Читаем Révolte sur la Lune полностью

J’ai écouté avec attention et j’ai, une fois de plus, vérifié le programme, puis je me suis rendu dans l’obscure salle des radars. Si tout se déroulait selon les plans prévus, nous allions presque immédiatement pondre un autre œuf dans le fleuve Hudson, puis pilonner des objectifs divers sur tout le continent, et cela trois heures de suite ; nous allions tirer coup par coup car le jeunot n’était pas capable de tirer plusieurs salves en même temps, mais Mike avait tenu compte de son inexpérience.

L’Hudson a été frappé comme prévu. Je me suis alors demandé combien de New Yorkais écoutaient le bulletin d’information des N. F. au moment de l’attaque, qui offrait un bien beau démenti.

Deux heures plus tard, le poste des N.F. déclarait que les rebelles lunaires tenaient déjà sur orbite des projectiles au moment de la destruction de la catapulte mais que ces quelques charges seraient bien les dernières. Après le troisième bombardement de l’Amérique du Nord, j’ai arrêté le radar. J’avais d’ailleurs pris soin de ne pas le faire fonctionner d’une manière continue ; le jeunot avait été programmé pour ne regarder qu’en cas de nécessité et jamais plus de quelques secondes d’affilée.

Je devais encore attendre neuf heures avant le prochain bombardement, celui de la Grande Chine.

Mais nous ne disposions pas de neuf heures pour prendre notre décision la plus importante, à savoir si nous allions véritablement la bombarder. Nous n’avions aucun renseignement, sauf ceux qui nous parvenaient par les stations terrestres. Des informations probablement erronées. Mince ! Nous ne savions même pas si nos terriers avaient, ou non, été bombardés. J’ignorais si Prof était mort ou s’il vivait encore. Merde et deux fois merde ! Je faisais maintenant fonction de Premier ministre, mais j’avais besoin de Prof ; être « chef de l’État », ça me faisait une belle jambe ! Et plus que tout, j’avais besoin de Mike pour calculer les données, estimer les incertitudes et évaluer les probabilités dans un sens ou dans l’autre.

Ma parole, je ne savais même pas si des vaisseaux se dirigeaient vers nous. Pire, je n’osais même pas regarder. Si je faisais marcher les radars et utilisais le petit rejeton pour explorer le ciel, tous les vaisseaux de guerre qu’il atteindrait de son faisceau le repéreraient infiniment plus vite que lui-même ne les verrait, car eux étaient conçus pour réagir aux échos radars. C’est du moins ce que l’on m’avait dit. Bon sang, je n’étais pas soldat, moi, juste un technicien informatique qui, par hasard, s’était retrouvé au mauvais endroit !

Quelqu’un a frappé à la porte ; je me suis levé pour ouvrir. Wyoh, avec du café. Elle ne m’a rien dit, elle s’est contentée de me donner une tasse puis de partir.

J’ai bu mon café. Ben voyons, mon garçon ! On vous laisse tout seul, et on attend encore que vous fassiez sortir des lapins de votre chapeau ! Je ne m’en sentais pourtant pas capable.

De très loin, du fin fond de ma jeunesse, j’ai alors entendu Prof :

— Manuel, quand vous vous trouvez devant un problème que vous ne comprenez pas, essayez de résoudre tout ce que vous pouvez comprendre, puis considérez une nouvelle fois le problème.

Souvent il m’avait enseigné des choses qu’il ne saisissait pas très bien lui-même – surtout en maths –, mais il m’avait surtout appris quelque chose de beaucoup plus important, un principe de base.

Et j’ai su ce que je devais faire en premier lieu.

Je suis allé près du jeunot et je lui ai fait imprimer tous les impacts prévus de tous les projectiles sur orbite. Une tâche aisée pour lui, un préprogramme qu’il pouvait sortir à n’importe quel moment, malgré le temps écoulé. Pendant qu’il s’exécutait, j’ai étudié certains des programmes que Mike m’avait préparés en cas d’éventuelles modifications.

J’en ai alors choisi certains ; ce n’était pas difficile, il fallait seulement faire attention, les lire avec soin et les taper sans faire d’erreur. J’ai demandé au jeunot de les imprimer une nouvelle fois pour pouvoir les vérifier avant de lui donner le signal d’exécution.

Une fois cela terminé – au bout de quarante minutes –, la trajectoire de tous les projectiles lancés sur un objectif à l’intérieur des terres avait été modifiée de manière à atteindre une ville côtière… tout en me ménageant la possibilité de retarder l’exécution pour les rochers de dernière réserve. Sauf si j’annulais le programme, le jeunot pouvait aussitôt les remettre en position.

Maintenant que je ne me sentais plus aussi opprimé par ce problème de temps, que je pouvais dévier tous mes projectiles vers la mer quelques minutes seulement avant le moment prévu pour l’impact, je pouvais enfin réfléchir.

Après cela, j’ai convoqué mon « cabinet de Guerre », c’est-à-dire Wyoh, Stu et Greg, mon commandant des Forces Armées, dans le bureau de Greg. Nous avons autorisé Leonore à aller et venir pour nous apporter du café et des sandwiches, on lui a même permis de rester si elle ne parlait pas. Leonore est une femme intelligente qui sait quand elle doit se tenir tranquille.

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