Vous me pardonnez, Madame! vous me rendez vos bont 'es! Non! je ne me suis pas tromp'e, vous tenez de la divinit'e la plupart de ce que vous ^etes, et ces gr^aces, et cette bont'e, tout cela est d’une origine c'eleste. Eh! Suis-je digne d’un de vos regards, de ces regards qui font tant de bien `a celui sur qui vous daignez les arr^eter. Oh! si vous aviez vu, combien je souffrais en voulant com-battre, subjuguer une passion qui est devenu pour mon ^ame ce que les esprits vitaux sont pour le corps de l’homme, — ins'eparable de mon existence; j’ai cru perdre `a jamais les douces illusions de ce bonheur, qui, sans ^etre r'eel, n’en est pas moins cher pour moi puisqu’il me repr'esente l’image d’un bonheur plus parfait, plus palpable, auquel je n’ose attenter que dans mes r^eves.
Il me semble pourtant que vous paraissez quelquefois vous d 'efier de la v'eridit'e de mon amour. H'elas! est-ce ma faute si cette figure sans expression, si ces yeux sans feu ne vous disent que faiblement ce que j’'eprouve? Tout le feu, qui manque `a mes yeux et qui n’anime point mes traits, est concentr'e dans mon coeur: c’est l`a que vous avez votre autel, o`u vous ^etes sans cesse ador'ee, encens'ee. Non! une flamme si forte ne pourra pas mourir m^eme avec mon ^etre, elle me survivra, elle suivra au del`a du tombeau et sera pour mon ^ame le plus bel apanage d’immortalit'e. Je vous y reverrai. Madame! vous serez l’ange de bont'e qui me fera participer `a la f'elicit'e 'eternelle: sans vous je n’y trouverais qu’un 'etat de langueur infinissable.
Et vous n ’^etes plus f^ach'ee, Madame? est-ce bien sinc`erement que vous m’avez pardonn'e? et vous ne rebuterez plus un coeur qui ne palpite que pour vous? Oh! si je n’avais pas de t'emoins, j’aurais embrass'e derni`erement cent mille fois votre Hector, qui m’a attir'e de votre part ces paroles douces qui sont `a jamais grav'ees dans ma m'emoire; c’est lui qui a contribu'e `a vous persuader de m^eme en partie de tout l’amour dont je br^ule pour vous. Jugez donc, Madame, si je dois le ch'erir, si je peux regarder d’un oeil indiff'erent un ^etre qui est en quelque sorte mon bienfaiteur? Et quel pr'ecieux fardeau que je trouvais en lui? je portais dans mes bras une cr'eature que vous affectionnez, Madame! et tout ce qui vous est cher, l’est encore davantage pour moi, car toutes vos affections se communiquent `a mon ^ame, s’y augmentent et s’y multiplient! Quel sympathie pour moi que celle de sympathiser avec votre coeur. Si j’avais pu as-pirer `a un retour… mais je n’ose pas y pr'etendre: ce serait un bonheur qui ne m’est point destin'e en partage. Je me contente donc de mes propres sentiments, je me contente aussi de la seule pr'erogative qui me soit accord'ee, celle de vous l’oser dire.
Que tous vos mots d ’amiti'e ou de bont'e r'epandent une douce chaleur dans toute mon existence.
Je vais de nouveau, Madame, mettre `a vos pieds l’hommage de mon coeur, qui est, ainsi que toute mon existence