Charlemagne se passionne pour la culture, il adore l’astronomie et le calcul. Sa langue maternelle est le francique, mais il parle couramment le latin et le grec, il aime la grammaire, mais… il ne sait pas écrire. Ce n’est pas faute d’avoir essayé, et d’essayer encore aussitôt qu’il le peut. Il cache même sous son lit une écritoire et une plume avec laquelle il tente de tracer des lettres. En vain. Il s’y est pris trop tard. Sous ses grosses mains habituées à tenir l’épée et à pourfendre le Saxon, la plume s’écrase.
C’est Léon III qui couronne Charlemagne à Rome. Les conditions dans lesquelles s’est déroulée la cérémonie relèvent d’un protocole pour le moins singulier…
À partir de 797, Charlemagne qui allait de palais en palais, changeant de résidence au fil des saisons et de ses activités, décide de s’installer à Aix-la-Chapelle (Aachen en allemand aujourd’hui). Souffrant de rhumatismes, il préfère vivre à proximité des sources qui peuvent calmer ses douleurs, Aix-la-Chapelle est une ancienne cité thermale romaine. Son palais est le plus beau des soixante-cinq qui furent construits à l’époque – on construisit aussi près de 250 monastères, sept cathédrales… le tout en bois, de sorte qu’il n’en reste pas grand-chose. Sauf dans la cathédrale d’Aachen, la chapelle du palais de Charlemagne a été incorporée à la cathédrale. Charlemagne règne sur l’Italie, la Gaule, la Germanie, il est roi des Francs, des Lombards, il a – enfin – pacifié les Saxons, ou presque… Que peut-il encore désirer ?
Ce qui lui manque, il l’apprend à Rome lorsque, le 25 décembre 800, le pape Léon III lui pose sur la tête sa couronne d’empereur ! Pourquoi le pape a-t-il réservé cette surprise à Charlemagne ? Parce que les Byzantins, l’année précédente, trouvant que le pape se rapprochait trop du roi des Francs, avaient failli le tuer. Le pape n’avait dû son salut que grâce à l’intervention de deux envoyés de Charlemagne. Il est donc normal que Charlemagne aille à Rome rendre une visite d’amitié à celui qu’il a presque sauvé ! Ce 25 décembre, la foule se presse dans la basilique Saint-Pierre-du-Latran. C’est la messe solennelle de Noël. Charlemagne fait son entrée dans l’église, se dirige vers l’autel de saint Pierre, se prosterne pour prier. Et voici qu’arrive en catimini avec une couronne à la main Léon III ! Et il pose cette couronne sur la tête de Charlemagne en prononçant la formule rituelle de consécration, puis il demande à la foule de proclamer haut et fort cette formule : « Charles, Auguste couronné par Dieu grand et pacifique empereur, vie et victoire ! »
Le pape oint ensuite d’huile sainte le front du nouvel empereur, tout cela dans la tradition byzantine du sacre impérial – mais, dans la tradition byzantine, le futur oint est prévenu et d’accord ! Car Charlemagne ignore ce 25 décembre 800 qu’il va être sacré empereur. Ou bien il feint de l’ignorer… Toujours est-il qu’Eginhard rapporte que Charlemagne se montra d’abord si mécontent d’avoir été couronné qu’il jura que, s’il avait su, il ne serait pas venu ! Mais Eginhard ajoute que le nouvel empereur supporta avec beaucoup de patience la jalousie que son homologue byzantin ne manqua pas d’éprouver en apprenant ce couronnement inattendu. Il parvint même, à force d’ambassades, à vaincre sa résistance. Et Charlemagne n’hésita pas ensuite à se présenter « Empereur auguste par les largesses de la grâce de Dieu. » De sorte que, pour ce qui s’est passé le 25 décembre 800, on peut conclure que s’il avait su, il serait venu, de toute façon !
Le calendrier de Charlemagne
Étonnamment, bien avant le calendrier révolutionnaire de Fabre d’Églantine, l’empereur Charlemagne va imaginer un nouveau calendrier destiné à remplacer le calendrier romain. Chaque nom de mois y est en rapport avec l’activité agricole dominante : juin, le mois des foins, juillet, le mois des moissons, septembre, le mois des vendanges, etc. Sans grand succès cependant…
Au cours des trois années qui ont précédé 814, des éclipses de soleil ont eu lieu, des signes étranges et inexplicables ont été vus dans le ciel, Charles a fait une étrange chute de cheval en voyant descendre devant lui une torche enflammée… Bref, tout cela, pour les contemporains de l’époque, ne pouvait qu’avoir annoncé la mort de Charlemagne dont le récit va suivre.