A peine, jusque-l`a, s’'etaient-ils entrevus dans ces c'er'emonies officielles. Talleyrand fut, selon l’expression d’Albert Vandal, « l’entremetteur ». Ce n’est que le 2 brumaire (24 octobre) que, sur ses instances, Bonaparte se r'esolut `a faire `a Siey`es la visite qu’il avait lui-m^eme attendue en vain rue Chantereine. Talleyrand, et pr`es de lui Fouch'e; type d’hommes aussi indispensables au complot dans la seconde ligne de l’action que Bonaparte et Siey`es le sont dans la premi`ere. Car on a beau dire – apr`es coup – que tout cela devait se faire, il y fallait beaucoup de concours. Encore le 18 brumaire faillit-il ne pas r'eussir. On s’est 'etonn'e que, plus tard, Napol'eon ait gard'e pr`es de lui l’ancien oratorien et l’ancien 'ev^eque. On les a appel'es ses mauvais g'enies. Il aurait fallu d’abord qu’au moment d'ecisif et le plus difficile, il e^ut pu se passer d’eux et de bien d’autres. Mais rien n’e^ut 'et'e possible sans Siey`es, Fouch'e et Talleyrand, – « ce brelan de pr^etres,» – qui lui apportaient, avec leur habilet'e et leur intelligence, la caution d’hommes aussi int'eress'es les uns que les autres `a emp^echer une contre-r'evolution. Voil`a un coup d’Etat qui se pr'esente dans les conditions les plus favorables. Il est organis'e de l’int'erieur par Siey`es et Ducos, deux des chefs du pouvoir qu’il s’agit de renverser. Des deux assembl'ees, l’une, le Conseil des Anciens, est complice, l’autre, le Conseil des Cinq-Cents, est manipul'ee par Lucien Bonaparte qui, tout jeune d'eput'e qu’il est, s’est remu'e pour ^etre 'elu pr'esident. Enfin l’opinion publique est sympathique. M^eme au faubourg Saint-Antoine, il n’y a pas de soul`evement `a craindre. Et pourtant il s’en faudra de rien que ce coup d’Etat ne soit un 'echec.
Ce sera un peu la faute de Bonaparte. La partie gagn'ee, c’est pourtant lui qui aura le mieux calcul'e. Il s’est obstin'e jusqu’au bout `a donner `a l’op'eration un caract`ere civil et aussi peu militaire que possible, `a ne pas employer la violence, `a recourir `a la force tout juste quand il n’a pu faire autrement. Il a refus'e, la veille de Saint-Cloud, d’'ecouter Siey`es et Fouch'e, qui 'etaient d’avis, pour mettre toutes les chances de son c^ot'e, de proc'eder `a des arrestations pr'eventives parmi les d'eput'es connus d’avance comme des adversaires ardents. A ce refus, peut-^etre imprudent, il gagnera de rendre son r'egime accessible aux plus purs r'evolutionnaires et de ne pas s’entendre reprocher un crime du 18 brumaire, comme son neveu le crime du 2 d'ecembre. Il a jou'e la difficult'e mais, au fond, il a eu raison parce qu’au-del`a de la « journ'ee », qui s’ajoute `a la longue s'erie des « journ'ees » r'evolutionnaires, il a obtenu un des r'esultats auxquels il pensait. Il ne sera pas dans la d'ependance des casernes comme s’il avait d^u son 'el'evation qu’`a l’arm'ee.
(…) La Constitution de l’an VIII fut promulgu'ee le 14 d'ecembre 1799, un peu plus d’un mois apr`es la journ'ee de Saint-Cloud. Les trois Consuls entr`erent en fonctions le 25 d'ecembre. Les cinquante commissaires les install`erent et, avec eux, c’'etait la Convention, continu'ee par les Assembl'ees du Directoire, qui transmettait officiellement et solennellement le pouvoir au g'en'eral Bonaparte et `a ses deux coll`egues. Il y avait transition, non rupture. Et la proclamation qui fut lanc'ee aux Francais pour annoncer que les Consuls d'efinitifs succ'edaient aux Consuls provisoires 'etait sinc`ere lorsqu’elle disait: «Citoyens, la R'evolution est fix'ee aux principes qui l’ont commenc'ee. » En ajoutant: « Elle est finie », on s’abandonnait seulement `a une illusion g'en'erale et qui n’'etait m^eme pas neuve. Combien de fois n’avait-on pas dit qu’elle avait atteint son terme? Louis XVI lui-m^eme l’avait cru quand le pr'esident de la Constituante le lui avait dit. »
brumaire – брюмер, месяц туманов. Второй месяц республиканского календаря (22 октября – 20 ноября), введенного во Франции во время Французской революции декретом Национального конвента (5 октября 1793 г.), применялся с 6 октября 1793 г. (15 вандемьера II года Республики). Отсчет лет начинался с 22 сентября 1792 г., первого дня Первой республики во Франции. Календарь действовал до 1 января 1806 г., когда был упразднен Наполеоном.
Ligue
Fronde
Cardinal