêtre s’agitait en main de joie. A côté de moi, un jeune homme regardait mon ami. Il m’a demandé si c’était Tyrone Meehan, le grand, le fameux, le vieux prisonnier. J’ai dit que oui. Que c’était bien lui. Le jeune républicain m’a tendu la main. Je l’ai prise. Nous nous sommes félicités d’être là, avec lui, en ce jour du début de tout.




Interrogatoire de Tyrone Meehan par l'IRA

(17 décembre 2006)






— Tu nous trahis depuis quand, Tyrone ?

— Depuis 1981.

— Quand, exactement ?

— Fin novembre, quand j’ai été repris.

— Tu avais peur de retourner en taule ?

— Jétais fatigué.

— Parle plus fort.

— J’étais fatigué.

— Fatigué de quoi ?

(Silence)

— On n’oblige personne à se battre, Tyrone. Tu n’étais pas obligé de trahir pour laisser tomber.

(Silence)

— Pourquoi as-tu trahi ?

— La pression.

— Les Britanniques t’ont fait chanter ?

(Silence)

— Ils te tenaient, Tyrone ?

— Quelque chose comme ça.

— Explique.

— Je ne peux pas.

— Je te le conseille.

— Quels renseignements as-tu livrés, Meehan ?

— Vous, je ne vous connais pas.

— Tu réponds à la question.

— Tu veux que je te repose la question moi-même, Tyrone ?

— Oui. Je préfère que ce soit toi, Mike.

— Qu’est-ce qu’ils te demandaient, les Britanniques ?

— Des choses sur Sinn Féin.

— Des choses ?

— Si le parti souhaitait vraiment la paix, des trucs comme ça.

— Tu jouais le porte-parole de Sinn Féin ? C’est ça ?

(Silence)

— Pourquoi Sinn Féin ?

— Je ne comprends pas la question.

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