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Avec un profond soupir de satisfaction, il s'étira, décrocha le téléphone et dit à la fille du standard :

« Raph Dun à l'appareil. Vous allez d'abord me faire monter du café, des œufs, de la marmelade, le complet, quoi, ce que vous voudrez… Ensuite, ne me lâchez plus. J'ai cinquante coups de fil à donner. Appelez d'abord Victoria 25–03. Puis… »

Il demanda toute une liste de numéros, tandis qu'il échafaudait son plan d'attaque. Quand il eut fini, il ne put s'empêcher, par habitude, de demander à la standardiste :

« Au fait, vous êtes blonde ou brune? Non, non! Laissez-moi deviner… Rien qu'à la voix, je peux le savoir… Parlez encore… Ça y est… j'y suis! Vous êtes blond cendré!

— Vous avez perdu! répondit l'employée en pouffant de rire. Je suis chauve.

— Fantastique! C'est ça que je préfère! A quelle heure quittez-vous votre travail?

— A dix heures, ce soir.

— Douze heures de présence? Mais ce sont des négriers dans cet hôtel! Vous avez une chambre ici? »

Elle le coupa :

« Je vous passe votre premier numéro. »

Le visage de Dun devint attentif. Il défit le nœud de sa cravate. S'il jouait assez serré, les trente millions étaient dans sa poche. Au bout de cinq sonneries, il eut son correspondant :

« Allô? Mike? C'est Raph Dun… Écoute bien et réveille-toi!

— …

— Je m'en fous! Est-ce que je dors, moi? »

Voilà qu'il parlait comme Kallenberg, maintenant! Il observa un silence, pour être certain que Mike avait bien repris ses esprits, et enchaîna :

« J'ai un truc… fantastique! Incroyable… Le scoop du siècle… Dis-moi d'abord merci de t'appeler… Tu vas pouvoir te payer deux ans de vacances! »


Édouard Fouillet était directeur du Ritz de Paris depuis près de six mois, après avoir veillé pendant huit ans aux destinées de celui de Londres. En quittant l'Angleterre, il avait poussé un soupir de soulagement, heureux d'abandonner le vieux palace trop calme, ses salons immenses et ennuyeux, sa clientèle de vieillards distingués. A Paris, enfin, il allait vivre! Durant son séjour à Londres, il s'était toujours arrangé pour venir passer ses week-ends à Enghien, où il était né, et où vivaient sa mère et son beau-père. Effectivement, l'hôtel de la place Vendôme était infiniment plus animé que celui de Picadilly : beaucoup plus de passages, des hôtes vraiment royaux, un restaurant excellent et, avant le dîner, très souvent, des cocktails brillants.

Seulement, cette incessante activité n'allait pas sans un certain laisser-aller, un certain coulage. L'argenterie fichait le camp dans les poubelles, où venaient la récupérer des extras indélicats, le linge disparaissait et il avait dû mettre à la porte un sommelier fameux, trop porté, sur ses vieux jours, à goûter, avant les clients, les nectars qu'il devait leur servir, bourgognes rares de la Romanée-Conti, bordeaux précieux à cinquante mille anciens francs la bouteille. Ces petits riens additionnés au fil des jours, finissaient par s'accumuler en pertes sèches considérables. Il y avait aussi les clients trop puissants pour qu'on exige d'eux qu'ils règlent leur note comptant — ce qui ne se serait jamais passé à Londres — et qui, d'un séjour à l'autre, oubliaient purement leur dette, choqués que l'on puisse leur réclamer de s'en acquitter. Il y avait surtout les exigences de plus en plus grandes de la nouvelle vague de fils, à papa internationaux. Les uns rentraient froidement chez eux en emmenant six filles dans leur chambre, ce qui avait un effet déplorable sur le personnel. Les autres organisaient des surprises-parties qui se prolongeaient jusqu'à l'aube. Il avait même surpris l'existence d'un tripot clandestin dans l'un des appartements les plus luxueux. Évidemment, tous ces gens, fous ou pas, laissaient beaucoup d'argent dans la caisse, mais qu'il était loin le temps des grands-ducs! Fouillet était évidemment trop jeune pour l'avoir connu, mais il en avait abondamment entendu parler par ses confrères. Désormais, et surtout depuis la guerre, n'importe qui pouvait avoir de l'argent. On voyait arriver des types ahurissants, marchands de bœufs enrichis, vulgaires et sans manières, s'empiffrant de caviar à l'heure où les gens civilisés boivent du thé. Fouillet, qui avait gravi un par un les échelons de l'école hôtelière, savait de toute éternité que le client a toujours raison. Tout de même, il y avait un certain seuil à ne pas franchir, au-delà duquel tout sombrait dans la démence. Il se tourna vers son chef de réception qui attendait, sans mot dire, que son supérieur hiérarchique ait pris une décision.

« Franchement, Albert, quel est votre avis?

— Je vous l'ai déjà donné, monsieur. Il me semble difficile d'aller contre les désirs de M. Satrapoulos, qui est l'un de nos meilleurs clients, et dont tout le personnel n'a qu'à se féliciter.

— Combien nous laisse-t-il?

— Il loue à l'année le grand appartement du haut, y séjourne deux ou trois fois par an et inonde les employés de pourboires.

— Tout de même, la réputation de la maison…

— Qui le saura?

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