Читаем Mon traître полностью

Il a dit qu’il ne connaissait pas Meehan, mais qu’il en avait vu passer, des mouchards. Pour l’argent, par orgueil, pour en finir avec la violence, par vengeance après une punition de l’IRA ou pour avoir été écartés du Mouvement. Il a dit tout avoir connu et vu. Et même, qu’il avait récemment lu un livre écrit par un informateur. En finissant sa bière, il a expliqué que les Britanniques essayaient de séduire le traître, pas de l’obliger. Il a dit qu’un bon traître était un homme heureux, choyé, considéré par ses nouveaux maîtres. Qu’il avait besoin de reconnaissance et qu’on lui en donnait. Il a dit qu’un bon traître ne pouvait pas haïr l’autre camp. Qu’on ne pouvait le tenir ni par la force ni par le chantage. Que le chantage et la force le rendaient volatil, versatile, fragile et sans valeur pour l’ennemi. Il a dit ça et puis il a posé sa bière, il nous a tourné le dos, il a haussé les épaules et il est sorti en se demandant tout haut pourquoi il me racontait ça.

Jack était portier devant le McDaids. J’avais beaucoup bu. Il m’a laissé entrer quand même. Assis sur son tabouret, pouce dirigé vers la porte, un homme m’a juré que Tyrone avait fait ça pour protéger son fils. Sûrement. Il avait cru qu’en collaborant avec l’ennemi, son Jack aurait une remise de peine, qu’il serait libéré plus tôt. Ça s’était vu, m’a juré le gars. Contre des informations, on libère ta femme ou ton gosse. Tu refuses ? Alors on les garde le temps qu’il faudra.

Au Busybee, un républicain m’a dit qu’après l’enterrement de Jim, Meehan avait été tenu responsable des incidents, qu’il avait dû être menacé de nombreuses années de détention, peut-être même de la prison à vie. On te colle deux ou trois meurtres en plus et voilà. Perpétuité, ça fait réfléchir un soldat et ça peut faire fléchir un homme. La prison, il en sortait. Il n’a pas voulu y retourner. C’est pour ça qu’il a craqué, m’a expliqué le gars en allumant une cigarette.

Au Kittie’s, quelqu’un a dit qu’il avait connu un type comme ça. Un joueur, un malade, un homme à double personnalité, qui avait trahi pour l’adrénaline, l’envie du risque, exactement comme on se lance d’un pont retenu par un élastique. Une femme croyait savoir que Tyrone était fatigué et qu’il voulait que la guerre s’arrête. Une autre s’est demandé s’il n’était pas agent double, si l’IRA ne lui avait pas donné l’ordre de jouer les traîtres pour aider la République. Un jeune gars d’Ardoyne a haussé les épaules en disant qu’il ne fallait pas comprendre les salauds, mais les éliminer. Deux autres ont refusé de me parler. Une dame âgée avait entendu dire que Tyrone avait peut-être un grand-père anglais. Une autre m’a expliqué que son propre fils avait gagné un voyage en Grèce, il y a huit ans. Son nom avait été tiré au sort par une chaîne de magasins. Ça tombait bien. Il sortait de Long Kesh. Lui et sa femme sont allés au rendez-vous dans un grand hôtel de Belfast, pour retirer leur lot. Ils se sont retrouvés dans une chambre avec trois hommes, l’un d’eux avait un fort accent anglais. Sur une table, il y avait leurs billets d’avion et 3 956 £ en liquide dans un sac ouvert, exactement ce qui manquait pour rembourser les traites de leur voiture. Les hommes se sont présentés comme Unité des Forces de Recherche britanniques. Us savaient tout du couple. Ils ont dit à la femme que cet argent était à eux s’ils aidaient à arrêter les tueries. S’ils acceptaient de renseigner. Elle s’est mise à crier au secours. Son mari a renversé une chaise du pied. Us se sont enfuis de l’hôtel et sont allés tout raconter au centre de presse de Sinn Féin.

Au Rock Bar aussi, on m’a parlé d’argent. La trahison de Tyrone était payée. Il l’avait avoué à la conférence de presse. Personne ne savait combien, mais pas grand-chose. L’IRA avait des informateurs qui traquaient les mouvements suspects sur les comptes bancaires. Jamais Tyrone Meehan n’a attiré l’attention. On ne l’a pas vu autrement habillé qu’avec son tweed fatigué. En 25 ans, il s’est acheté deux voitures d’occasion. Il buvait normalement et payait à son tour. Il ne jouait pas et ne se droguait pas. Sheila et lui sont allés une fois à Paris, deux fois en Espagne. Ils passaient leurs vacances dans un camp de caravanes sur la côte d’Antrim. Quoi d’autre, alors ? Il devait y avoir quelque chose. Et au fait, interrogeait la rumeur, où était-il, maintenant ? Personne ne l’avait revu. En Angleterre, sous un faux nom ? Ou en Amérique. Ou en Australie, avec le visage refait. Qu’est-ce qu’ils en savent, tous ? Et moi, je savais, moi ? Je savais quoi ? Je voulais savoir, vraiment ? Est-ce que vraiment je voulais savoir ?

— Tu sais quelque chose, le Français ?

Rien. De rien. J’avais la tête lourde. L’ivresse. J’écoutais à peine. Les bruits de verre, les voix d’alcool, la bousculade des dernières bières avant le rideau du bar baissé. Je regardais ces hommes, je voyais le dos de Tyrone, occupé à raviver le feu. J’aurais dû lui poser la question.

Перейти на страницу:

Похожие книги

Кредит доверчивости
Кредит доверчивости

Тема, затронутая в новом романе самой знаковой писательницы современности Татьяны Устиновой и самого известного адвоката Павла Астахова, знакома многим не понаслышке. Наверное, потому, что история, рассказанная в нем, очень серьезная и болезненная для большинства из нас, так или иначе бравших кредиты! Кто-то выбрался из «кредитной ловушки» без потерь, кто-то, напротив, потерял многое — время, деньги, здоровье!.. Судье Лене Кузнецовой предстоит решить судьбу Виктора Малышева и его детей, которые вот-вот могут потерять квартиру, купленную когда-то по ипотеке. Одновременно ее сестра попадает в лапы кредитных мошенников. Лена — судья и должна быть беспристрастна, но ей так хочется помочь Малышеву, со всего маху угодившему разом во все жизненные трагедии и неприятности! Она найдет решение труднейшей головоломки, когда уже почти не останется надежды на примирение и благополучный исход дела…

Павел Алексеевич Астахов , Павел Астахов , Татьяна Витальевна Устинова , Татьяна Устинова

Проза / Современная русская и зарубежная проза / Современная проза