On sait très peu de choses de Clodion, sinon que peut-être il claudiquait, d’où son nom, mais plus sûrement qu’il possédait une abondante chevelure lui retombant sur les épaules. Sinon, il n’aurait pu être roi ! En effet, les Francs sont sûrs que leurs rois descendent des dieux qui régissent le visible et l’invisible ; et la marque indiscutable de cette filiation divine, c’est une chevelure dense, blonde et bouclée. Cette crinière est celle des fils du ciel, seuls capables de gouverner des hommes. Et, si l’on veut éliminer un adversaire ou un prétendant trop insistant, il suffit de prendre une bonne paire de ciseaux et de se débrouiller pour le tondre ! Clodion, c’est l’ancêtre franc salien. Rappelez-vous, il a pris Cambrai en 430, et il n’a pas fait raser la ville parce qu’à l’intérieur de ses remparts, ses trésors seront à l’abri. Mort en 448, il laisse le pouvoir à son fils Mérovée. Mérovée, on aurait pu l’apercevoir dans la mêlée des champs Catalauniques, car il est venu prêter main forte à Aetius dans sa lutte contre les Huns. Sept ans plus tard, en 458, Mérovée meurt, et Childéric, son fils, le remplace. Mérovée est considéré comme le fondateur de la dynastie mérovingienne.
Officier au service de l’Empire romain d’Occident, Childéric s’apprête à régner sur le petit royaume de Tournai, mais pas pour longtemps…
Retour en arrière : les champs Catalauniques ! Qui est là, faisant tourner son épée comme un moulinet infernal, repoussant Hun par Hun l’ennemi ? C’est Childéric ! Pour lui, cette bataille est en quelque sorte un stage de formation. La bravoure ? Il en possède comme deux ! De haute taille, il impressionne déjà. À la mort de son père en 458, c’est lui qui devient roi des Francs saliens. Mais, bien que son royaume soit minuscule – il s’étend autour de la ville de Tournai, et couvre une partie de la Belgique d’aujourd’hui – Childéric veut gouverner tout seul, sans sa famille, sans les nobles de son entourage. Aussi, la révolte gronde, et Childéric doit faire ses bagages et fuir jusqu’en Thuringe (aux environs d’Erfurt, en Allemagne). En réalité, le refus du partage du pouvoir n’est pas la seule raison du départ de Childéric. On croit savoir que son penchant excessif pour le sexe féminin lui faisait considérer d’emblée comme sa propriété les femmes ou les filles de ses sujets, qu’il enlevait à tour de bras ! Cette habitude contrariante pour des maris ou des pères était difficilement supportable. Tous en chœur lui crient “ Dehors ! ” Voilà donc le roi déchu qui est reçu à bras ouverts par son homologue thuringien, le roi Basin. Basin vit à sa cour avec la reine son épouse, nommée Basine. Tout simplement.
Allié de Paul, successeur provisoire d’Aegidius, représentant de Rome en Gaule, Childéric se bat contre les Saxons qui menacent d’envahir l’Armorique et parviennent jusqu’à Angers. Le fils d’Aegidius, Syagrius, prend la succession de son père, mais, au lieu de faire allégeance à l’empereur d’Orient, il s’allie aux Wisigoths qui règnent sur la partie sud-ouest du pays. Cette alliance porte en elle le germe de guerres à venir. Childéric n’a pas le temps de les prévenir : il meurt en 481. Enterré à Tournai – à cette occasion, plusieurs dizaines de jeunes chevaux sont sacrifiés et disposés en étoile, à une vingtaine de mètres du cœur de la tombe –, il laisse la place à son fils, Clovis. À quinze ans, Clovis devient roi !