Читаем La planète des singes полностью

Je ne m’étais pas trompé. Les gorilles exécutaient maintenant les ordres du grand patron, après que Zira les eut transmis. Nous fûmes répartis par couples. Quelles diaboliques épreuves présageait donc cet appariement ? Quelles particularités de la race humaine ces singes désiraient-ils étudier, avec la rage d’expérimentation qui les possédait ? Ma connaissance des laboratoires biologiques m’avait suggéré la réponse : pour un savant qui s’est donné l’instinct et les réflexes comme champ d’investigation, l’instinct sexuel présente un intérêt primordial.

C’était cela ! Ces démons voulaient étudier sur nous, sur moi, qui me trouvais mêlé au troupeau par l’extravagance du destin, les pratiques amoureuses des hommes, les méthodes d’approche du mâle et de la femelle, les façons qu’ils ont de s’accoupler en captivité, pour les comparer peut-être avec des observations antérieures sur les mêmes hommes en liberté. Sans doute aussi désiraient-ils se livrer à des expériences de sélection ?

Dès que j’eus pénétré leur dessein, je me sentis humilié comme je ne l’avais jamais été et je fis le serment de mourir plutôt que de me prêter à ces manoeuvres dégradantes. Cependant, ma honte fut réduite dans de notables proportions, je suis obligé de l’avouer, quoique ma résolution restât ferme, quand je vis la femme que la science m’avait assignée comme compagne. C’était Nova. Je fus presque enclin à pardonner sa sottise et son aveuglement au vieil olibrius et je ne protestai d’aucune manière quand Zoram et Zanam, m’ayant empoigné à bras-le-corps, me jetèrent aux pieds de la nymphe du torrent.

XVII

Je ne raconterai pas en détail les scènes qui se déroulèrent dans les cages pendant les semaines qui suivirent. Comme je l’avais deviné, les singes s’étaient mis en tête d’étudier le comportement amoureux des humains et ils apportaient à ce travail leur méthode habituelle, notant les moindres circonstances, s’ingéniant à provoquer les rapprochements, intervenant parfois avec leurs piques pour ramener à la raison un sujet récalcitrant.

J’avais commencé moi-même à faire quelques observations, pensant en agrémenter le reportage que je comptais publier lors de mon retour sur la Terre ; mais je me lassai vite, ne trouvant rien de vraiment piquant à noter ; rien, si ce n’est tout de même l’étrange manière dont l’homme faisait sa cour à la femme avant de s’approcher d’elle. Il se livrait à une parade tout à fait semblable à celle qu’exécutent certains oiseaux ; une sorte de danse lente, hésitante, composée de pas en avant, en arrière et de côté. Il se mouvait ainsi suivant un cercle qui allait en se rétrécissant, un cercle dont le centre était occupé par la femme, qui se contentait de tourner sur elle-même sans se déplacer. J’assistai avec intérêt à plusieurs de ces parades, dont le rite essentiel était toujours le même, les détails pouvant varier parfois. Quant à l’accouplement qui concluait ces préliminaires, bien que je fusse un peu éberlué les premières fois d’en être le témoin, j’en arrivai très vite à ne pas lui accorder plus d’attention que les autres prisonniers. Le seul élément surprenant de ces exhibitions était la gravité scientifique avec laquelle les singes les épiaient, sans jamais négliger d’en noter le déroulement dans leur carnet.

Ce fut une autre affaire quand, s’apercevant que je ne me livrais pas à ces ébats – je l’avais juré, rien n’eût pu m’inciter à me donner ainsi en spectacle –, les gorilles se mirent en tête de m’y contraindre par la force et commencèrent à m’asticoter à coups de pique, moi, Ulysse Mérou, moi, un homme créé à l’image de la divinité ! Je me rebiffai avec énergie. Ces brutes ne voulaient rien entendre et je ne sais ce qui serait advenu de moi sans la venue de Zira, à qui ils rapportèrent ma mauvaise volonté.

Elle réfléchit longtemps, puis s’approcha de moi en me regardant de ses beaux yeux intelligents et se mit à me tapoter la nuque en me tenant un langage que j’imaginais ainsi :

« Pauvre petit homme, semblait-elle dire. Que tu es bizarre ! On n’a jamais vu un des tiens se comporter ainsi. Regarde les autres autour de toi. Fais ce qu’on te demande et tu seras récompensé. »

Elle sortit un morceau de sucre de sa poche et me le tendit. J’étais désespéré. Elle aussi me considérait donc comme un animal, un peu plus intelligent que les autres, peut-être. Je secouai la tête d’un air rageur et allai me coucher à un bout de la cage, loin de Nova, qui me regardait d’un oeil incompréhensif.

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