L’objectif de Jean sans Peur, duc de Bourgogne, petit-fils de Jean le Bon, est de devenir le roi de France ! Après son forfait, il ne fait guère honneur à son surnom acquis à la croisade de Nicopolis contre les Turcs en 1392 : il s’enfuit à Amiens. Il en revient en février 1408 pour faire une entrée triomphale à Paris où les bourgeois, les commerçants lui sont infiniment reconnaissants de les avoir débarrassés de l’énorme pression fiscale que faisait peser sur eux Louis d’Orléans. Le 7 octobre 1409, Jean sans Peur – le Bourguignon – décide de traquer et d’éliminer tous les partisans de Louis d’Orléans et de son fils – des Armagnacs - dans l’administration.
Il commence par Jean de Montagu, maître absolu des finances royales au temps de Louis d’Orléans. Emprisonné, torturé, Jean de Montagu est emmené sur une charrette le 17 octobre 1409 sur le lieu de son supplice aux Halles. La foule le couvre de quolibets, de crachats, l’accuse de sorcellerie, de la folie du roi, de détournement des impôts. Avant de s’agenouiller près du billot, il ouvre sa chemise pour montrer sa poitrine marquée des traces de la torture qu’il a subie. Geste dérisoire qui précède une décollation en un seul coup de hache. Sa tête est mise au bout d’une pique, et son cadavre suspendu au gibet de Montfaucon. L’épuration va se poursuivre.
Jean sans Peur sait qu’il ne peut accéder au trône parce que viennent avant lui la reine Isabeau de Bavière, et l’oncle paternel du roi, le duc Jean de Berry – tout occupé à ses
Le Bourguignon détient alors tout pouvoir sur le gouvernement – qui comporte encore beaucoup d’Armagnacs, peu enclins à obéir ! En l’année 1410, le voilà presque roi de France ! Mais les amis et les parents de Louis d’Orléans, l’assassiné, ne l’entendent pas de cette oreille. Son fils surtout : Charles d’Orléans. Il n’a que seize ans et vient d’épouser Bonne d’Armagnac. Autour de Charles d’Orléans se crée la ligue de Gien où se trouve le puissant seigneur d’Armagnac – principal seigneur du Midi –, son beau-père. Une armée de 10 000 hommes est réunie. Elle marche sur Paris. La vengeance des Armagnacs est en route ! C’est le vrai début de la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons.
L’armée des Armagnacs fait peur à… Jean sans Peur. Il décide de faire appel aux Anglais ! En septembre 1411, Jean et ses Bourguignons s’entendent avec eux pour mener une action commune contre les Armagnacs de Charles. En janvier 1412, les Armagnacs, à leur tour, sollicitent l’aide anglaise. Ils promettent au roi d’Angleterre de l’aider à recouvrer le duché d’Aquitaine et de lui livrer des places fortes françaises ! Rien de moins ! Mais les deux partis, soudain, prennent peur et comprennent tout le bénéfice que l’Angleterre peut tirer de leur mésentente. Ils signent la paix – la trêve… – à Auxerre à la fin d’août 1412.
Les Anglais ne signent aucune trêve ! Ils reprennent leurs chevauchées en Normandie. Il faudrait lever une armée pour les combattre. Pour lever une armée, il faut de l’argent. Aussi, Charles VI, dans un accès de lucidité, convoque-t-il les états généraux pour le mois de janvier 1413. En attendant, depuis le printemps 1412, une corporation fait parler d’elle à Paris : celle des bouchers. Cette corporation est puissante et n’hésite pas à utiliser la violence. Son chef s’appelle Simon Caboche. Jean sans Peur et ses Bourguignons ont gagné sa sympathie en lui offrant, ainsi qu’à ses écorcheurs, d’énormes fûts de vins de Beaune !