Читаем Révolte sur la Lune полностью

— Rien de bien grave. Chère Wyoh, est-ce que Sidris propose de faire de cette enfant une camarade à part entière ? Qu’elle lui fasse bien comprendre que nous sommes engagés dans une révolution… avec tout le sang, les émeutes et peut-être même les désastres que cela implique.

— C’est exactement ce qu’elle veut faire.

— Mais, ma chère dame, nous sommes assez vieux pour savoir ce que nous faisons quand nous risquons nos vies. Pour cela, il faut avoir déjà ressenti l’étreinte de la mort. Les enfants sont rarement capables de comprendre que la mort les frappera personnellement. L’âge adulte peut même se définir comme celui auquel une personne apprend qu’elle devra mourir et accepte cette fatalité sans protester.

— Prof, ai-je interrompu, dans ce cas je connais beaucoup d’enfants déjà adultes. Je parie à sept contre deux qu’il y en a au Parti.

— Ne pariez pas là-dessus, imbécile. Il y a de fortes chances pour qu’au moins la moitié d’entre eux n’aient pas les qualités requises. Peut-être nous en apercevrons-nous à nos dépens à la fin de notre folle entreprise.

— Prof, Mike, Mannie, a appelé Wyoh. Sidris est certaine que cette enfant conviendra. Et c’est aussi ce que je pense.

— Man ? a demandé Mike.

— Arrangeons-nous pour que Prof puisse la rencontrer et se forger une opinion par lui-même. C’est surtout sa façon désespérée de se battre qui m’a conquis. Sans cela, je n’aurais pas proposé de la recruter.

Nous avons ajourné la question et je n’en ai plus entendu parler. Peu après, Hazel est venue dîner à la maison, invitée par Sidris. Elle n’a pas fait mine de me reconnaître et je n’ai rien dit non plus, mais j’ai appris longtemps après qu’elle m’avait bien reconnu, pas seulement à cause de mon bras gauche mais parce que la grande blonde de Hong-Kong m’avait embrassé en ajustant mon chapeau. Hazel avait percé à jour le déguisement de Wyoming, reconnaissant ce que Wyoh n’était jamais parvenue à dissimuler : sa voix.

Mais Hazel avait un vrai poids sur la langue ; si elle a jamais supposé que j’appartenais à la conspiration, elle n’en a jamais parlé.

L’histoire de son enfance expliquait son attitude, si l’on peut prétendre qu’un caractère bien trempé découle d’un vécu difficile. On l’avait déportée encore bébé avec ses parents, exactement comme Wyoh ; elle avait perdu son père dans un accident alors qu’il effectuait son temps de travaux forcés et sa mère avait accusé l’Autorité de ne pas se préoccuper des problèmes de sécurité pour les colons bagnards. Hazel avait cinq ans lorsque sa mère était morte. Depuis, elle vivait dans l’orphelinat où nous l’avions trouvée. Elle ne savait pas non plus pourquoi on avait déporté ses parents – peut-être pour subversion, puisque apparemment ils avaient été tous les deux condamnés. Quoi qu’il en soit, sa mère lui avait légué sa haine envers l’Autorité et le Gardien.

La famille qui tenait Le Berceau lui avait permis de rester ; Hazel changeait les couches et faisait la vaisselle depuis qu’elle en avait la force. Elle avait appris toute seule à lire et connaissait son alphabet sans pour autant savoir écrire. Ses notions de mathématiques ne dépassaient pas cette habileté à compter l’argent que les enfants ont dans la peau.

Son départ du jardin d’enfants ne s’était pas passé en douceur, la propriétaire et ses maris prétendant qu’Hazel leur devait plusieurs années d’entretien. Hazel avait résolu le problème en filant, abandonnant derrière elle ses pauvres effets personnels. Mamie était suffisamment furieuse pour demander à toute la famille de déclencher une émeute qui aurait pu facilement dégénérer, mais je l’ai prise à part pour lui rappeler qu’en ma qualité de chef de cellule, je ne voulais absolument pas que notre famille se désigne à l’attention du public ; je lui ai donné du liquide, lui assurant que le Parti paierait pour habiller Hazel. Mamie a refusé l’argent, a dispersé le conseil de famille et emmené Hazel en ville où elle a fait de véritables folies – selon ses propres critères – afin de l’équiper de nouveau.

C’est ainsi que nous avons adopté Hazel. J’ai cru comprendre qu’aujourd’hui, l’adoption d’un enfant requiert quantité de formalités ; à cette époque, c’était aussi facile que s’il s’était agi d’un petit chat.

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