L’affaire ? Elle se présente le 6 février 1934 : Alexandre Stavisky, un Juif d’origine russe, qui, depuis plus de vingt ans, vit d’escroqueries diverses, a réussi à tromper – ou à acheter – de nombreux hommes politiques et des magistrats, jusqu’au jour où ses malversations sont découvertes. Alors qu’il va être arrêté, il est retrouvé, le 8 janvier 1934, mort dans une villa près de Chamonix. Le scandale allait être tellement énorme qu’il a dû se suicider. Ou bien qu’on l’a abattu. Le Canard enchaîné titre d’ailleurs : « Stavisky s’est suicidé d’une balle tirée à trois mètres. » Pendant tout le mois de janvier, des manifestations d’extrême droite se succèdent aux cris de « À bas les voleurs », se déchaînant contre la « racaille des spéculateurs » en des termes d’une violence tellement inquiétante que le nouveau président du Conseil, Édouard Daladier, renvoie le préfet de police fort apprécié de la droite : Jean Chiappe. C’est mettre le feu aux poudres.
Le 6 février 1934, jour de la présentation du nouveau gouvernement au Palais Bourbon, les ligues d’extrême droite – l’Action française, les Jeunesses patriotes, les Croix de feu – appellent à une gigantesque manifestation à laquelle vont participer aussi les anciens combattants républicains de tendance communiste. Ce qu’ils veulent, c’est atteindre le Palais Bourbon. Mais il faut pour cela passer le pont de la Concorde sur lequel sont massés des gardes à cheval, et qui vont immédiatement tirer sur les premiers manifestants qui tentent de s’avancer. De dix heures du soir à trois heures du matin, les émeutiers tentent de franchir le pont. Sans succès. La manifestation a fait plus de vingt morts et 2 000 blessés. Daladier doit démissionner. Le président Lebrun fait appel à l’un de ses prédécesseurs, Gaston Doumergue, pour former un gouvernement d’union nationale.
Les événements de février 1934 font craindre un coup de force fasciste. Toutes les forces de gauche s’unissent. Le parti communiste lui-même se joint au mouvement antifasciste sous l’impulsion de Moscou. Maurice Thorez souhaite alors un Front populaire qui rassemblerait communistes, socialistes et radicaux. C’est chose faite en 1935, le 14 juillet. Un immense défilé de 500 000 personnes s’étire de la Bastille à la République. Édouard Daladier, Maurice Thorez et Léon Blum, le chef de la SFIO, y sont acclamés. Les trois maîtres mots de cette manifestation sont : « Travail, paix, liberté ». Toujours dans la crainte du fascisme, les socialistes et les communistes reforment une CGT unifiée.
Pendant ce temps chez nos voisins
En 1917, en Russie, le 2 mars (15 mars de notre calendrier), le tsar Nicolas II abdique ; depuis le 23 février (8 mars), les bolcheviques – ouvriers russes dont Lénine est le chef du parti – ont manifesté et appelé à la grève, les soldats se sont mutinés contre les officiers. Ensemble, ils se sont emparés des bâtiments publics et ont formé un gouvernement provisoire. Ce premier temps de la Révolution est suivi d’un second : le 24 octobre (6 novembre) de la même année, les bolcheviques s’emparent du Palais d’hiver et des points stratégiques dans la capitale Petrograd. La ville est aux mains des insurgés le 25 octobre (7 novembre). Le deuxième congrès des soviets se réunit, il élit le conseil des commissaires du peuple composé uniquement de bolcheviques et présidé par Lénine. En février 1920, Mussolini fonde le parti fasciste italien. Le 31 janvier 1933, en Allemagne, Hitler devient chancelier du Reich ; en mars, il obtient les pleins pouvoirs. Le 14 octobre 1933, l’Allemagne annonce qu’elle se retire de la SDN. Le 30 juin 1934, la « Nuit des longs couteaux » permet à Hitler d’éliminer ses adversaires ; le 2 août, après la mort du maréchal Hindenburg, il devient chef de l’État. Le 11 décembre 1937, l’Italie se retire de la SDN.