3) De n’avoir pas rempli à mon egard les devoirs commandés par la politesse en ne me saluant pas, lorsque je me suis retiré de chez vous.
J’ai l’honneur d’être, monsieur, votre très-humble et obeissant serviteur.
Permettez-moi de redresser quelques points où vous me paraissez dans l’erreur. Je ne me souviens pas de vous avoir entendu citer quelque chose de l’article en question. Ce qui m’a porté à m’expliquer, peut-être, avec trop de chaleur, c’est la remarque que vous m’avez faite de ce que j’avais eu tort la veille de prendre au cœur les paroles de Senkovsky.
Je vous ai répondu: „Я не сержусь на Сенковского; но мне нельзя не досадовать, когда порядочные люди повторяют нелепости свиней и мерзавцев.“ Vous assimiler à des свиньи и мерзавцы est certes une absurdité, qui n’a pu ni m’entrer dans la tête, ni même m’échapper dans toute la pétulence d’une dispute.
A ma grande surprise, vous m’avez répliqué que vous preniez entièrement pour votre compte l’article injurieux de S.[enkovsky] et notamment l’expression „обманывать публику“.
J’étais d’autant moins préparé à une pareille assertation venant de votre part,
J’eus l’honneur alors de vous faire observer, que ce que vous veniez d’avancer devenait une toute autre question et je me tus. En vous quittant je vous dis que je ne pouvais laisser cela ainsi. Cela peut être regardé comme une provocation, mais non comme une menace. Car enfin, je suis obligé de le répéter: je puis ne pas donner suite à des paroles d’un Senkovsky, mais je ne puis les mépriser dès qu’un homme comme vous les prend sur soi. En conséquence je chargeais m-r Sobolévsky de vous prier de ma part de vouloir bien vous rétracter purement et simplement, ou bien de m’accorder la réparation d’usage. La preuve combien ce dernier parti me répugnait, c’est que j’ai dit nommément à Sobolévsky, que je n’exigeai pas d’excuse. Je suis fâché que m-r Sobolévsky a mis dans tout cela sa négligence ordinaire.
Quant à l’impolitesse que j’ai eue de ne pas vous saluer, lorsque vous m’avez quitté, je vous prie de croire que c’était une distraction tout-à-fait involontaire et dont je vous demande excuse de tout mon cœur.
J’ai l’honneur d’être, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.
En réponse au message dont vous avez chargé m-r Sobolévsky et qui m’est parvenu presque en même temps que votre lettre, j’ai l’honneur de vous faire part qu’il m’est impossible de rétracter rien de ce que j’ai dit, croyant avoir suffisamment établi dans ma première lettre la raison qui m’a fait agir comme je l’ai fait. Pour la satisfaction d’usage dont vous me parlez, je suis à vos ordres.
Pour ce qui me regarde personnellement, en vous priant de vouloir bien vous rappeler des trois points insertionnés dans ma lettre, par lesquels je me considérais comme offensé par vous, j’ai l’honneur de vous répondre, que pour ce qui est du troisième, je me trouve entièrement satisfait.
Quant au premier, l’assurance que vous me donnez pour ce qu’il n’était point dans votre pensée de m’assimilier aux […] et… etc. ne me suffit pas. Tous mes souvenirs et tous mes raisonnements me font persister à trouver que vos paroles expriment une offense, quand même votre pensée y était étrangère. Sans cela je me saurais justifier à mes propres yeux la solidarité acceptée par moi de l’article injurieux: mouvement, qui de ma part n’a point été irréfléchi ou emporté, mais parfaitement calme. J’aurais donc à demander des excuses explicites sur des manières, qui m’ont justement fait soupçonner une injure dont, à mon grand plaisir, vous faites le désaveu quant au fond.
Je reconnais avec vous, monsieur, qu’il y a eu dans le second point erreur de ma part et que j’ai vu des menaces dans les expressions qui ne pouvaient être regardées que comme une provocation (texte de votre lettre). C’est ainsi que je les accepte; mais si ce n’était point le sens que vous vouliez leur donner, j’aurais aussi à attendre des excuses pour ce fâcheux mésentendu; car je crois qu’une provocation énoncée, si ce n’est intentionnée et laissée sans suites, équivaut à une injure.
J’ai l’honneur d’être, monsieur, votre très-humble et très obéissant serviteur