Consulat
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Napol'eon
« L’Empereur, contre l’opinion commune, celle que j’avais entretenue moi-m^eme, est loin d’avoir une forte constitution; ses membres sont gros, mais sa fibre est tr`es-molle; avec une poitrine fort large, il est toujours enrhum'e; son corps est soumis aux plus l'eg`eres inf
J’ai vu l’Empereur, au Conseil d’Etat, traiter les affaires huit ou neuf heures de suite, et lever la s'eance avec les id'ees aussi nettes, la t^ete aussi fra^iche qu’au commencement. Je l’ai vu lire `a Sainte-H'el`ene, dix ou douze heures de suite, des sujets abstraits, sans en para^itre nullement fatigu'e.
Il a support'e sans 'ebranlement les plus fortes secousses qu’un homme puisse 'eprouver ici-bas. A son retour de Moscou ou de Leipsick (Leipsig), apr`es l’expos'e du d'esastre au Conseil d’Etat, il dit: « On a r'epandu dans Paris que les cheveux m’en avaient blanchis; mais vous voyez qu’il n’en est rien (montrant son front de la main), et j’esp`ere que je saurai en supporter bien d’autres. » Mais toutes ces prodigieuses 'epreuves ne se sont accomplies, pour ainsi dire, qu’en d'eception de son physique, qui ne se montre jamais moins susceptible que quand l’activit'e de l’esprit est plus grande.
Napol'eon mange tr`es irr'eguli`erement, et en g'en'eral fort peu. Il r'ep`ete souvent que l’on peut souffrir de trop manger, jamais d’avoir mang'e trop peu. Il est homme `a rester vingt-quatre heures sans manger, seulement pour se donner de l’app'etit le lendemain. Il boit bien moins encore; un seul verre de vin de Mad`ere ou de Champagne suffit pour r'eveiller ses forces ou lui donner de la ga^it'e. Il dort fort peu; et `a des heures tr`es irr'eguli`eres, se relevant au premier r'eveil pour lire ou pour travailler, et se recouchant pour redormir encore.
L’Empereur ne croit pas `a la m'edecine, il ne prend jamais aucun rem`ede. Il s’est cr'e'e un traitement particulier: son grand secret avait 'et'e depuis longtemps, disait-il, de commettre un exc`es en sens oppos'e `a son habitude pr'esente; c’est ce qu’il appelle l’'equilibre de la nature: s’il 'etait depuis quelque temps en repos, il faisait subitement une course de soixante milles, une chasse de tout un jour.
S’il se trouvait au contraire surpris au milieu de tr`es-grandes fatigues, il se condamnait `a vingt-quatre heures de repos absolu. Cette secousse impr'evue lui causait infailliblement une crise int'erieure qui amenait aussit^ot le r'esultat d'esir'e: cela, disait-il, ne lui avait jamais manqu'e.
L’Empereur a la lymphe trop 'epaisse, son sang circule difficilement. La nature l’a dou'e de deux avantages bien pr'ecieux, dit-il: l’un est de s’endormir d`es qu’il a besoin de repos, `a quelque heure et en quelque lieu que ce soit; l’autre, de ne pouvoir commettre d’exc`es nuisible dans son boire ou dans son manger: « Si je d'epassais le moindrement mon « tirant d’eau », disait-il, mon estomac rendrait aussit^ot le surplus ». Il vomit tr`es-facilement, une simple toux d’irritation suffit pour lui faire rendre son d^iner. »
Fontainebleau – Фонтенбло, город в пригороде Парижа, где c XI–XII вв. находится многократно перестраивавшаяся королевская резиденция. С 1804 г. временами использовался Наполеоном как императорская резиденция.
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La seconde Restauration