L’objectif de la Ligue du Bien public : s’emparer du trône royal ! Apprenant l’existence de cette ligue, Louis XI déclare : « Si j’avais augmenté leurs pensions, et si je les avais autorisés à écraser leurs vassaux, il ne penseraient pas au Bien public… » L’affrontement est inévitable. Une bataille meurtrière se déroule à Monthléry, le 16 juillet 1465 entre les troupes de Louis et celles de la Ligue. La victoire est indécise. Louis XI décide alors de négocier : il accorde aux Grands tous les privilèges qu’ils exigent – mais dès l’année suivante, il va, progressivement, les supprimer !
Le danger n’est pas écarté. Après la mort de son père Philippe le Bon, en 1467, Charles le Téméraire devient duc d’une Bourgogne au faîte de sa puissance : située sur les grandes routes commerciales, elle possède les Flandres, l’une des régions les plus dynamiques de l’époque ; sa cour est la plus brillante d’Europe, on y déploie un luxe incroyable pour l’habillement, les banquets. Charles le Téméraire ne rêve que d’expansions territoriales. Il aimerait constituer un État d’un seul tenant en conquérant ce qui sépare la Flandre de la Bourgogne, c’est-à-dire l’Alsace, la Lorraine, la Champagne ! Pour le Téméraire, le rêve serait une Bourgogne indépendante du Saint Empire romain germanique, agrandie de possessions françaises, une Bourgogne dont il serait nommé roi ! Afin de mieux y parvenir, il épouse la sœur du roi d’Angleterre Edouard IV, espérant l’aide militaire et financière de son beau-frère.
Saint Empire
Le Saint Empire romain germanique désigne l’Empire fondé par Otton Ier
, en 962, et qui comprend la Germanie, l’Italie et, à partir de 1032, la Bourgogne. À sa tête se trouve un empereur élu par sept Grands Électeurs institués par une bulle papale. Plusieurs souverains français rêveront, sans y parvenir, de devenir empereur des Romains. Le Saint Empire ne cessera de perdre de son importance, jusqu’en 1806 où il sera dissous. Maximilien de Habsbourg – archiduc d’Autriche et Roi des Romains (1486 - 1519) – est élu empereur germanique en 1493. il le reste jusqu’à sa mort en 1519.Pour s’opposer au Téméraire, Louis XI ne possède que sa patience, son sens de l’intrigue et du calcul. Comment déstabiliser le Bourguignon ? En entretenant des foyers de rébellion, par exemple à Liège, une riche ville du Nord qui serait capable, si elle se révolte, d’entraîner la Flandre à sa suite, et toutes les possessions bourguignonnes. En même temps qu’il demande à Charles une entrevue à Péronne, afin d’éviter une nouvelle guerre, Louis envoie à Liège des messagers qui sont chargés d’appliquer son plan. Mission réussie : de graves troubles agitent la ville de Liège. Mais, pendant l’entrevue de Péronne, le 9 octobre 1468, le Téméraire l’apprend et comprend la trahison de son cousin Louis XI ! Il entre dans une colère folle et pense un moment à le tuer pour prendre sa place ! Mais il se calme : il le fait enfermer dans le château où se déroulaient les négociations.
Louis tente d’amadouer Charles. Celui-ci ne s’en laisse pas compter et profite de la situation : il exige que la Champagne revienne à son allié, Charles de Berry, il demande la restitution des villes de la Somme. Puis, il l’emmène de force à Liège le 30 octobre 1468 où les révoltés qui ont été matés sont témoins de ce spectacle ahurissant : Charles le Téméraire pousse devant lui le roi de France Louis XI sur son cheval, et il l’oblige à crier : « Vive la Bougoingne ! Vive la Bourgoingne ! »
Téméraire et cruel
Charles le Téméraire (1433 - 1477) est le fils d’un Philippe, comme Alexandre le Grand qu’il rêve d’égaler ! C’est un soldat remarquable qui aime les tournois. Il aime aussi le luxe : il assiste à la messe entouré d’une nombreuse escorte ; ses repas se déroulent selon un cérémonial pompeux et compliqué. Lorsqu’il va dormir, seize écuyers l’accompagnent, et dorment dans l’anti-chambre – enfin, ils font ce qu’ils veulent… (à l’époque, des rumeurs averties dirent le Téméraire inverti). Il est orgueilleux, impulsif et batailleur, ne supporte pas la défaite. Lorsqu’il remporte une victoire, il se montre d’une étonnante cruauté avec les vaincus, incitant à la torture ou aux mutilations. Après la dernière bataille qu’il dispute sous les murs de Nancy, le 5 janvier 1477 contre les Lorrains, les Alsaciens et les Suisses, on le cherche pendant deux jours. On retrouve enfin son cadavre raidi et nu sous la neige, à moitié dévoré par les loups, près de l’étang de Saint-Jean. Sa tête avait été fendue d’un coup de hache et il était percé de dizaines de coups d’épée, une lance était plantée dans son corps.