Читаем La nuit des longs couteaux полностью

A l’entrée de Munich, la circulation est grande. Il est un peu plus de 8 heures. Dans le soleil qui se réfléchit en mille paillettes sur les eaux de l’Isar, les tramways filent, chargés d’employés, vers le centre de la ville. Les piétons sont nombreux, patientant en longues files aux arrêts. Il y a aussi les cyclistes, pressés, attendant le signal de l’agent pour s’élancer aux carrefours. La ville, malgré l’heure matinale, est recouverte déjà d’une brume chaude faite de fumées. Le convoi ralentit, puis s’arrête. Un officier S.S. court vers la voiture du Führer. Personne parmi les passants ne semble remarquer Adolf Hitler. Les Munichois passent, à peine tournent-ils la tête. Ils savent déjà que souvent il ne faut pas voir. L’arrêt a duré quelques secondes. Le S.S. repart avec les voitures qui ferment la marche et où s’entassent les chefs S.A. prisonniers. Ils vont être dirigés vers la prison de Stadelheim. Le Führer et les chefs nazis se dirigent vers le Hauptbanhof, la gare centrale de Munich. Le train de Berlin chargé d’officiers de la Sturmabteilung a dû arriver. Le Führer veut être sur place. Comme un chef de bande, un aventurier ou un chef d’État, il sait qu’il est des actions qu’il faut contrôler soi-même.


AU HAUPTBANHOF DE MUNICH.

Le Hauptbanhof est un immense bâtiment grisâtre situé près du Palais de Justice, au coeur de Munich, dans ces quartiers anciens que les voies de chemin de fer ont éventrés à la fin du XIXeme siècle. Les voitures du convoi se rangent dans l’une des cours intérieures, sur le côté nord de la gare. Les camions de la Reichswehr sont toujours là avec leurs hommes : certains soldats ont rejeté leur casque en arrière, d’autres somnolent. Des S.S. se précipitent vers les voitures. Hitler descend : le visage est toujours tendu. On lui annonce que Hess est arrivé de Berlin et qu’il attend le Führer dans le bureau de la direction de la gare. Le groupe suivi de Goebbels se dirige vers l’intérieur escorté par les S.S. armés. La haute silhouette de Brückner domine le groupe. On entend le haut-parleur qui, dans la rumeur bourdonnante de la gare, invite les chefs S.A. à se présenter au contrôle situé au bureau n° 1, pour recevoir des ordres les concernant. Sur tous les quais, des S.S. scrutent les voyageurs. Quand le train de Berlin est entré en gare, des officiers S.S. ont sauté sur les marchepieds, contrôlant un à un tous les passagers et visitant les wagons. Les S.A. ont été priés de suivre les S.S., Standartenführer et Oberführer ont accepté sans hésitation : ils ignorent tout ce qui les guette, ils imaginent que ces S.S. doivent les conduire à Bad Wiessee où Roehm et Hitler attendent leur arrivée. Ils ne s’inquiètent pas. Demain, ils seront en congé pour un mois. La plupart sont encore à demi endormis après une nuit passée dans le train, ils marchent pesamment aux côtés des S.S., au milieu des voyageurs que ne surprend plus cette débauche d’uniformes noirs, bruns. Ainsi sont pris les Obergruppenführer von Krausser, Hayn, ainsi est pris le Gruppenführer Georg von Detten et Hans Joachim von Falkenhausen et beaucoup d’autres. Quand ils interrogent, veulent protester, il est trop tard : ils sont entourés, désarmés, conduits déjà vers les voitures noires qui attendent ; encadrés par des S.S. ou des hommes de la Bay Po Po, ils sont invités à monter dans ces voitures dont les chauffeurs sont des S.S., poussés s’ils refusent et les voitures se dirigent maintenant rapidement dans l’indifférence de la grande ville animée, vers la prison de Stadelheim.


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