Читаем Révolte sur la Lune полностью

La nouvelle catapulte a été essayée avec un chargement lancé dans l’océan Indien par 35° Est et 60° Sud, un emplacement où ne vivaient que des poissons. L’adresse de Mike l’a empli de fierté : il avait réussi à se faufiler dans une zone où les radars de guidage et de détection n’étaient pas en service, et il s’était contenté d’une seule impulsion pour mettre en plein dans le mille. Les journaux terrestres ont parlé d’une météorite géante tombée dans le subantarctique, repérée par le contrôleur de navigation spatiale de Capetown qui avait déterminé le point d’impact avec une précision à la hauteur des espoirs de Mike.

En enregistrant les dépêches de l’agence Reuters, Mike m’a appelé :

— Je t’avais dit que j’avais bien visé ! Ah ! quel plouf magnifique !

Plus tard, nous avons aussi eu les comptes rendus des stations océanographiques qui avaient enregistré sur leurs sismographes les effets de l’onde de choc – des résultats particulièrement éloquents.

C’était le seul projectile que nous avions préparé (pas facile d’acheter de l’acier), sans quoi Mike nous aurait demandé de recommencer.

Les bonnets rouges ont fait leur réapparition sur la tête des stilyagi et de leurs petites amies ; Simon Jester en a placé un entre ses cornes. Le Bon Marché[6] en a distribué en cadeau ! Alvarez a eu une pénible conversation avec le Gardien au cours de laquelle ce dernier a demandé à son flic en chef s’il pensait qu’il fallait agir à chaque fois que des gamins changeaient de mode. Alvarez avait-il perdu l’esprit ?

Au début de mai, j’ai croisé Slim Lemke sur le boulevard de ceinture ; il portait un bonnet phrygien. Il paraissait content de me voir, je l’ai remercié de m’avoir payé rapidement (il l’avait fait trois jours après le procès de Stu, apportant à Sidris les trente dollars de Hong-Kong qui correspondaient à l’amende de toute la troupe) et devant un verre, je lui ai demandé pourquoi tous les jeunes portaient des bonnets rouges. Se couvrir la tête était une coutume des vers de Terre, niet ?

Il a hésité puis m’a dit qu’il s’agissait d’une sorte de signe de reconnaissance maçonnique, comme pour les Élans. J’ai changé de sujet. J’ai appris que son nom complet était Moses Lemke Stone, membre de la famille des Stone. Nous étions parents ; cela m’a fait plaisir tout en me surprenant. Il arrive pourtant que les meilleures familles, comme les Stone, ne parviennent pas toujours à marier la totalité de leurs fils. J’avais moi-même eu de la chance : à son âge, j’aurais très bien pu errer comme lui dans les corridors. Je lui ai parlé de nos liens de parenté du côté maternel.

Il est devenu alors plus amical et m’a brusquement dit :

— Cousin Manuel, as-tu jamais pensé que nous devrions nous-mêmes élire notre propre Gardien ?

Je lui ai répondu que non, je n’y avais jamais pensé ; c’était l’Autorité qui le nommait et je supposais qu’il en serait toujours ainsi.

— Pourquoi devons-nous avoir une Autorité ?

Je lui ai demandé qui lui mettait toutes ces idées dans le crâne ; il m’a affirmé avec force que personne ne le faisait, qu’il se contentait de réfléchir, un point c’est tout… n’avait-il pas le droit de réfléchir ?

De retour chez moi, j’ai eu envie de demander à Mike s’il pouvait vérifier le pseudo de ce garçon, de voir s’il appartenait au Parti. Mais c’était inutile, et guère loyal envers Slim.

Le 3 mai 2076, soixante et onze mâles prénommés Simon ont été pris dans une rafle, interrogés puis relâchés. Aucun journal n’a relaté l’affaire. Tout le monde en a pourtant entendu parler ; nous avions alors atteint les cellules commençant par la lettre J, et je vous assure que douze mille personnes peuvent divulguer une nouvelle beaucoup plus rapidement que je ne l’aurais imaginé. Nous avons lourdement insisté sur le fait que l’un de ces mâles dangereux n’avait que quatre ans – un beau mensonge qui s’est néanmoins révélé d’une grande efficacité.

Stu La Joie est resté chez nous pendant tout le mois de février et celui de mars ; il n’est pas retourné sur Terra avant le début d’avril. Il faisait toujours valider son billet pour le voyage suivant, et ainsi de suite. Quand je lui ai fait remarquer qu’il devait approcher de la limite implicite au-delà de laquelle allaient se produire d’irréversibles modifications physiologiques, il s’est contenté de sourire et m’a répondu de ne pas m’en faire ; il a quand même pris ses dispositions pour s’entraîner à la centrifugeuse.

Même en avril, Stu n’avait aucune envie de nous quitter ; les adieux avec toutes mes femmes et avec Wyoh ont été entrecoupés de baisers, de sanglots et de promesses de retour prochain. Mais il nous quittait parce qu’il avait du travail à faire ; il était devenu membre du Parti.

Je n’avais pas voulu intervenir dans la décision de recruter Stu car je craignais d’être partial. Wyoh, Prof et Mike ont été unanimes pour prendre le risque ; c’est avec bonheur que j’ai accepté leur jugement.

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