Читаем Les lauriers de flammes (1ère partie) полностью

On n'eut pas à chercher beaucoup. L'indispensable objet reparut l'instant suivant dans la main du long jeune homme qui sans se presser et sans avoir perdu un pouce d'un calme presque olympien, rejoignait le groupe.

— Votre pipe, Monsieur ! articula-t-il.

Le visage contracté de l'inconnu s'éclaira :

— Ah ! merci, mon garçon ! Allez donc voir où en sont les travaux du corps de garde. Je vous rejoins dans un instant. Ainsi... ajouta-t-il en tirant vigoureusement sur son tuyau pour essayer de le ranimer, ainsi... vous êtes français ? Mais que diable venez-vous faire ici, si je ne suis pas trop indiscret ?

— Vous ne sauriez l'être ! sourit Marianne qui, décidément, trouvait cet homme follement sympathique. Je viens voir le duc de Richelieu. Il est toujours gouverneur de cette ville j'espère ?

— Il l'est toujours... comme de toute la Nouvelle Russie. Le connaissez-vous ?

— Pas encore. Mais vous, Monsieur, qui parlez si bien notre langue et devez être français aussi, vous le connaissez sans doute ?

L'homme eut un sourire.

— Vous serez étonnée, Madame, du nombre de Russes qui parlent français mieux que moi, mais vous avez raison : je suis français et je connais le gouverneur.

— Est-il à Odessa en ce moment ?

— Mais... je le suppose ! Je n'ai pas entendu dire qu'il se fût éloigné.

— Et quel homme est-ce au juste ? Pardonnez-moi si j'ai l'air d'abuser de votre obligeance et de vos instants, mais j'ai besoin de savoir. On dit, à Constantinople, que c'est un homme redoutable et d'abord difficile, qu'il règne en véritable potentat et qu'il ne fait pas bon lui résister. On dit aussi qu'il déteste l'empereur Napoléon et tout ce qui l'entoure...

Le sourire avait disparu du visage de l'inconnu et le regard attentif dont il enveloppait Marianne prit une nuance pesante, presque menaçante.

— Les Turcs, dit-il lentement, n'ont pas eu, jusqu'à présent, beaucoup de raisons d'aimer Son Excellence qui leur a joué quelques tours durant la guerre. Mais, si je vous comprends bien, vous venez de chez notre récent ennemi ? Ne craignez-vous pas que le gouverneur ne vous demande des explications sur ce que vous y faisiez ? Voyez-vous, l'encre n'est pas encore tout à fait sèche au bas du traité de paix. La méfiance est encore installée et les sourires que l'on échange sont toujours un peu jaunes... Je ne peux que vous recommander une extrême prudence. Quand il s'agit de la sécurité de son territoire, le gouverneur est intraitable.

— Voulez-vous dire qu'il me prendrait pour une espionne ? murmura la jeune femme devenue soudain très rouge. J'espère qu'il n'en sera rien, car mon propos...

Elle dut s'interrompre. Le long jeune homme, revenu en courant, se penchait avec une agitation insolite à l'oreille de son maître et lui jetait quelques paroles. L'inconnu eut une exclamation de colère et se mit à jurer.

— Des jean-f... ! Rien que des jean-f... ! J'y vais ! Excusez-moi, ajouta-t-il en se tournant vers la jeune femme, mais je dois vous quitter pour affaire importante. Nous nous reverrons sans doute...

Fourrant sa pipe dans sa poche, sans même prendre la peine de l'éteindre, il esquissa un salut et s'éloigna en courant. Jolival le rappela :

— Monsieur ! Hé, Monsieur... Dites-nous au moins le nom de l'homme de bien auquel nous devons la vie. Sinon comment voulez-vous que nous vous retrouvions ?...

L'homme hésita imperceptiblement, puis lança :

— Septimanie ! On m'appelle Septimanie !...

Et il disparut sous le portail de l'arsenal, laissant Jolival proprement sidéré.

— Septimanie ? maugréa-t-il. C'est le nom de ma femme !

Marianne se mit à rire et revint glisser son bras sous celui de son vieil ami :

— Vous n'allez pas en faire une maladie et prendre ce brave homme en grippe à cause de cela. Il arrive qu'un prénom féminin soit également un honnête nom de famille et cela prouve seulement que notre sauveur doit descendre de quelque habitant de l'ancienne Septimanie gauloise.

— Peut-être ! fit Jolival, mais cette évocation n'en est pas moins fort désagréable. Ma parole, si je ne la savais si fort attachée à l'Angleterre, je craindrais de la voir apparaître ici... Mais, marchons ! Je vois là notre guide qui s'impatiente et il est temps d'aller constater à quoi peut bien ressembler une auberge russe...

A la grande surprise des deux voyageurs, celle où les conduisit le jeune garçon ressemblait étonnamment à un hôtel parisien de la fin du siècle précédent. Et Jolival, qui s'était attendu à quelque isba crasseuse et enfumée, franchit avec soulagement le seuil dallé de belles pierres blanches de l'hôtel Ducroux qui, suivant la coutume des auberges russes, portait le nom de son propriétaire.

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