«21. Enoch vécut soixante-cinq ans, et il engendra alors Mathusalem.
22. Et Enoch, après qu’il eut engendré Mathusalem, se promena avec Dieu pendant trois cents ans; et il engendra des fils et des filles.
23. Tout le temps donc qu’Enoch vécut fut trois cent soixante-cinq ans.
24. Or, Enoch, s’étant ainsi promené avec Dieu, ne parut plus, parce que Dieu l’enleva.» (Genèse, ch. 5)
Cet épisode est trop beau; n’importe quel commentaire le déflorerait. Admirons!
Quant à Mathusalem, c’est lui qui décrocha la timbale de la longévité. Il avait du nerf, le bonhomme; jugez-en. Il vécut dans la continence jusqu’à l’âge de cent quatre-vingt-sept ans, heureuse époque à laquelle il s’offrit le luxe d’avoir un moutard, et, après la naissance du jeune Lamech II, il trouva le moyen de vivre encore sept cent quatre-vingt-deux ans, donnant jusqu’au bout des preuves de sa virilité.
«26. Mathusalem, après qu’il eut engendré Lamech, vécut sept cent quatre-vingt-deux ans, engendrant encore des fils et des filles.» (Textuel!)
Total: neuf cent soixante-neuf ans. Excusez du peu!… On avait la vie dure, en ce temps-là.
Et le père Noé?…
«30. Lamech appela son fils Noé, en disant: Celui-ci nous soulagera de notre œuvre et du travail de nos mains, sur cette terre que l’Eternel a maudite…
33. Et Noé avait passé cinq cents ans, quand il engendra Sem, Cham et Japhet.»
Avoir cinq cents ans, et se mettre alors seulement à becqueter sa petite femme?… Mieux vaut tard que jamais!…
On a fait couler beaucoup d’encre à propos de l’extraordinaire longévité des patriarches de la Genèse. Des docteurs catholiques, sentant combien ces blagues étaient par trop difficiles à digérer, ont tenté de sauver du ridicule les récits de l’Esprit-Saint; ils ont avancé qu’il fallait peut-être entendre années par lunaisons, en insinuant qu’à celte époque on comptait sans doute uniquement par lunes. A ce compte, Mathusalem serait mort octogénaire, voilà tout. Mais ces obligeants commentateurs ont été rabroués d’importance par les enragés qui tiennent à ces miracles de longévité des premiers hommes.
Le chanoine Rohrbacher, entre autres, dans son Histoire universelle de l’Église, déclare qu’il s’agit bien d’années de douze mois, et il cite, notamment, l’exemple d’Abraham, qui, selon la Genèse,
Non, bon Rohrbacher, et c’est vous qui êtes dans le vrai: les années dont parle la Genèse sont incontestablement de douze mois. Aussi, rien n’est plus amusant que le cas du bonhomme Noé, qui attendit d’avoir cinq cents ans bien sonnés pour faire zizi-panpan.
3. Les anges en concubinage sur terre
Nous voici arrivés à l’un des passages les plus curieux de la Bible, un de ceux dont la suppression dans les manuels d’histoire sainte montre le mieux le sans-gène des prêtres en leur art de fabriquer et remanier les dogmes.