On ne parle plus aujourd’hui de la Francia media, celle de Lothaire, ni de la Francia orientalis, celle de Louis le germanique. On ne parle plus non plus de la Francia occidentalis, celle de Charles le Chauve : elle est devenue la France. Notons cependant, en Bavière, un vestige de la Francia media : la Franconie (Franken, en allemand). Notons aussi que le pays des Francs, c’est-à-dire la région qui entoure Paris, a longtemps été appelée le Pays de France – aujourd’hui l’Île-de-France. En témoigne encore le nom de certaines cités, Roissy-en-France par exemple, et son aéroport où se trouvent associés Charles – prénom royal – et Gaule, ou plutôt Gaulle (deux ailes, c’est mieux pour l’envol…).
Partage détonnant – et pour des siècles – que celui des trois frères : l’État tampon de Lothaire ne cessera de faire l’objet de convoitises de ses deux voisins. Et lorsqu’il sera réduit à sa portion congrue, ce sont les deux voisins restants qui ne cesseront de vouloir s’envahir au fil des siècles, les deux dernières tentatives ayant eu lieu entre 1914-1918 et 1939-1945 ! Merci Charles, Lothaire et Louis ! Vous auriez quand même pu tenter de faire comme grand-père Charlemagne : faire en sorte qu’il n’en reste qu’un seul à la tête de l’Empire…
Le partage de Verdun en 843
Robert le Fort, l’ancêtre des Capétiens
Robert le Fort est un comte rhénan, grand aristocrate, parent de Lothaire et de Louis par leur mère. Venu auprès de Charles le Chauve, il prend la responsabilité de plusieurs abbayes dont celle de Marmoutier. Il aimerait s’installer dans la région du Mans. Mais Charles préfère y installer son fils Louis le Bègue. Robert le Fort, fort mécontent, rejoint contre Charles le Chauve Louis le Germanique en 858. Mais il revient trois ans plus tard, en 861, et se met à combattre, contre le titre de duc et de belles possessions, les Normands et les Bretons – Louis le Bègue ne parvenant pas à les repousser. Robert le Fort meurt percé d’une flèche, à Brissarthe, en combattant les Normands près d’Angers en 866. Il a eu trois enfants : Eudes Ier
, roi de France de 888 à 898, Robert Ier, roi de France de 922 à 923 et père de Hugues le Grand, lui-même père de Hugues Capet ! Ouf ! Nous sommes donc passés, en famille, de la dynastie des Carolingiens, à celle des Robertiens, pour entrer bientôt, avec Hugues Capet, dans celle des Capétiens.Ils furent le fléau des rivages et des rives, ils arrivaient sans bruit, pillaient, brûlaient. Ils étaient des démons en furie. Qui aurait pu penser qu’ils deviendraient des anges ?
Terribles, les Normands, avec leurs drakkars et leurs torches incendiaires toujours à la main ! Charles le Chauve est obligé de négocier avec eux. Et puis les Bretons s’en mêlent…
Sans doute poussés par un considérable accroissement de leur population, les Normands multiplient les raids dévastateurs. Ces Normands, ou Vikings, ou Danois, ou Suédois, ou Norvégiens se lancent dans des expéditions qui touchent d’abord les côtes, puis, ils remontent fleuves, rivières, débarquent dans les petites villes riveraines, les villages, pillent, massacrent. Les monastères constituent pour eux des cibles de choix parce qu’ils n’offrent aucune résistance et que leurs trésors sont ainsi disponibles quasiment en libre service. Les moines fuient le plus loin qu’ils le peuvent, emportant avec eux leurs reliques, pathétiques ! Charles le Chauve ne sait plus quoi faire contre ces envahisseurs qui ont déjà assailli Paris, Tours, Chartres. Ils se déplacent très rapidement sur leurs drakkars, longs de vingt à quarante mètres, de forme étroite, effilée. Lorsque le vent n’est pas assez fort, une vingtaine de rameurs s’installent de chaque côté du bateau et le voilà qui file en silence, à toute allure. Ils ont un fond plat, peuvent accoster partout et transportent de quarante à soixante-dix hommes armés jusqu’aux dents.