Читаем Les lauriers de flammes (1ère partie) полностью

Si longtemps elle l'avait attendu, avec un espoir qui faiblissait à chaque aurore, qu'elle avait peine à croire qu'il pût se trouver de nouveau si proche d'elle ! Les nouvelles ne vont pas vite, en mer Noire, où chacun estime qu'il y a temps pour tout, et toutes les hypothèses étaient permises. Le corsaire américain avait-il été victime de l'une de ces brutales et féroces tempêtes dont l'ancien Pont-Euxin était coutumier ? Ou bien, l'une des flottilles de pirates, sans nationalité définie, parce qu'elles appartiennent à toutes, qui infestaient encore la mer intérieure, l avait-elle capturé ? Contre cette vermine, les vaisseaux du Tsar demeuraient impuissants car, sortie brusquement de la nuit ou de la brume, elle attaquait à la manière d'un essaim de guêpes et disparaissait aussi subitement et aussi totalement que si un coup de vent l'avait enlevée...

Et puis, dans les débuts du mois de juin, alors que l'empire ottoman, las de combattre, signait la paix avec la Russie, Osman était revenu du port avec une nouvelle beaucoup moins tragique que celle qu'on attendait, encore que fort inquiétante : le brick avait été capturé par les Russes et conduit à Odessa où il était tenu sous surveillance. On ignorait ce qu'il était advenu de l'équipage.

Plus que certainement, il était captif du redoutable gouverneur de Crimée, de cet émigré français devenu sans doute plus russe que les Russes, en dépit de son nom, et qui mettait tout son génie, à ce que l'on disait, à développer la richesse de la Russie du Sud et à faire d'Odessa une véritable ville : en un mot, du duc de Richelieu.

Par la princesse Morousi, à qui la proximité de son domaine d'Arnavut Koy permettait de rendre à Marianne des visites assez discrètes pour ne pas éveiller l'attention toujours vigilante de Sir Stratford Canning, la recluse d'Hümayunâbâd avait pu reprendre des relations lointaines avec Nakhshidil et obtenir d'elle une enquête sans tapage, dont le résultat s'était révélé positif : le corsaire américain était, en effet, captif du gouverneur d'Odessa et la Validé avouait son impuissance à le tirer de là : il ne pouvait être question, pour un étranger turbulent, de compromettre si peu que ce fût le nouvel équilibre, si fragile encore, entre la Porte et le gouverneur du Tsar.

Renseignée, Marianne avait rapidement pris sa décision. Au surplus, les nouvelles, si mauvaises qu'elles fussent, étaient encore meilleures que ce qu'elle avait craint et valaient mieux que sa longue incertitude : une fois de plus Jason avait perdu sa liberté, mais du moins était-il toujours vivant.

D'autre part, elle n'avait reçu, de son enfant, aucune nouvelle : le prince, dona Lavinia et le bébé semblaient s'être tout à coup volatilisés et, lorsqu'elle avait essayé d'interroger Osman sur l'endroit où pouvait se trouver son maître, l'intendant s'était contenté de s'incliner profondément, en protestant qu'il l'ignorait totalement, mais avec un sourire d'une naïveté trop réussie pour être sincère. A ce sujet aussi, il avait dû recevoir des ordres sévères.

Marianne s'était donc contentée de lui demander un navire rapide et aussi commode que possible pour les transporter, elle et Jolival, jusqu'à Odessa. Le duc de Richelieu avait été jadis l'ami et le condisciple de son père au collège du Plessis. Elle avait donc réclamé et obtenu un passeport à son nom de jeune fille, pensant que, peut-être, le duc se laisserait gagner par ses souvenirs d'enfance et accorderait à la fille de son vieil ami la libération de la Sorcière et de son équipage. Il l'accorderait en tout cas plus aisément qu'à une amie de Napoléon !

Ensuite, bien sûr, il faudrait ressortir de ce piège de la mer Noire, franchir de nouveau le Bosphore, repasser sous les canons de Roumeli Hissar et sous le nez des navires anglais, mais tous ces obstacles semblaient à Marianne autant de problèmes mineurs : puisqu'elle les affronterait aux côtés de Jason, ils perdraient beaucoup de leur force d'intimidation. Le plus important, le plus difficile aussi, était d'arracher l'Américain à ce grand seigneur, ennemi mortel très certainement de toute forme de libéralisme et qui, s'il possédait seulement le tiers du caractère de son illustre ascendant, devait être d'un maniement assez difficile.

Et Marianne l'imaginait sans peine : hautain, arrogant, faisant peser sur son vaste gouvernement une férule impitoyable, ami des arts et du faste et sans doute remarquablement intelligent, mais à peu près intraitable.

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