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L’Espagnol comme le Turc, auquel il ressemble si fort par la religion, ne sort pas de son pays pour aller porter la guerre chez les autres, mais aussi dès que l’on met le pied chez lui, on a tout le monde pour ennemi. La nation ne pense pas, comme en Allemagne, que c’est l’affaire des troupes de la défendre.

On a tant d’orgueil national, on est si patriote en Espagne que même les prêtres le sont. Aujourd’hui, la moitié des généraux qui se battent en Amérique pour la liberté, se sont élevés de la classe des curés. C’est une ressemblance de plus avec les Turcs.

La physionomie du clergé est peut-être le trait qui sépare le plus l’Espagne du reste de l’Europe.

Le clergé réside en Espagne; de plus, c’est le seul grand propriétaire qui vive au milieu des peuples. Le reste habite Madrid ou les capitales de province; de là, l’ancien proverbe pour marquer une chose impossible: faire des châteaux en Espagne. Ce séjour perpétuel des prêtres au milieu des peuples, cette restitution habituelle faite aux lieux mêmes des fruits qu’on a tirés, doivent donner une influence à laquelle les absents, les nobles ne peuvent avoir part. Si l’Espagnol écoute son prêtre comme son supérieur en lumières, il l’aime comme un égal en amour de la patrie. Les prêtres abhorrent les principes libéraux; on ne peut guère prévoir comment l’Espagne sortira de là. C’est un cercle vicieux; peut-être est-elle destinée à donner aux générations futures l’utile et nécessaire spectacle d’une monarchie complète[98].

L’Espagne était en feu depuis six mois, que Napoléon croyait encore que les bienfaits du gouvernement représentatif allaient lui gagner tous les cœurs. Il savait que, de tous les peuples de l’Europe, c’était celui qui avait porté le plus loin l’admiration pour ses hauts faits. L’Italien et l’Espagnol, n’ayant rien de frivole dans le caractère, étant pétris de passion et de méfiance, sont meilleurs juges de la grandeur dans les chefs des nations.

Si Bonaparte eût fait pendre le prince de la Paix, renvoyé Ferdinand VII en Espagne avec la constitution de Bayonne, une de ses nièces pour femme, une garnison de 80.000 hommes et un homme d’esprit pour ambassadeur, il tirait de l’Espagne tous les vaisseaux et tous les soldats qu’elle pouvait fournir. Qui peut assigner le degré d’adoration auquel se serait abandonné un peuple, chez lequel la louange devient un hymne et l’admiration une extase?

Il est hors de doute que Napoléon fut séduit par l’exemple de Louis XIV. Une fois provoqué à Iéna, il voulut faire autant que le grand roi. Il changea de roi précisément chez la seule nation à laquelle cette mesure ne convint pas. Les menaces, sans cesse renouvelées, de M. de Talleyrand, eurent aussi beaucoup de part à sa résolution.

Au moment où Joseph entrait en Espagne et où Napoléon retournait triomphant à Paris avec ses remords et ses fausses idées, l’Espagne était déjà soulevée. Tandis que le conseil de Castille ordonnait une levée de 300.000 hommes, un grand nombre de communes se soulevaient d’elles-mêmes. Il n’y eut pas de village qui n’eût sa junte. L’Espagne offrit tout à coup un spectacle semblable à celui de la France, lorsqu’en 1793, elle était couverte de corps délibérants sur les dangers de la patrie. À Séville, à Badajoz, à Oviedo le soulèvement eut lieu à la nouvelle des événements de Madrid, le 2 mai. Toutes les Asturies entrèrent en insurrection en apprenant le changement de dynastie. La populace commença par une suite horrible d’attentats contre tous ceux que, dans sa fureur, elle jugeait partisans des Français ou tièdes dans la cause de la patrie. Les plus grands personnages furent mis à mort; il en résulta une terreur universelle et la nécessité pour tous ceux qui gouvernaient d’exécuter franchement la volonté du peuple. Par la terreur, l’Espagne eut des armées.

Dès qu’une armée était battue, elle pendait son général. Les Espagnols étaient un peuple religieux et brave, mais non pas militaire. Ils avaient au contraire des habitudes de détester ou de mépriser tout ce qui tenait aux troupes de ligne. C’est un contraste parfait avec l’Allemagne. Ils considérèrent la guerre comme une croisade religieuse contre les Français. Un ruban rouge avec cette inscription: Vincer o morir pro patria et pro Ferdinando VII, était la seule distinction militaire de la plupart des soldats.

La première bataille entre ces fanatiques et les Français laissa vingt-sept mille cadavres dans les champs de Rio Seco. Des femmes se précipitaient avec d’horribles hurlements sur nos blessés, et elles se les disputaient pour les faire mourir dans les tourments les plus cruels; elles leur plantaient des couteaux et des ciseaux dans les yeux et se repaissaient, avec une joie féroce, de la vue de leur sang et de leurs convulsions[99].

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