De la noble maison politique oщ les tournois d'art oratoire les plus notables йtaient prononcйs pour louer la personnalitй de l'Empereur, prйcйdйs par le personnage impressionnant de Cйsar qui ne dйdaigna jamais le faste retentissant des grands spectacles, tel un ancien comйdien, les sйnateurs se dirigиrent vers le cйlиbre Temple de Jupiter oщ ceux qui йtaient rйcompensйs allaient recevoir l'aurйole de myrtes et les rosйs comme les triomphateurs. Ils obйissaient ainsi а l'inspiration de Sйnиque qui faisait de son mieux pour dissiper la dйplorable impression du gouvernement cruel de son ex disciple qui, en fait, dйcrйterait aussi sa mort en l'an 66. Au Temple de Jupiter, le grand artiste qu'йtait Domitius Nйron couronna la tкte de plus d'une centaine de sйnateurs de l'Empire, sous la bйnйdiction conventionnelle des prкtres. Les cйrйmonies religieuses durиrent plusieurs heures de suite vu leur caractиre complexe. Ce n'est qu'aprиs trois heures de l'aprиs-midi que l'йnorme cortиge sortit du temple en direction du Cirque Maximum. La longue procession, touchйe d'un aspect solennel rarement vu а Rome lors des siиcles postйrieurs, se dirigea d'abord au Forum en traversant la masse formidable de gens avec le plus grand respect.
Conformйment aux grandes cйrйmonies publiques de l'йpoque, le merveilleux cortиge йtait composй de la faзon suivante.
Devant, il y avait un superbe char magnifiquement dйcorй oщ йtait mollement installй l'Empereur, suivit de nombreux autres chars qui transportaient les sйnateurs rйcompensйs, ainsi que leurs auliques favoris.
Domitius Nйron, aux cфtйs de l'un de ses plus chers favoris, passait arrogant dans son habit rouge de triomphateur avec le luxe tapageur qui caractйrisait ses attitudes.
Puis, de nombreux jeunes d'une quinzaine d'annйes suivaient en groupe, а cheval et а pied, escortant les voitures d'honneur et ouvrant la marche.
Ensuite venaient, les cochers conduisant les biges, les quadriges ou les sйjuges, qui йtaient des chars а deux, quatre et six chevaux pour les folles йmotions des courses traditionnelles.
Derriиre les auriges, presque complиtement nus, marchaient les athlиtes pour effectuer les numйros de tous les grands et petits jeux de l'aprиs-midi ; aprиs eux, il y avait les trois chњurs classiques de danseurs, le premier йtait constituй d'adultes, le second d'adolescents agiles et le troisiиme de gracieux enfants, tous exhibaient la tunique йcarlate serrйe par une ceinture de cuivre, une йpйe sur le cфtй et une lance а la main, arborant un casque de bronze dйcorй de panaches et de cocardes qui complйtaient leur tenue extravagante. Ces danseurs dйfilaient, suivis de musiciens qui faisaient des mouvements rythmiques en exйcutant des ballets belliqueux au son des harpes d'ivoire, des flыtes courtes et de nombreux luths.
Aprиs les musiciens, telle une bande de sinistres histrions, surgissaient les Satyres et les Silиnes, personnages йtranges qui prйsentaient des masques horripilants, couverts de peaux de bouc sous lesquels ils faisaient les gestes les plus horribles, provoquant le rire frйnйtique des spectateurs avec leurs contorsions ridicules et йtranges. De nouveaux groupes musicaux se succйdaient qui йtaient accompagnйs de plusieurs exйcutants secondaires du culte de Jupiter et d'autres dieux, et tenaient dans leurs mains de grands rйcipients en guise d'encensoirs en or et en argent d'oщ sortaient d'enivrants nuages d'encens.
Derriиre les exйcutants avec leurs parures d'or et de pierres prйcieuses, venaient les statues de nombreuses divinitйs arrachйes, pour l'occasion, de leurs temples somptueux et tranquilles. Chaque statue dans son expression symbolique йtait accompagnйe par ses dйvots ou par ses divers collиges sacerdotaux. Toutes les images йtaient transportйes en grand apparat sur des chars d'ivoire ou d'argent, tirйs par des chevaux imposants, guidйs dйlicatement par des garзons pauvres de dix а douze ans dont le pиre et la mиre йtaient vivants, et soigneusement escortйs par les patriciens les plus en vue de la grande citй.
Ce n'йtait qu'un йblouissement de couronnes d'or, de pourpres, de luxueux tissus d'Orient, de mйtaux brillants, de scintillement de pierres prйcieuses.
Pour fermer le cortиge, la derniиre lйgion de prкtres et de ministres du culte йtait suivie d'une masse interminable de gens anonymes et inconnus.
La gigantesque procession pйnйtra dans le grand cirque dans un profond recueillement conformйment aux solennitйs les plus йlevйes. Le silence йtait а peine entrecoupй par des acclamations partielles de diffйrents groupes de citoyens quand passa la statue de la divinitй qui protйgeait leurs activitйs et leur profession dans la vie ordinaire.