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Chapitre 17

L’oncle d’Arthur : — M. James Milligan

Si j’avais été à la place de Mattia, j’aurais peut-être eu autant d’imagination que lui, mais dans ma position les libertés de pensée qu’il se permettait m’étaient interdites.

C’était de mon père qu’il s’agissait.

Pour Mattia, c’était de master Driscoll, comme il disait.

Et quand mon esprit voulait s’élancer à la suite de Mattia, je le retenais aussitôt d’une main que je m’efforçais d’affermir.

De master Driscoll Mattia pouvait penser tout ce qui lui passait par la tête ; pour lui, master Driscoll était un étranger à qui il ne devait rien.

À mon père, au contraire, je devais le respect.

Assurément il y avait des choses étranges dans ma situation, mais je n’avais pas la liberté de les examiner au même point de vue que Mattia.

Le doute était permis à Mattia.

À moi, il était défendu.

Et quand Mattia voulait me faire part de ses doutes, il était de mon devoir de lui imposer silence.

C’était ce que j’essayais, mais Mattia avait sa tête, et je ne parvenais pas toujours à triompher de son obstination.

— Cogne si tu veux, disait-il en se fâchant, mais écoute.

Et alors il me fallait quand même écouter ses questions :

— Pourquoi Allen, Ned, Annie et Kate avaient-ils les cheveux blonds, tandis que les miens n’étaient pas blonds ?

— Pourquoi tout le monde, dans la famille Driscoll, à l’exception de Kate, qui ne savait pas ce qu’elle faisait, me témoignait-il de mauvais sentiments, comme si j’avais été un chien galeux ?

— Comment, des gens qui n’étaient pas riches habillaient-ils leurs enfants avec des dentelles ?

À tous ces pourquoi, à tous ces comment, je n’avais qu’une bonne réponse qui était elle-même une interrogation.

— Pourquoi la famille Driscoll m’aurait-elle cherché si je n’étais pas son enfant ? Pourquoi aurait-elle donné de l’argent à Barberin et à Greth and Galley ?

À cela Mattia était obligé de répondre qu’il ne pouvait pas répondre. Mais cependant il ne se déclarait pas vaincu.

— Parce que je ne peux pas répondre à ta question, disait-il, cela ne prouve pas que j’aie tort dans toutes celles que je te pose sans que tu y répondes toi-même. Un autre à ma place trouverait très-bien pourquoi master Driscoll t’a fait chercher et dans quel but il a dépensé de l’argent. Moi je ne le trouve pas parce que je ne suis pas malin, et parce que je ne connais rien à rien.

— Ne dis donc pas cela : tu es plein de malice au contraire.

— Si je l’étais, je t’expliquerais tout de suite ce que je ne peux pas t’expliquer, mais ce que je sens : non, tu n’es pas l’enfant de la famille Driscoll, tu ne l’es pas, tu ne peux pas l’être ; cela sera reconnu plus tard, certainement ; seulement par ton obstination à ne pas vouloir ouvrir les yeux tu retardes ce moment. Je comprends que ce que tu appelles le respect envers ta famille te retienne, mais il ne devrait pas te paralyser complètement.

— Mais que veux-tu que je fasse ?

— Je veux que nous retournions en France.

— C’est impossible.

— Parce que le devoir te retient auprès de ta famille ; mais si cette famille n’est pas la tienne, qui te retient ?

Des discussions de cette nature ne pouvaient aboutir qu’à un résultat, qui était de me rendre plus malheureux que je ne l’avais jamais été.

Quoi de plus de terrible que le doute !

Et malgré que je ne voulusse pas douter, je doutais.

Ce père était-il mon père ? cette mère était-elle ma mère ? cette famille était-elle la mienne ?

Cela était horrible à avouer, j’étais moins tourmenté, moins malheureux, lorsque j’étais seul.

Qui m’eût dit, lorsque je pleurais tristement, parce que je n’avais pas de famille, que je pleurerais désespérément parce que j’en aurais une ?

D’où me viendrait la lumière ? qui m’éclairerait ? Comment saurais-je jamais la vérité ?

Je restais devant ces questions, accablé de mon impuissance, et je me disais que je me frapperais inutilement et à jamais, en pleine nuit noire, la tête contre un mur dans lequel il n’y avait pas d’issue.

Et cependant il fallait chanter, jouer des airs de danse, et rire en faisant des grimaces, quand j’avais le cœur si profondément triste.

Les dimanches étaient mes meilleurs jours, parce que le dimanche on ne fait pas de musique dans les rues de Londres, et je pouvais alors librement m’abandonner à ma tristesse, en me promenant avec Mattia et Capi ; comme je ressemblais peu alors à l’enfant que j’étais quelques mois auparavant !

Un de ces dimanches, comme je me préparais à sortir avec Mattia, mon père me retint à la maison, en me disant qu’il aurait besoin de moi dans la journée, et il envoya Mattia se promener tout seul : mon grand-père n’était pas descendu ; ma mère était sortie avec Kate et Annie, et mes frères étaient à courir les rues ; il ne restait donc à la maison que mon père et moi.

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