Читаем Révolte sur la Lune полностью

Le Kilimandjaro, le Popocatepetl, le Logan, El Libertado… ma montagne favorite changeait selon les pays : tout ce que nous demandions, c’était qu’il s’agisse de la « plus haute montagne » dans le cœur des autochtones. J’ai même trouvé à dire du bien des modestes montagnes du Tchad quand nous y avons été invités – j’y ai mis tellement de cœur que je me suis presque cru.

À d’autres moments, à l’aide de questions posées bien à propos par les journalistes que Stu La Joie avait mis dans sa manche, je parlais des usines de produits chimiques (auxquelles je ne connais rien, mais j’ai une bonne mémoire) à la surface de Luna, en cet endroit où le vide toujours disponible, l’énergie solaire et les matières premières illimitées devaient selon toute probabilité autoriser le développement de procédés trop onéreux ou même impossibles sur Terre. Car viendrait certainement le jour où le prix des transports baisserait, dans un sens comme dans l’autre, et il serait alors rentable d’exploiter les ressources encore vierges de Luna. Je trouvais toujours le moyen de faire comprendre que les bureaucrates encroûtés de l’Autorité Lunaire n’avaient pas su voir les immenses possibilités qu’offrait Luna (ce qui était vrai), ce qui amenait toujours une autre question à laquelle je me faisais un plaisir de répondre : oui, Luna pouvait accueillir autant de colons que nécessaire.

Ce dernier point était parfaitement exact, bien que je me sois toujours gardé de signaler que Luna (et parfois les Lunatiques de Luna) tuait environ la moitié des nouveaux venus. Il faut dire que les gens parlaient rarement de partir eux-mêmes ; ils pensaient plutôt à forcer ou à convaincre les autres d’émigrer pour enrayer la surpopulation et réduire leurs impôts. J’ai gardé le silence sur le fait que cet essaim de gens sous-alimentés que nous voyions partout se reproduisait de toute façon beaucoup trop vite pour qu’une catapulte puisse venir compenser cette situation.

Nous ne pourrions pas loger, nourrir et entraîner ne serait-ce qu’un million de nouveaux débarqués par an… et ce million ne représentait qu’une goutte d’eau pour Terra ; toutes les nuits, on concevait davantage de bébés que cela. Nous pouvions certes en accepter beaucoup plus qu’il n’y aurait d’émigrants volontaires, mais s’ils voulaient établir une émigration obligatoire qui finisse par nous submerger… Luna n’a qu’un seul procédé à l’égard d’un nouveau venu : soit celui-ci ne commet pas d’erreur fatale, par son comportement personnel ou dans ses rapports avec un environnement qui frappe généralement sans prévenir… soit il se transforme rapidement en engrais dans un quelconque tunnel agricole.

Le seul résultat d’une telle immigration serait la disparition d’une proportion accrue d’immigrants – trop peu parmi nous les auraient aidé à surmonter les difficultés naturelles.

Cela n’empêchait pas Prof de parler à qui voulait l’entendre du « grand avenir de Luna ». Moi, je parlais de catapultes.

Pendant les nombreuses semaines à attendre que le Comité daigne nous convoquer de nouveau, nous avons beaucoup voyagé. Les hommes de Stu organisaient tout ; la seule question restait de savoir à combien de réunions nous pouvions assister, car il ne fallait pas oublier que chaque semaine passée sur Terra nous ôtait une année de vie – et peut-être même davantage pour Prof ; il ne s’est pourtant jamais plaint ; il se montrait toujours disposé à aller à une nouvelle réception.

Nous avons passé pas mal de temps en Amérique du Nord. La date de notre Déclaration d’Indépendance, exactement trois cents ans après celle des colonies britanniques d’Amérique du Nord, nous a fait une énorme publicité, en grande partie montée par les hommes de Stu. Les Américains du Nord sont en général très sentimentaux en ce qui concerne leurs « États-Unis », même si cela ne signifie plus rien depuis que leur continent a été organisé rationnellement par les N.F. Ils continuent à élire tous les huit ans un président – pourquoi ? je ne saurais dire. Pourquoi les Britanniques ont-ils encore une reine ? – et se prétendent « souverains » ? La souveraineté, comme l’amour d’ailleurs, veut dire ce que l’on veut bien lui faire signifier ; ce n’est jamais qu’un mot qui, dans un dictionnaire, se trouve à proximité de « sobriété » et de « soûlographie ».

La « Souveraineté » représentait pourtant beaucoup pour l’Amérique du Nord et le « 4 juillet » était une date magique ; la Ligue du 4-Juillet s’est chargée de nous représenter, et Stu nous a assuré qu’initier le mouvement ne lui avait pas coûté très cher – et plus rien, désormais. La Ligue avait même récolté de l’argent pour l’envoyer sur Luna, car les Américains du Nord adorent donner de l’argent, et peu leur importe à qui.

Перейти на страницу:

Похожие книги