Читаем Oms en série полностью

Des oms sortaient précautionneusement deux corps des chars immobiles.

— Les pilotes en ont pris un sacré coup, dit une voix. On fit cercle autour des accidentés. Pâles, haletants, ils firent entendre par monosyllabes qu’ils ne se sentaient pas capables de reprendre les commandes. On les porta à l’écart pour leur masser les côtes. Deux autres les remplacèrent.

— Attention, dit l’Édile. Doucement, cette fois! Écartez bien les deux chars l’un de l’autre.


Deux heures plus tard, de longues colonnes d’émigrants défilaient devant une falaise de viande noire bordant la route.

4

Au bout d’une journée interminable et coupée de haltes aux relais fortifiés, les oms débouchèrent de la jungle. Ils cheminèrent au flanc d’une montagne rase où, seuls, des blocs de craie montaient une garde séculaire, piqués droit comme des sentinelles au-dessus des vallées. Une brise fraîche caressa les échines fatiguées.

Très loin, par-dessus des stades et des stades de brousse, on revit les méandres de la rivière et l’océan miroitant. Mais l’horizon était bouché par les molles collines du Pot d’Écume.

Peu à peu, le sol fut moins déclive. On passa quelques chauves mamelons avant d’atteindre une étendue balayée par les vents d’ouest. L’interminable colonne serpenta longtemps encore parmi les collines, les entonnoirs et les vallées sèches entaillant le plateau. L’avance obstinée des oms mettait en fuite des troupeaux de cervuses, qui disparaissaient en quelques bonds dans la pierraille des canyons.

Très haut, des pics altiers dominaient comme un décor de théâtre ce paysage de fin du monde. Le bruit des chars courait par vagues sourdes, ondulait en sonores interférences avant de se perdre aux lointains. Et ce concerto monotone berçait la marche des oms.

Soudain, l’espace vibra d’une musique plus stridente. On crut d’abord qu’un char s’enrouait dans un effort imprévu. Mais peu à peu, tous les visages se renversèrent vers les nuages. Le bruit venait de là-haut.

Alors, la foule médusée vit apparaître une sphère lourde et ronde, comme un gigantesque poing menaçant, prêt à s’abattre sur le destin des oms libres.

Venue de l’ouest, la sphère se rapprocha dangereusement du plateau. Elle parut courir à la pointe des herbes, ricocher le long d’un tremplin naturel, reprit de la hauteur et tournoya longuement au-dessus des émigrants.

Après le premier moment de stupeur, un flottement disloqua les rangs. Des porteurs jetèrent leur charge et coururent au hasard. Certains roulèrent au fond d’avens traîtreusement ouverts sous leurs pas. Mais courir ne servait à rien. Où aller? L’immense troupeau parut le comprendre et s’immobilisa bientôt, à peine éparpillé, nu et sans défense sur le dos calcaire du plateau.

La sphère se rapprocha de nouveau et, prenant la colonne désorganisée en enfilade, vola tout le long d’elle. Sur son passage, la frayeur jetait les oms sur le sol. De proche en proche, ils parurent fauchés par une onde de choc.

Hébétés, ils gardèrent la pose longtemps après que la fusée eut disparu vers l’ouest après avoir effectué un grand détour au-dessus des jungles.

Le bruit s’apaisant, on entendit les recommandations diffusées par les chars où les pilotes clamaient les ordres de l’Édile.

— Vous ne vous êtes pas trompés, oms, c’était bien une sphère draag. Faites confiance à votre Édile et reprenez la marche. La nuit va tomber bientôt et la ville est proche. La ville où tout est prévu pour votre sauvegarde!

Chacun obéit et la colonne s’étira de nouveau vers son but. L’événement avait délié les langues nouées par la fatigue. Un bourdonnement montait de la foule.

— Une sphère draag!

— Pourquoi n’a-t-on pas tiré dessus?

— Il paraît que l’Édile l’a défendu!

— J’comprends pas.

— Mais alors, si les draags savent que l’Exode a réussi, le…

— Tais-toi donc! L’Édile sait ce qu’il fait. Et puis après tout, la ville est proche. Ça fait des jours qu’elle contient déjà des cent mille et des cent mille oms. C’est peut-être une vraie forteresse!

— Il paraît que…

— On m’a dit que…

— Un vrai paradis, bien sûr!

— C’est bien mieux qu’au vieux port!

Peu à peu, le crépuscule descendit, noya les horizons, cerna le champ visuel de chacun à ses plus proches voisins.

Quand la nuit fut totale, on buta sur un barrage de chars surgis de l’obscurité, avant de comprendre qu’on était arrivé aux portes de la cité promise.

Beaucoup furent déçus. Ils s’attendaient à voir des murs rassurants, des lumières, des banderoles, des tours hérissées de lance-rayons.

Or, il n’y avait rien. Rien que la nuit où des lampes isolées se balançaient çà et là. Rien que des voix monotones lançant des ordres blasés:

— Stop! Suivez votre char de section à gauche. À gauche, j’ai dit!

— La section suivante, avancez tout droit!

— Non, non, par rangs de trois personnes à la fois; avançons, avançons!

Et puis des appels:

— Douce!

— Rouquin!

— Allons, pas de désordre!

— Suivez vos chars!

— On n’y voit rien!

— Blonde!

— Ne cherchez pas vos omes, vous les retrouverez dans la ville. Personne ne peut perdre personne, ici!.. Allons!

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