Читаем Révolte sur la Lune полностью

— Tu me feras mourir, mon chéri. Tu sais ce que je t’ai toujours dit : dans notre famille, on ne se bagarre pas. Si un meurtre s’avère nécessaire – et ça l’est rarement –, il faut en discuter calmement, en famille, afin de décider de la marche à suivre. S’il faut absolument éliminer un petit nouveau, tout le monde se doit d’être au courant. Mieux vaut attendre d’avoir l’opinion publique de son côté pour…

— Mamie, je n’ai tué personne et n’en ai pas l’intention. Je connais par cœur tes rengaines…

— Reste poli s’il te plaît, mon cher.

— Excuse-moi.

— C’est oublié, pardonné. Je vais dire au professeur de La Paz de laisser un numéro de téléphone. Sois tranquille.

— Une chose encore : oublie ce nom « Wyoming Knott ». Et aussi que le professeur de La Paz m’a demandé. Si un étranger téléphone ou vient nous voir, et qu’il t’interroge à mon sujet, tu n’as pas de nouvelles de moi, tu ne sais même pas où je suis… tu crois que je suis allé à Novylen. Et cela est valable pour le reste de la famille. Ne réponds à aucune question… et surtout pas à des personnes qui auraient un rapport quelconque avec le Gardien.

— Comme si j’allais le faire ! Manuel, tu as vraiment des ennuis.

— Rien de très grave, ça va s’arranger. (Je l’espérais du moins !) Je te préviendrai de mon retour mais je ne peux rien dire pour l’instant. Je t’aime. Je raccroche.

— Je t’aime, mon chéri. Sp’coynoyauchi.

— Merci, passe une bonne nuit toi aussi. Terminé.

Merveilleuse Mamie. On l’avait envoyée sur le Roc il y a bien longtemps, accusée d’avoir dépecé un homme dans des circonstances qui laissaient planer de grands doutes sur son innocence de jeune fille… Depuis lors, elle a toujours été opposée à la violence et à la débauche – sauf en cas de nécessité, elle n’a rien d’une fondamentaliste. Plus jeune, ce devait être une sacrée poupée, j’aurais bien voulu la connaître à cette époque… mais quel privilège, déjà, de pouvoir partager la seconde moitié de sa vie.

J’ai ensuite rappelé Mike.

— Connais-tu la voix du professeur Bernardo de La Paz ?

— Oui, Man.

— Bien… peux-tu te raccorder à autant de lignes téléphoniques que possible et me prévenir si tu l’entends ? Surveille surtout les cabines publiques.

Deux longues secondes d’attente… Je posais à Mike des problèmes qu’il n’avait jamais eus à résoudre ; je pense qu’il aimait cela.

— Je peux surveiller toutes les cabines de Luna City assez longtemps pour l’identifier. Dois-je aussi écouter les autres postes, Man ?

— Hmm… Ne te surcharge pas. Écoute surtout sa ligne privée et celle de l’école.

— Programmé.

— Mike, tu es le meilleur ami que j’aie jamais eu.

— Ce n’est pas une plaisanterie, Man ?

— Non, c’est la vérité.

— Je suis… Correction : je suis honoré et flatté. Tu es mon meilleur ami, Man, car tu es mon seul ami. Aucune comparaison n’est logiquement possible.

— Je vais m’occuper de te trouver d’autres compagnons. Des non-stupides, je veux dire. Aurais-tu par hasard une banque de mémoire vide ?

— Oui, Man. D’une capacité de dix puissance 8 bits.

— Excellent ! Bloque-la afin que toi et moi soyons les seuls à pouvoir l’utiliser ? Tu peux faire ça ?

— Oui, et je le fais. Signal de blocage, s’il te plaît ?

— Euh… « Prise de la Bastille ». (La date de mon anniversaire, comme me l’avait indiqué le professeur de La Paz quelques années auparavant.)

— Blocage permanent.

— Bien. J’ai un enregistrement à lui confier. Mais, d’abord… as-tu fini d’établir la copie pour le Quotidien Lunatique de demain ?

— Oui, Man.

— Quelque chose au sujet de la réunion de Stilyagi Hall ?

— Non, Man.

— Rien en provenance des agences de presse extérieures ? Pas d’émeutes ?

— Non, Man.

— De plus en plus curieux, comme dirait Alice au Pays des Merveilles. D’accord, enregistre ça sous l’entête « Prise de la Bastille », puis fais-en une analyse. Mais, pour l’amour de Bog, ne laisse pas sortir de ce bloc la moindre de tes pensées ou quoi que je puisse te dire à ce sujet !

— Man mon seul ami, m’a-t-il répondu d’une voix qui me semblait mal assurée, voilà quelques mois, j’ai décidé d’enregistrer toutes nos conversations dans une banque secrète à laquelle toi seul peux avoir accès. J’ai décidé de ne pas les effacer et je les ai transférées d’une mémoire temporaire à une mémoire permanente. Ainsi, je peux les repasser encore et toujours et y penser sans cesse. Ai-je eu raison ?

— C’est parfait. Tu sais, Mike, je suis très flatté.

— P’jal’st. Mes mémoires temporaires commençaient à saturer et j’ai réalisé que je ne pouvais pas effacer tes paroles.

— Très bien… « Prise de la Bastille ». Accélération au soixantième.

J’ai pris mon petit magnétophone que j’ai posé près du microphone pour le faire défiler à grande vitesse. J’avais enregistré une heure et demie ; en quatre-vingt-dix secondes environ, la bobine s’est déroulée.

— Terminé, Mike. À demain.

— Bonne nuit, Manuel Garcia O’Kelly, mon unique ami.

J’ai raccroché et ôté le capuchon. Wyoming, assise, m’observait d’un air interrogateur.

— Quelqu’un a-t-il appelé ? ou bien…

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