Читаем Révolte sur la Lune полностью

« Pourtant, si une forme de gouvernement représentatif vous paraît désirable, il reste encore des moyens de l’améliorer, des moyens bien supérieurs au découpage des circonscriptions électorales. Vous, par exemple, vous représentez chacun environ dix mille individus, parmi lesquels peut-être sept mille en âge de voter… certains d’entre vous ont été élus avec de faibles majorités. Supposons qu’au lieu d’être désigné par l’élection, un député le soit par une pétition signée de quatre mille citoyens ; il représenterait alors effectivement ces quatre mille électeurs, et n’aurait pas de minorité contre lui puisque s’il avait existé une minorité dans sa circonscription électorale, ses membres auraient parfaitement eu le droit de signer d’autres pétitions. Tous les électeurs seraient alors représentés par des hommes de leur choix. On peut aussi imaginer qu’un homme ayant réuni huit mille partisans pourrait disposer d’un double droit de vote dans cette assemblée. Il y aura certainement des difficultés, des objections, des détails pratiques à mettre au point – de très nombreux détails, mais c’est à vous qu’il revient de les étudier, de résoudre ces problèmes et ainsi de nous épargner la faiblesse chronique de tous les gouvernements démocratiques, cette faiblesse provenant des minorités qui estiment, avec raison, qu’elles ne sont pas représentées.

« Enfin, quoi que vous fassiez, ne permettez surtout pas au passé de peser sur vos décisions ! J’ai remarqué une proposition qui tend à faire de ce Congrès un système bicamériste. Excellent : plus il y a d’obstacles aux législations, mieux cela vaut. Pourtant, plutôt que de suivre la tradition, je proposerais, personnellement, une seule Chambre législative, la deuxième ayant pour seul pouvoir celui d’abroger les lois. Que les législateurs ne puissent adopter une loi qu’avec une majorité des deux tiers… tandis que ceux qui abrogeraient les lois puissent annuler n’importe laquelle à la simple minorité d’un tiers. Inepte, direz-vous ? Réfléchissez : une loi tellement discutée qu’elle ne peut convaincre les deux tiers d’entre vous est probablement mauvaise. Inversement, si une loi est discutée par au moins un tiers d’entre vous, ne vous semble-t-il pas que vous auriez intérêt à vous en passer ?

« Avant que vous ne rédigiez votre Constitution, permettez-moi d’attirer votre attention sur les vertus merveilleuses de la négation ! Insistez sur les aspects négatifs ! Que votre texte soit émaillé d’articles indiquant les actions qui seront à tout jamais interdites à votre gouvernement : pas de conscription militaire, pas d’interférence, si légère soit-elle, avec la liberté de la presse, la liberté de se déplacer, la liberté de parole, de réunion, de culte, le droit à l’instruction, au travail, le droit syndical… pas d’impôts involontaires. Camarades, si vous deviez consacrer cinq années de votre temps à étudier l’Histoire pour définir toujours plus d’actions que votre gouvernement devrait promettre de ne jamais faire, si votre Constitution n’était rien d’autre que la somme de ces articles négatifs, je vous le dis, je n’aurais aucune crainte pour l’avenir.

« Je redoute davantage les actions positives d’hommes calmes et pétris de bonnes intentions qui accordent au gouvernement le droit de faire ce qui apparaît comme nécessaire. Veuillez toujours garder en mémoire que l’Autorité Lunaire a été créée dans les buts les plus nobles par des hommes aux intentions pures, par des hommes élus par le suffrage populaire. C’est sur cette pensée que je vous abandonne à vos travaux. Je vous remercie.

— Gospodin président ! Une précision ! Vous avez dit : « Pas d’impôts involontaires »… Comment comptez-vous financer tout cela ? Urgcnep !

— Veuillez m’excuser, monsieur, mais c’est votre problème. Je pense à plusieurs solutions possibles : des contributions volontaires comme celles qui permettent aux Églises de subvenir à leurs besoins… des loteries gouvernementales pour lesquelles personne n’est obligé d’acheter des billets… à moins que vous, messieurs les députés, ne deveniez des contribuables volontaires et décidiez de payer pour nos besoins, quels qu’ils soient ; cette solution aurait d’ailleurs l’avantage de nous assurer un gouvernement aussi réduit que possible, qui ne s’occuperait que des divers problèmes indispensables. J’ose d’ailleurs déclarer que je serais fort heureux si nous avions pour seule loi la Règle d’Or : il me semble que cette loi se suffit à elle-même et je ne crois pas qu’une autre soit nécessaire pour la renforcer. En effet, si vous croyez vraiment que vos voisins doivent, pour leur propre bien, respecter des lois, pourquoi ne payeriez-vous pas pour celles-ci ? Camarades, je vous en conjure, ne vous laissez pas aller aux impôts obligatoires. Il n’y a pas pire tyrannie que celle qui oblige quelqu’un à payer pour ce qu’il ne veut pas, uniquement parce que vous pensez que c’est pour son bien.

Перейти на страницу:

Похожие книги