Читаем Révolte sur la Lune полностью

— Je ne me rappelle pas que cela soit jamais arrivé. Peut-être a-t-on fait passer cela pour des accidents. Les nouveaux débarqués sont sujets aux accidents – Luna est, disons, un endroit qui s’y prête. On dit ici que si un nouveau débarqué survit la première année, il vivra à jamais. D’ailleurs, personne ne lui vend de contrat d’assurance avant la fin de cette période. (J’ai regardé l’heure.) Stu, avez-vous dîné ?

— Non, j’allais vous proposer de m’accompagner à mon hôtel. La cuisine y est bonne. Il s’appelle l’Hôtel d’Orléans.

J’ai failli faire une moue de dégoût. J’y avais déjeuné, une fois…

— Pourquoi ne viendrez-vous pas plutôt à la maison faire connaissance avec ma famille ? Ils doivent être en train de manger de la soupe ou quelque chose comme ça.

— Je ne veux pas m’imposer.

— Mais non, voyons. Attendez-moi une minute pendant que je téléphone.

Mamie m’a répondu :

— Manuel ! Quelle surprise, chéri ! La capsule est arrivée depuis des heures ; je pensais que tu reviendrais demain ou même plus tard.

— Je me suis livré à une petite beuverie avec de vieux compagnons, Mimi. Si j’arrive à retrouver le chemin, je vais rentrer maintenant… accompagné.

— Entendu, chéri. Le dîner sera servi dans vingt minutes ; essaye de ne pas arriver trop en retard.

— Tu ne veux pas savoir si mon vieux compagnon est un mâle ou une femelle ?

— Te connaissant, j’imagine que c’est une femme. Laisse-moi vérifier ça par moi-même.

— Oui, tu me connais bien, Mamie. Dis aux filles de se faire belles, je ne voudrais pas que mon invitée les éclipse !

— Ne tarde pas trop, le dîner serait gâché. Au revoir, chéri. Je t’aime.

— Je t’aime, Mamie.

Au bout d’un instant, j’ai tapé « MYCROFTXXX ».

— Mike, je voudrais que tu me cherches un nom. Un nom terrien, celui d’un passager du Popov : Stuart René La Joie. Stuart avec un U et le nom de famille peut être classé soit à L, soit à J.

Je n’ai pas attendu longtemps ; Mike a trouvé Stu dans presque tous les bottins mondains : dans le Who’s Who, le Dunn & Bradstreet, l’Almanach du Gotha, dans la liste des abonnés du Times de Londres, pour ne citer que les principaux. Exilé français, royaliste, six autres noms en plus de ceux qu’il utilisait, trois diplômes universitaires, y compris une licence de droit à la Sorbonne, ascendance noble aussi bien en France qu’en Écosse, divorcé (sans enfant) de l’honorable Pamela du machin de la chose, sang bleu. Un de ces vers de Terre qui ne daignent pas adresser la parole à un Lunatique descendant de bagnard… sauf que Stu, lui, parlait à tout le monde.

Au bout de deux minutes j’ai demandé à Mike de constituer un dossier complet, sans oublier toutes ses relations.

— Mike, il se pourrait bien que ce soit notre homme.

— Peut-être, Man.

— Faut que j’y aille, au revoir.

J’étais pensif en retrouvant mon invité. Un an auparavant, au cours d’un bavardage bien arrosé dans la chambre d’hôtel, Mike nous avait promis une chance sur sept sous certaines conditions impératives. L’une d’elles était d’obtenir de l’aide en provenance de Terra elle-même.

Malgré nos « jets de rochers », Mike savait comme nous tous que la puissante Terra, avec ses onze milliards d’habitants et d’inépuisables ressources, ne pouvait être battue par trois millions de gens qui n’avaient rien, à part des tas de cailloux et un lieu élevé pour les lancer.

Mike avait établi des comparaisons avec le XVIIIe siècle, quand les colonies britanniques d’Amérique avaient fait sécession, ainsi qu’avec le XXe siècle, où de nombreuses colonies s’étaient séparées de leurs empires. Il en avait conclu que jamais une colonie n’avait obtenu son indépendance par le seul usage de la force. Non : dans tous les cas considérés, l’État impérialiste, occupé ailleurs, s’était fatigué et avait abandonné la partie sans avoir utilisé toute sa puissance.

Pendant des mois, nous avions suffisamment accru notre propre puissance pour être en mesure d’affronter les milices du Gardien, si nous le souhaitions. Une fois notre catapulte prête (et elle allait l’être maintenant d’un moment à l’autre) nous ne serions pas désarmés. Mais nous avions besoin d’un « climat favorable » sur Terra. Et, pour cela, il nous fallait de l’aide sur place.

Prof pensait que ce ne serait pas difficile ; à tort. Ses amis terriens étaient pratiquement tous morts, et moi je n’en avais jamais eu, à part quelques professeurs. Nous avons mené une enquête dans les cellules : « Quelles grosses légumes terriennes connaissez-vous ? », et nous avons toujours eu la même réponse : « Vous plaisantez ? » Programme zéro…

Prof consultait les listes de passagers des vaisseaux dans l’espoir d’y trouver une connaissance ; il avait aussi épluché les extraits lunaires de la presse terrienne dans l’espoir d’y trouver des personnalités terriennes qu’il pourrait approcher en se recommandant de ses anciennes relations. Moi, je n’avais même pas essayé : parmi le peu de personnes que j’avais vues sur Terra, il n’y avait aucune grosse légume.

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