Le roi Louis XV veut faire un exemple. Le 1er
juillet 1766, le jeune chevalier innocent, âgé de dix-neuf ans, va mourir sur le bûcher, après qu’on lui a arraché la langue jusqu’à la racine, et coupé le poing ! On brûle avec lui un exemplaire du dictionnaire philosophique de Voltaire – celui-ci, menacé d’arrestation à cause de cette affaire, s’est enfui au pays de Vaud, en Suisse, avant de demander asile au despote éclairé Frédéric II le Grand, roi de Prusse. Voltaire tentera, de Prusse – après l’exécution –, de faire réhabiliter le chevalier, en vain. Il faut attendre la Convention, en 1793, pour que cette réhabilitation soit effective, le chevalier de La Barre devenant un martyr du fanatisme.« Tête à vent » fait des siennes ! « Tête à vent », rappelez-vous, c’est la reine Marie-Antoinette ainsi surnommée par son propre frère qui reproche à sa royale sœur sa légèreté ! En août 1784 commence une escroquerie dont elle va se trouver bien involontairement le centre, cible toute désignée pour la vindicte populaire qui va se déchaîner en 1789. Voici l’histoire :
La lune joue à cache-cache avec les nuages en cette nuit du 11 au 12 août 1784. Près de la grille de l’Orangerie à Versailles, derrière une charmille, une femme somptueusement vêtue remet à un homme une rose et lui dit à mi-voix : « Vous savez bien ce que cela veut dire… » L’homme sent son cœur s’emballer : cette femme, c’est la reine Marie-Antoinette. Lui, le cardinal de Rohan, lui qu’elle boudait, vient donc de rentrer en grâce, mieux même, peut-être…
Hélas, la reine n’est pas la reine. C’est une fille du peuple, la jeune Oliva qu’une aventurière a placée là. Cette aventurière, Jeanne de la Motte, prétendue comtesse qui dit descendre de Charles IX, vient de mystifier Rohan. Le cardinal reçoit ensuite de nombreuses fausses lettres d’amour de sa royale maîtresse – écrites par l’amant de Jeanne de la Motte, Marc de Villette. De plus, son conseiller l’encourage à poursuivre cette relation prestigieuse. Qui est ce conseiller ? C’est Joseph Balsamo, proxénète, escroc, guérisseur, magicien, inventeur d’un élixir d’immortalité qu’il vend une fortune, et faux comte de Cagliostro…Rohan – bien conseillé – n’hésite donc pas à accepter de payer en quatre fois un collier de diamants que la reine aurait commandé aux joailliers Bôhmer et Bassenge, le roi Louis XVI lui refusant ce cadeau.
L’amant de Jeanne de la Motte qui se fait passer pour l’envoyé de Marie-Antoinette se fait remettre le fameux collier. Le comte de la Motte – mari de Jeanne… – part aussitôt en Angleterre le négocier. Le cardinal apprend la supercherie, refuse de payer les joailliers qui s’en vont bientôt à Versailles réclamer leur dû ! C’est alors qu’éclate l’affaire du collier de la reine. La reine est innocente, mais lorsque le peuple apprend tous les détails de l’escroquerie, et les extrapolations qu’on en fait, il s’en sert pour aiguiser sa haine de celle qui n’est jamais entrée dans leur cœur : l’Autrichienne ! Marie-Antoinette réclame pourtant un procès public : Rohan est déchargé de toute accusation mais banni dans son abbaye de La Chaise-Dieu ; Jeanne de la Motte est condamnée à la prison à perpétuité – elle s’évade au bout de dix mois. Oliva n’est pas même jugée, étant de trop modeste origine ; Cagliostro est exilé – il meurt enfermé au château de Saint-Léon, près d’Urbino en Italie, en 1795. Et le collier court toujours…
Chapitre 27
Dix châteaux en FranceVous avez décidé d’effectuer une plongée dans le Quercy, vous avez visité les grottes du Pech-Merle à Cabrerets, vous vous êtes émerveillé devant les décorations de ce sanctuaire paléolithique. Vous avez séjourné à Cahors, bu de son excellent vin, puis vous avez quitté la ville par le pont Valentré commencé en 1308. Trente kilomètres vers le nord, et vous voilà à Labastide-Murat, où naquit en 1767 Joachim… Murat, le roi de Naples, maréchal de la Grande Armée. Ensuite, vous faites halte dans la pittoresque cité de Rocamadour aux fortifications médiévales. Quelques kilomètres encore – vous pénétrez dans le Lot-et-Garonne – et il apparaît, époustouflant de puissance silencieuse, planté comme un défi sur son éminence rocheuse, au milieu des bois : Bonaguil.