Louis déteste toujours autant son père Charles. Il a fait infiltrer la cour par des espions qui lui donnent presque chaque jour des nouvelles de la santé royale. Car Louis a prévu, dès la mort de papa Charles VII, de se mettre à cheval afin de se précipiter sur le trône ! Il craint que son frère Charles, duc de Berry, de Normandie et de Guyenne, s’en empare. En attendant, inscrit à l’université de Louvain, Louis perfectionne son italien. Il occupe ses loisirs à la chasse, respecte ses devoirs religieux. Mais, d’argent, point ! Si bien que Louis est contraint de faire des économies. Il acquiert alors une réputation d’avare qui le poursuit encore aujourd’hui.
La mort de Charles VII n’est pas accueillie tristement par son fils qui devient Louis XI.
Aussitôt qu’il apprend la nouvelle de la mort de son père, Louis, qui a trente-huit ans, revêt un habit aux couleurs vives et part à la chasse au triple galop, léger, sans aucun signe de douleur, au contraire : il attend cet instant depuis plus de vingt ans ! À son retour, il ordonne que ses malles soient bouclées et que son départ vers Reims s’effectue sans tarder. Il veut s’y faire sacrer au plus vite. On s’étonne quand même qu’il ne pense pas à porter l’habit de deuil, ni à faire célébrer un service funèbre, ce qu’il fait quand même, mais le 3 août ! Le bel oncle Philippe, tout heureux lui aussi depuis le décès, organise le sacre : cinquante chariots remplis d’or, de vaisselle précieuse, de tonneaux de vins de Bourgogne, entourés de plusieurs milliers de cavaliers, se dirigent vers Reims. Le sacre a lieu le 15 août 1461. C’est Philippe le Bon qui place la couronne sur la tête de Louis dont il espère toutes sortes de bienfaits et de bénéfices pour lui-même et pour ses amis.
Louis XI n’a qu’une idée en tête : unifier le royaume, en démembrant la Bourgogne afin de la rattacher à la couronne, en soumettant la Bretagne, en reprenant la Normandie à son frère Charles. Désormais, il n’aura de cesse que tous ceux qui s’opposent à ses projets soient neutralisés, comme des insectes pris dans une toile. Sa façon d’agir est souple et inattendue. Il est, disent ses contemporains, ondoyant et divers. C’est, encore selon ceux qui le connaissent, l’universelle araigne – l’araignée. Aussitôt plongée dans l’entourage de son père, l’araignée renvoie tous les crabes qui encombrent le panier. Autrement dit, un travail d’épuration qui dure plusieurs mois s’effectue au profit des hommes que Louis choisit.
Louis et Charles, les deux cousins, vont s’affronter pendant quinze ans. Louis l’organisé, Charles le brillant et brouillon…
Le bon oncle Philippe le Bon ne recueille aucun bénéfice de son attitude protectrice – mais intéressée. Il s’en va, ulcéré ! En 1463, Louis récupère sans préavis les villes de la Somme. Ces villes appartenaient au comte de Charolais, et ce comte n’est autre que le futur Charles le Téméraire et duc de Bourgogne, fils de Philippe le Bon ! La rupture est consommée entre les deux hommes. Une rupture dont les conséquences prennent une ampleur inquiétante. En effet, Charles le Téméraire, Philippe le Bon son père, François II de Bretagne (que Louis a rencontré à Redon en mars 1462) s’allient à Charles de Berry et aux autres grands seigneurs du royaume. Ils nomment leur alliance la « Ligue du Bien public ».